Chapitre 10 - Présentations

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Allongé dans mon lit, je fixe le plafond depuis plus d'une heure. Dans quelle dimension alternative suis-je tombé ? En repensant à ces derniers jours, certains indices me paraissent évidents pourtant ma raison me rappelle qu'aucune personne sensée n'aurait pu s'imaginer une chose pareille.

Qui penserait qu'un chien est un humain ? Qu'il est possible d'avoir la capacité de se changer en animal ? On dirait le scénario d'un mauvais film de science-fiction.

Malgré tout, "Dana" a su se montrer convaincante. Elle a profité de ma surprise pour ajouter des détails à son récit en me racontant son premier jour dans mon appartement, la visite chez le vétérinaire, ... Au fur et à mesure de son récit, sa voix se faisait plus assurée, plus forte. Il n'y avait aucune hésitation dans ses propos.

Pour finir, elle m'a laissé refaire son bandage. Même si le corps est différent, la plaie est identique, je l'ai constaté de mes propres yeux.

Cette découverte m'a rendu curieux. J'ai envie d'en savoir plus. Comme chaque enfant, j'ai grandi en rêvant d'avoir un jour des pouvoirs magiques, d'être un super-héros... Et voilà qu'une telle personne existe réellement ! Comment est-elle devenue ainsi ? Appartient-elle à une communauté secrète ? Un léger sourire s'installe sur mon visage alors que j'imagine des réponses à toutes mes interrogations. Je demanderai à Dana ce qu'il en est vraiment demain.

En parlant d'elle, je tourne la tête vers l'autre côté du lit pour observer son visage paisible. Elle dort encore. Après avoir été soignée, elle a insisté pour partir au beau milieu de la nuit malgré mes protestations. Heureusement pour moi, la fatigue l'a rattrapée et elle n'a pas pu résister longtemps au sommeil. D'ailleurs, elle n'a pas bronché lorsque je l'ai déplacée pour l'allonger plus confortablement. Il s'agit peut-être d'un effet secondaire de sa transformation, son corps doit avoir besoin de repos après cette importante dépense d'énergie.

A ce propos, il va falloir que je lui apporte à manger sans éveiller les soupçons de mes parents et justifier l'absence soudaine du chien qui me suivait à la trace encore hier. J'attends patiemment le réveil de Dana pour lui en parler.

Cette dernière sort de son sommeil vers dix heures et semble avoir du mal à se souvenir des évènements de la veille. Elle m'observe de longues secondes en baillant avant de réaliser qu'elle ne se trouve plus sous forme canine. Ses yeux s'écarquillent et elle quitte le lit d'un bond pour se réfugier dans un coin de la chambre, le plus loin possible de moi.


- Que m'avez-vous fait ? accuse-t-elle d'emblée, je me souviens de m'être endormie...

- Et je t'ai portée jusqu'au lit pour que tu te reposes, rien d'autre, répondis-je en soupirant. Pour qui me prends-tu ?

Elle se contente de baisser les yeux en serrant les bras autour d'elle en signe défensif.

- Je voulais aller te chercher un petit déjeuner, de quoi as-tu envie ?

- Je ne peux pas sortir ? demande-t-elle en fronçant les sourcil.

- Mes parents pourraient être légèrement surpris par ta soudaine apparition mais je te laisse volontiers leur expliquer la raison de ta présence chez eux, répondis-je d'un ton narquois en haussant un sourcil.

- Je ne vais pas les déranger, il faut juste que je m'en aille

- Fais comme tu veux, commentais-je en m'adossant contre le chambranle de la porte. Il est évident que ces vêtements ne t'appartiennent pas et tu es en plein milieu de la campagne, sans véhicule pour te déplacer, personne ne va trouver ça suspect

- Alors je suis prisonnière, c'est bien ça ? Il n'aura pas fallu longtemps pour que de nouveaux barreaux me sont imposés

- Je ne suis pas un adepte du kidnapping, ne t'en fais pas. J'aimerai seulement que mes parents ne soient pas mêlés à cette histoire

- Mais vous savez pourtant... que je suis un monstre

- Différente, coupais-je d'un ton tranchant. Depuis notre rencontre, tu ne m'as jamais donné une seule raison d'avoir peur de toi et c'est encore moins le cas avec ton apparence actuelle

Le silence s'installe tandis que je lui laisse le temps d'intégrer mes propos. Elle a l'air plus calme, je devrais en profiter pour obtenir quelques réponses. Décidé, je m'assois sur le bord du lit pour faire face à Dana.

- En revanche, j'avoue avoir plusieurs questions, accepterais-tu d'y répondre ? repris-je en lui faisant signe de s'asseoir à côté de moi.

Méfiante, Dana me rejoins tout en maintenant une distance d'environ un mètre entre nous. Incertain de la question à poser en premier, j'essaie de commencer par le début.

- Comment est-ce que tu..., commençais-je en faisant un geste vague en sa direction.

Bravo Ethan, quelle éloquence ! Occupé à me fustiger pour ma maladresse, je me laisse tomber en arrière et m'étale sur le matelas en soupirant. Les mains couvrant mon visage, j'arrête immédiatement de me fustiger mentalement lorsqu'elle prend la parole.

- Je ne suis pas née comme ça, avant j'étais complètement normale. Ma particularité est le résultat d'une expérience scientifique, lance-t-elle comme une simple banalité. Les symptômes ont commencé lorsque j'avais environ quatorze ans et en quelques mois, je suis devenue... Dana, conclut-elle après une légère hésitation.


Il s'agit d'une histoire grossière, beaucoup d'éléments sont manquants mais je n'insiste pas plus pour en connaître les détails. J'espère gagner sa confiance et parvenir à obtenir plus d'informations dans l'avenir mais ce n'est pas le bon moment.

- En parlant de Dana, quel est ton véritable nom ? demandais-je pour alléger l'atmosphère.

- Ces dernières années, personne ne l'a utilisé, je n'étais que le sujet n°16 du projet Hybride

- Et avant ça ? insistais-je.

- Ma mère m'a nommée Lily, répond-elle dans un souffle.

- C'est un beau prénom, commentais-je. J'imagine que tes parents doivent être à ta recherche, sais-tu comment les contacter ?

Je regrette ma question dès qu'elle franchit mes lèvres. Les lèvres pincées, Lily me regarde avec un mélange de crainte et de peine. Elle n'a peut-être plus aucun souvenir de ses parents et je ne fait que remuer le couteau dans la plaie en lui rappelant à quel point elle est seule.

- Ma mère est morte, annonce-t-elle d'une voix atone.

- Je suis désolé...

- Quant à mon père, il n'a pas réussi à obtenir les subventions suffisantes pour financer ses recherches alors il s'est contenté du seul cobaye qu'il avait sous la main, sa propre fille

- C'est ton père qui a fait ces expériences ?! m'exclamais-je en me redressant d'un coup pour la regarder dans les yeux.

- Eh oui, on ne choisit pas sa famille, lance-t-elle avec ironie en haussant les épaules.

Projet HybrideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant