C'est une blague..., soupirais-je en baissant les yeux vers la chienne.
En voyant l'état dans lequel elle se trouve, abîmée par la cruauté humaine, je ne peux m'empêcher d'avoir un pincement au coeur. Quel genre de monstre pourrait la laisser là en sachant tout ce qu'elle a traversé ?
- Allez viens, on rentre, lançais-je en prenant le sachets de nourriture dans une main et la couverture dans l'autre. Tu te sens capable de marcher ?
Après un trajet interminable ponctué de nombreuses pauses, nous arrivons finalement à l'appartement. J'ouvre la porte et pose mon fardeau sur la table de la salle à manger avant de me laisser tomber une chaise en soupirant. Me voilà revenu à la case départ.
Ma colocataire s'allonge sous la table sans me lâcher du regard, elle semble épuisée. Je lui dépose un bol d'eau fraîche et l'observe se désaltérer en me réinstallant correctement contre le dossier de mon siège.
Je savais que ce n'était pas une bonne idée. Au moment où je l'ai ramenée chez moi pour la soigner, il était évident que les choses ne tourneraient pas comme prévu. Ai-je vraiment imaginé que la situation ne durerait pas plus d'une nuit et qu'une famille aimante viendrait la chercher le lendemain ? Nous ne sommes pas dans un conte de fées. Avoir un animal est une responsabilité, je le sais pourtant. Alors pourquoi ? Qu'est ce qui m'a attiré ?
De toute façon, je ne peux pas la garder. L'appartement est petit, elle s'ennuierait toute la journée.
- Concentre-toi ! Ce n'est pas le sujet, marmonnais-je à voix haute en fermant les yeux. Je te rappelle que tu ne veux pas d'un animal de compagnie, ajoutais-je en secouant la tête.
Si le vétérinaire ne peux pas trouver de famille d'accueil, je vais le faire moi même ! Mes connaissances concernant les habitants du quartiers sont assez maigres mais je connais un autre endroit qui pourrait accueillir un chien sans problème.
Décidé, je compose le numéro de téléphone.
- Ferme des quatre saisons, bonjour, que puis-je faire pour vous ?
- Salut, c'est moi. Je pensais passer vous voir le weekend prochain, vous êtes libres ?
- Bien sûr, nous t'attendrons pour le dîner
- Parfait. Juste pour information, je ne serais pas seul, lançais-je avant de raccrocher aussitôt pour échapper à un interrogatoire en règle.
Une bonne chose de faite. La place ne manque pas là bas. Satisfait de mon plan, je passe le reste de la journée dans l'appartement, à lire et jouer aux jeux vidéos.
Le lendemain fut le pire lundi de toute ma vie.
Pour commencer, il m'a fallu énormément de volonté pour quitter l'appartement le matin même en laissant seul un animal que je ne connais pas. J'ai failli rebrousser chemin plusieurs fois. Plusieurs idées me sont venues pour justifier mon absence à la boutique mais pour chacune d'entre elles, la culpabilité de mentir à mon patron en le laissant se débrouiller seul ne faisait que croître. Résolu, j'ai fini par me rendre au travail.
Une fois là-bas, je n'ai pas pu m'empêcher de regarder mon téléphone toutes les cinq minutes pour vérifier l'heure et m'assurer que personne n'essayait de me contacter. A cause de mon manque de concentration, j'ai enchaîné les erreurs au travail et les rattraper m'a pris un temps fou.
J'ai fermé la boutique avec presque une heure de retard. Je n'ai jamais eu aussi hâte de rentrer chez moi. Arrivé devant la porte de l'appartement, je prends le temps de souffler quelques secondes. C'est bon. La porte est fermée, personne n'est entré par effraction, le chien ne s'est pas enfui. Et s'il était mort suite à ses blessures ? Quelle peine encourt-on en laissant un animal affaibli pendant de longues heures sans surveillance ? Mes mains tremblent et je parviens difficilement à insérer la clé dans la serrure.
En entrant, je suis immédiatement frappé par le silence. Moi qui appréciait tant le calme de mon appartement, aujourd'hui il ne fait que renforcer mon inquiétude.
- Euh, je suis rentré ? lançais-je à vois haute.
J'ai l'air tellement stupide ! A l'origine, je voulais juste annoncer ma présence pour que l'animal ne panique pas. Depuis notre retour de la clinique vétérinaire, je ne parviens plus à me comporter avec détachement envers cet animal. J'ai pris conscience que le rétablissement de cette chienne dépendrait uniquement de moi, j'ai un pouvoir de vie et de mort sur elle. C'est une responsabilité dont je ne voulais pas. Mon objectif était de passer la relève à une personne compétente, pas de m'investir personnellement dans sa rémission.
Un bref aboiement me sort de mes pensées. Assise sur le canapé, elle m'observe avec attention. J'imagine qu'elle n'a pas bougé de la journée, il faudrait lui donner l'occasion de faire ses besoins dehors si je veux garder mon appartement propre.
- Allez, viens, on va se promener un peu, lançais-je en prenant mes écouteurs et une couverture.
Par précaution, je l'aide à descendre du canapé avant de la laisser marcher seule, il faut que ses muscles continuent de travailler pour qu'elle n'ait pas séquelles.
Nous marchons dans le quartier environ un quart d'heure avant de rentrer. Même si elle se déplace lentement, la chienne tient le coup jusqu'à notre retour. Sa respiration est rapide et je lui donne immédiatement un peu d'eau pour la désaltérer.
Après le dîner, je m'occupe des soins médicaux. Avec la quantité astronomique de coupures présentes sur l'ensemble de son corps, j'ai l'impression de lui faire passer une douche de désinfectant. Pour finir, je remplace le pansement autour de son flanc en m'assurant qu'il soit bien serré pour éviter que la plaie se rouvre au moindre mouvement.
Le reste de la soirée se déroule dans un calme agréable. Avoir une présence animale suffit pour faire disparaître mon sentiment de solitude habituel.
Au fur et à mesure, une routine s'installe. Je pars travailler chaque matin, bien moins stressé que le premier jour. A mon retour, c'est l'heure de la promenade et cette dernière dure de plus en plus longtemps. Concernant les soins, les coupures ont presque toutes disparu et la blessure principale est en bonne voie de guérison.
Je me surprend régulièrement à parler à voix haute dans l'appartement et même si je n'attends pas de réponse, le fait de me savoir écouté est étrangement réconfortant.
Le vendredi soir, nous sommes tous les deux confortablement installés dans le canapé pour regarder un match de football lorsque quelqu'un frappe à ma porte.
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Projet Hybride
ParanormalEthan est un garçon comme les autres. Sa vie est calme, partagée entre son travail d'employé de supérette, ses amis et sa famille. Pourtant, tout change un soir, après une rencontre qui va bouleverser sa routine. Un simple geste de bonté le fait ent...