Le soleil levant parvenait faiblement à percer les éternels nuages de Feiticeira. C'est ce que Kévin se dit sur le chemin du retour. Une semaine qu'il était ici, et pourtant, il n'y avait jamais vu un morceau de ciel bleu comme lors de ces précédents voyages sur le dos d'Urantia. À croire qu'il fait toujours un temps de merde ici, pensa-t-il. Le jeune homme avait un léger mal de tête, probablement dû à la chope d'hydromel qu'il avait bu. Si Delphine n'était pas intervenu, Kévin aurait fini comme Erika, ce qui n'était pas permis dans son état.
Pourtant, il ne sentait plus sa blessure, et mis à part cette petite migraine, Kévin était en forme. C'était comme si le fait d'avoir passé la nuit sous une aile de son dragon l'avait revigoré. Sa blessure n'était plus qu'une cicatrice bien visible mais désormais très loin de l'infection. On ne voyait quasiment plus les points de sutures, et toutes les croûtes de sang étaient parties pour ne laisser que de la peau douce. La médecin en chef avait fait un sacré travail, Kévin devait le reconnaître. On lui poserait sûrement des questions sur cette cicatrice une fois de retour chez lui, mais tant pis.
En fait, ce fut à cet instant qu'il se dit, pour la première fois, ce qui se passerait dans son monde une fois de retour. Son père devait probablement être mort d'inquiétude au point d'avoir appelé les gendarmes le jour même de sa disparition. Ça, Kévin en était certain, mais il ne savait pas s'il devait se pardonner. Après tout, Kévin ne s'était pas douté une seconde que cette cartouche de Nintendo 64 allait l'amener ici. Tout ça semblait si loin. Mais à part son père, qui d'autre allait s'inquiéter pour lui ? C'est sur cette question que le lycéen était sans réponse. Comme par hasard, cela s'était produit le jour où il s'était pris un râteau monumental par Jennifer. Nul doute que l'on allait lier sa "fugue" avec ça, ou autre chose, ne serait-ce son tempérament anxieux et ses antécédents. En tout cas, Kévin réalisa que ce serait à Maravland qu'on le regretterait le plus, et non en France. Ce constat qu'il fit entre les rues de Feiticeira le mit de mauvaise humeur. Il était difficile pour lui de se dire qu'une fois de plus, il allait quitter tout ça pour le bien de tous, et ne surtout pas faire comme Marly.
"Mais où étiez-vous passé ? hurla soudainement une femme dans l'oreille du jeune homme qui nageait encore dans ses pensées. Vous n'êtes pas rentré hier !
-Bonjour ? lui fit Kévin en entrant dans la chambre tout en esquivant son infirmière, qui ne cessait de crier contre lui.
-Je me suis fait un sang d'encre pour vous ! J'ai cru qu'il vous était arrivé quelque chose d'horrible... Et puis je vous ai vu festoyer alors que vous êtes censé rester tranquille à ce que je sache ! Votre comportement risque de compromettre l'avenir de ce royaume, jeune homme ! C'est inacceptable !
-D'accord, mais maintenant, si tu pouvais me foutre la paix que j'aille me laver...
-Ca ne va pas se passer comme ça ! Je vais mettre Delphine au courant, vous pouvez en-..."
Kévin lui ferma la porte au nez, soupirant de soulagement d'être de nouveau au calme. Cette folle allait s'égosiller à la sorcière qui allait l'envoyer balader. En effet, en plus d'être au courant, Delphine avait veillé sur lui. Cependant, elle ne savait pas où est-ce qu'il était allé dormir, mais de toute façon, lorsqu'elle le verra en forme et guéri, cela la rassurera. Mieux : peut-être que d'avoir dormi avec Urantia avait joué un rôle majeur dans sa guérison, surtout depuis qu'il avait bu son sang. Un détail qui intéresserait Delphine, elle en apprenait plus que jamais à mesure que le temps passait. L'élu était devenu un cas d'étude pour elle.
En retirant son sweat rouge neuf, Kévin renifla sa propre haleine sans le vouloir. Cela lui donna un haut-le-cœur. Pourtant, il avait pris l'habitude de se laver les dents, même durant le voyage avec du savon qui avait mauvais goût, mais qui lui permettait d'embrasser Erika sans s'inquiéter sur son hygiène buccale. Il repensa à la jeune femme et se mit à rire tout seul : elle devait avoir mal aux cheveux à l'heure qu'il était. Après avoir frotté sa brosse à dents sur un savon, Kévin se lava les dents avec une grimace. Le dentifrice mentholé lui manquait. Par ailleurs, il était étonnant que ce monde possédait de quoi se brosser les dents avant d'avoir inventé un savon plus adéquat pour la bouche.
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La Prophétie du Sphinx
Siêu nhiênMenant une vie parisienne sans saveur, Kévin tente de trouver sa voie dans une société qui décide de son avenir à sa place. Malgré ses talents d'escrimeur, la majorité de ses journées sont des échecs constants. Et alors qu'il décide d'oublier son qu...