Chapitre 9

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En contemplant le visage monstrueux logé à l'arrière du crâne de Quirrell, Voldemort se perdit un instant dans ses pensées. Il n'avait jamais prêté attention à son apparence physique, même s'il savait qu'il avait été séduisant... avant.

La magie noire avait corrompu son âme et il avait commencé à en porter les stigmates, lorsque ses yeux avaient pris un éclat rouge tout sauf naturel.

Il avait tenu pour acquis son corps humain, sans se soucier de le perdre un jour. Il luttait contre la mort, mais il n'avait jamais pensé aux ravages que pourraient faire le temps... ou la magie sur son enveloppe physique.

Il avait conscience que son charisme d'antan l'avait grandement aidé pour rassembler ses Mangemorts. Il avait également conscience que le monstre qu'il était devenu, parasitant Quirrell, n'attirerait personne, bien au contraire.

Certains de ses Mangemorts risquaient même de vouloir fuir, malgré la marque sur leur bras... Elle était pour l'instant presque invisible, délavée, preuve de sa faiblesse, et ces idiots pourraient en profiter pour briser le lien et recouvrer leur liberté.

Avec un soupir, Voldemort décida qu'il devrait se débrouiller avec Quirrell, bien que l'ancien Serdaigle soit un couard. Au moins, son hôte n'était pas complètement inutile : il lui offrait un accès à Poudlard, ce qui était inespéré.

Sentant la panique de Quirrell enfler, Voldemort grogna sèchement.

— Il te suffira de cacher mon visage sous un couvre-chef. Quelque chose de volumineux afin que je ne m'étouffe pas.

L'image d'un turban volumineux traversa ses pensées et Quirrell gémit.

— Comment pourrais-je expliquer ça ? Il y aura des questions !

Voldemort ricana.

— J'ai vu ta vie, très cher Quirinus. Le pauvre sorcier bègue, avide de savoir, mais ignoré par ses pairs. Humilié sans cesse... Même en tant que professeur, tes élèves ne te respectaient pas, n'est-ce pas ?

Quirrell resta silencieux, mais il se tendit, les poings crispés. Voldemort garda le silence quelques instants, se délectant de sa colère. Puis, il reprit, d'un ton presque indifférent.

— Ignore-les, Quirinus. Ce que je vais t'enseigner te permettra de te débarrasser d'eux, de les faire souffrir mille morts si tu le souhaites. Tu pourrais les maudire et les regarder chuter... ou les tuer de tes propres mains si tu es avide de sang...

Voldemort sentit les émotions de Quirrell changer, se teintant de peur, mais également d'une pointe d'envie. La part la plus sombre du petit professeur insignifiant voulait une revanche pour les années où il avait été bousculé par ses camarades, et lui, Voldemort, était capable de lui offrir les moyens de réaliser ses rêves les plus sombres.

Il reprit avec un reniflement moqueur, certain d'avoir gagné l'attention de l'homme.

— Porte ce turban. Choisis le plus ostentatoire, puis devient ce qu'ils voient de toi. Prétends avoir peur de tout, bégaie plus que jamais.

La confusion évidente de Quirrell le fit rire.

— Oh, ne vois donc tu pas ? Personne n'ira soupçonner le pauvre professeur bègue qui a peur de son ombre. Ils détourneront le regard, emplis de gène ou de pitié... et tu seras libre de faire ce dont tu as envie.

Quirrell hocha lentement la tête, l'indécision s'éloignant peu à peu. Il murmura cependant, avec une pointe de perplexité.

— Comment expliquer mon attachement à cet accoutrement ? Je m'habillais habituellement à la mode moldue pour mon cours.

Voldemort laissa échapper un ricanement.

— Bien évidemment. Les forces du mal... sont un cours bien plus sérieux qui nécessite une tenue correcte, non ? Et ce turban pourrait être un cadeau reçu pour un acte de bravoure.

Quirrell protesta, maussade.

— Personne ne croira que je suis capable de bravoure !

Voldemort renifla.

— Bien sûr que non. Mais ils ne te poseront pas de questions. Ils imagineront que c'est un talisman pour te protéger ou n'importe quelle autre stupidité qui passera par la cervelle épaisse de tes étudiants. Laisse les rumeurs faire le travail. Crois-moi, personne ne protestera, surtout pas sous le règne du vieux fou. N'est-il pas celui qui prône la plus grande tolérance ?

Après un long silence, Quirrell acquiesça et s'éloigna du miroir. Voldemort ferma les yeux pour lui permettre de se déplacer sans tituber. Après avoir fouillé dans une malle pendant quelques longues minutes, Quirrell en extirpa un turban d'un violet vif, orné d'un bijou couleur or. C'était voyant et de mauvais goût, mais Voldemort ne put s'empêcher de rire.

— C'est parfait. Ils seront tellement focalisés sur cette chose ignoble qu'ils ne regarderont pas plus loin. D'où vient ce turban ?

Quirrell hésita puis il grommela avec un haussement d'épaules.

— Lorsque j'ai visité l'Afrique avant l'Albanie, une tribu de sorciers vendait ces turbans aux touristes. Ils m'en ont offert un à mon départ.

Voldemort renifla puis le corrigea.

— Non. Tu diras qu'un prince africain te l'a remis pour te remercier de l'avoir... sauvé. D'avoir tué une créature... Un zombie ! Traite-le comme un porte-bonheur, refuse que qui que ce soit y pose la main et la rumeur fera le reste.

Il pouvait sentir le scepticisme de Quirrell, mais ce dernier hocha la tête avant d'enrouler le turban autour de sa tête. Voldemort détesta immédiatement la sensation d'être enfermé sous ces couches de tissus, mais il ne se plaignit pas, conscient qu'il devait rester caché.

Et puis, après tout, il n'avait pas réellement besoin de respirer, puisqu'il profitait de son hôte pour lui fournir les éléments de base à sa survie. De la même façon, il pouvait voir ce que Quirrell voyait et il n'était donc pas complètement aveugle.

Quirrell demanda soudain, avec une pointe d'inquiétude.

— Et si Dumbledore change d'avis et refuse de me laisser enseigner la défense contre les forces du mal ?

Voldemort ricana.

— Il ne changera pas d'avis. Il reste peu de temps avant la rentrée et il n'aura pas la chance de trouver un remplaçant si vite. Le poste est maudit...

Quirrell haussa les épaules.

— Cette rumeur ? Je n'y crois pas. Le poste a toujours été pourvu même si les professeurs ne restent pas longtemps.

Voldemort resta silencieux un instant, puis il gloussa méchamment, provoquant un frisson dans le dos de Quirrell.

— Oh, je sais de source sûre que cette malédiction existe, mon cher. Je suis celui qui l'a lancée sur le poste, lorsque ce vieux fou m'a refusé ce qui m'était dû !

Quirrell resta silencieux, mais Voldemort pouvait sentir avec satisfaction son inquiétude.

A travers ses yeuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant