11. Reveil

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— Vous me rendez perplexe. Je trouve surprenant que vous ayez vécu sans voir aucun professionnel de santé dans votre état, dit une femme assise en face de Tom.

Elle notait l'intégralité de l'histoire qu'il venait de raconter.

— Depuis petit, je me renfermais sur moi, mais tout a changé. J'ai délaissé tout mon entourage depuis cinq ans. J'ai vingt-six ans et plus rien. Je ne vis plus, je survis, répondit Tom l'air pensif.

— Nous avons mis quand même trois séances avant d'en arriver là. Je vous aiderais du mieux que je le peux.

— Avez-vous pensé à retrouver vos anciens camarades ? demanda la psychologue.

— À vrai dire non, les seuls liens avec mon passé, ce sont les dessins de Laura, son médaillon, mes tenues et mes armes.

— Je pense à votre mère, avez-vous essayé d'en apprendre plus sur elle ? Vous me parlez de votre père, mais pas d'elle. Sa mort a sans aucun doute provoqué un traumatisme chez vous. Peut-être devriez-vous retourner à votre maison d'enfance ? Vous pourrez y faire votre deuil ? Je pense qu'une partie de votre mal-être vient de sa mort.

— Je vais y réfléchir. Je ne suis pas convaincu de vouloir voir vers le futur. Je souhaite régler mes comptes avec mon passé, conclut l'ancien chef des FSI.

Il resta plusieurs minutes à réfléchir. Il se doutait que le GIT le traquait et qu'il pourrait être dangereux de se présenter dans un tel endroit. Une potentielle traque constitue l'une des raisons de sa fuite. Par peur de se faire retrouver, il vivait sous un faux nom. Cependant, il n'y était pas retourné depuis le jour de son enlèvement. Alex insistait afin qu'il y retourne, mais sans succès. La séance se finit et il quitta la pièce en pensant partir voir la maison le lendemain. À l'extérieur, il marcha le long de la route jusqu'à un petit ponton en bois sur lequel il s'appuya. Les avant-bras posés, il contempla le courant de l'eau sous ses pieds. Il vit une cane et ses canetons passer devant lui. Sa main vint glisser le long de sa joue gauche jusqu'à son front. Il gardait un souvenir fort de Frantz, une longue cicatrice qui passait sur son œil. Il se souvint de l'esquive qu'il réussit à réaliser quand Frantz se jetait sur lui avec un couteau.

— Si j'avais esquivé une seconde plus tard, je perdais l'usage de mon œil, remarqua-t-il.

Il frappa de toutes ses forces contre la barrière du pont, en brisant le bois de cette dernière. La violence de son coup lui arracha une partie de peau.

— Je ne faisais confiance à personne ! Pourquoi je me suis mis à avoir confiance en des types que je ne connaissais pas ! Pourquoi je ne suis pas resté comme j'étais ? Laura, aide-moi !

Il poussa un cri de désespoir si fort que les oiseaux présents dans l'arbre à côté de lui s'envolèrent. Un passant traversa la route en accélérant ses pas dans le but de ne pas le croiser. Après plusieurs heures à marcher, il était de retour chez lui. Dans un logement miteux qui ne faisait même pas quinze mètres carrés, au treizième étage. Il ne possédait qu'un canapé poussiéreux et une petite cuisine pleine de vaisselle sale. Il ne mangeait presque plus. Son corps n'en subissait aucune conséquence. Il n'avait ni maigri ni perdu sa musculature. Il s'allongea et regarda le plafond jusqu'à s'endormir d'épuisement. Le lendemain était un samedi. Il passa la journée chez lui sans rien faire de bien particulier. Il se réveilla tôt, et resta allongé sur son canapé sans même manger le midi. En milieu d'après-midi, il repensa à la discussion de la veille.

— Si je me souviens l'adresse qu'Alex m'avait transmise, je dois parcourir une heure de route pour arriver à destination. Je pourrais m'y rendre quitte à repartir aussitôt, songea-t-il.

Il prit son courage à deux mains et se redressa. Il s'habilla avec un jean et un tee-shirt propre et prit sa voiture afin de visiter son passé. Il sortit de son véhicule à son arrivée, mais se figea un long moment devant la maison. Il ressentait de la peur, un sentiment qu'il eut plus régulièrement l'habitude de transmettre que de ressentir. Sans trop savoir pourquoi, il s'approcha et la porte d'entrée s'ouvrit avant même qu'il n'entame son troisième pas.

Je ne meurs pas, je tue !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant