CHAPITRE 12

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Nous avions rejoint la maison après deux bonnes heures de basket. J'avais compris pendant que nous jouions que le mot « basket » était aussi employé pour un sport de salle. Dans la liste de mes sports préférés, le basket venait de passer en première place juste avant le foot. Si un jour j'avais l'occasion de faire une activité sportive, je choisirai celui-là.

Ma mère était assise sur une chaise de la cuisine. Les cheveux à peine décoiffés, elle regardait dans le vide comme elle faisait si souvent. Ses mains entouraient un mug d'où sortait un filet de fumée, indiquant que le contenu était chaud. Contrairement à moi, elle avait gardé ses vêtements de la veille. Elle avait juste mis un pull que Fred lui avait prêté dessus sa chemise bleu ciel.

Après avoir ôté mes chaussures, j'accourrai vers elle pour me blottir dans ses bras.

– T'as bien dormi Matt ?

Je lui fis signe que oui. Elle me prit la main et regarda un moment le bandana que j'avais noué autour de mon poignet. Elle me sourit puis me demanda aller m'occuper le temps qu'elle parlerait avec Fred. Je ressortis donc de la maison avec le ballon de basket sous le bras. Je ne me sentais pas rassuré dans cette campagne. J'avais l'impression que j'étais un cerf que l'on traquait inlassablement.

J'avais passé mon après-midi à jouer. Cela faisait un moment que je m'étais allongé sur l'herbe. Je m'étais alors détendu de tous mes membres. J'avais fait en sorte de devenir un objet qui avait fusionné avec le sol. Comme un handicapé physique, j'étais un paralysé de mon enfance. Pour moi, me détendre n'avait plus de sens. J'avais brièvement gouté à ce que pouvait être le bonheur d'une enfance heureuse en jouant avec Fred. Mais la réalité m'avait rattrapé et la claque fut rude.

J'observais le ciel, ces nuages avec leurs multiples formes. Pour des enfants de mon âge, ils se seraient amusés à voir des animaux comme des pandas ou des ours. Pour moi, j'avais juste réussi à voir un couteau, un grizzly, et d'autres choses effrayantes... J'en étais conscient : je n'étais pas un garçon comme les autres.

Les brindilles d'herbe fraichement tondues me picotaient les bras et le cou. En sentait cette sensation, les larmes me vint aux yeux. Il fut un temps, pendant un repas de famille, mon père avait déposé Kaylee sur la pelouse sauf qu'elle s'était mise à pleurer car elle n'aimait pas la sensation de picotement que lui procurait l'herbe.

J'étais allé la voir parce que les adultes avaient rigolé à ça sans pour autant l'aider. Pour ma part, je n'avais pas trouvé drôle que Kaylee pleure à cause de la pelouse. Je m'étais assis juste à côté d'elle puis j'avais pris ma petite sœur sur mes genoux. Kaylee avait arrêté de pleurer et moi je compris enfin ce qu'était la désagréable sensation de l'herbe qui pique.

Tous ces souvenirs jaillissaient un par un, à tour de rôle dans ma tête. Je voulais me remémorer tous les moments que j'avais passés avec ma petite sœur mais en même temps les oublier. Les effacer de ma mémoire comme on pourrait le faire en supprimant une photo. Mais le problème était que mon cerveau était rempli de millier de photos de cette époque et que je ne savais pas encore comment me débarrasser de certaines d'entre-elles.

— Matthieu ? Où es-tu ?

La voix chaleureuse de ma mère m'appelait. Alors que je venais tout juste de me redresser, elle ria quelques secondes parce qu'elle ne s'attendait pas du tout à me voir ici. C'était bizarre la sensation que me procura son rire. Je sentis comme un chaleur à l'intérieur de moi. Ces années de terreur et de souffrances étaient-elles en train de s'arrêter ?

— Ah Matt ! Tu viens, on va diner.

J'accouru vers elle et me précipitai dans ces bras. Puis nous nous rendîmes dans la salle à manger. Le repas était délicieux. Je n'en avais pas mangé un comme celui-là depuis longtemps. Des haricots beurres avec une mixture composée d'un peu de viande, de carottes, d'oignons et de champignon. Un vrai délice !

Puis Fred me proposa de regarder un dessin-animé pour me détendre. Il était super avec tous les personnages et leurs pouvoirs magiques. Là je me sentais bien, vraiment très bien. À la fin du dessin-animé, je suis allé me coucher et j'ai attendu que ma mère vienne. Elle apparut dans la chambre et vint s'asseoir sur le lit.

— Tu l'as trouvé comment cette journée ?

— J'ai trop aimé !

Après un temps j'ajouta :

— Et puis il est sympa Fred.

De ses mains, elle enleva le bandana qui était à mon poignet et le posa sur la table de chevet. La petite lampe nous éclairait de sa faible lumière.

— Il m'a appris à jouer au basket et c'est trop cool !

— Je suis tellement heureuse pour toi chéri. Ça me fait plaisir de te voir plein de joie.

Elle fit une pose en remettant de ses mèches de cheveux derrière ses épaules.

— Il faut que tu dormes parce que demain on repart.

— On va où ?

Question qu'il ne fallait pas que je pose parce que je me suis souvenu qu'elle ne me disait jamais où on allait pour me préserver.

— Je peux juste te dire que tu vas aimer ce qu'on va faire. Bon il est l'heure de dormir si tu veux être en pleine forme mon petit guerrier.

J'aimais bien ce surnom. Ça me donnait de la force pour affronter les obstacles. Ça me redonnait un peu de confiance en moi... Mais j'en avait perdu tellement...

Elle embrassa mon front puis me ramena les couvertures sur moi. Je l'entendis descendre les marches de la maison et fermer la porte de la cuisine. La nuit était claire. Ma mère avait encore oublié de fermer les volets de ma fenêtre (une bonne chose).

Ça faisait une heure que je m'étais couché mais je n'arrivais pas à trouver le sommeil. J'avais entendu ma mère se coucher environ une demi-heure après moi. Contrairement à nous, Fred était toujours debout.

Tout-à-coup, je me souvins que j'avais laissé le ballon de basket dans le jardin lorsque j'avais rejoint ma mère pour le diner. J'enlevai les couvertures de moi et je me mis debout sur mon lit. J'avais une super vue sur l'endroit où je m'étais allongé en fin d'après-midi. Et oui, grâce à la lumière de la lune, je pouvais voir l'objet sphérique toujours dans la pelouse.

Un mouvement attira soudainement mon attention. Il y avait une voiture qui empruntait le seul chemin qui menait à la maison. J'eus des frissons quand je compris qu'elle n'avait pas les feux d'allumés pour s'introduire chez Fred de façon très discrète. Je ne pouvais maintenant plus détacher mes yeux de cet engin à quatre roues qui continuait d'avancer.

Au lieu d'entrer dans la propriété, la voiture s'arrêta à quelques mètres de la fin du chemin. Le conducteur en sortit et mon cœur menaça de sortir de ma poitrine.

Mon père se dirigeait droit vers la maison !

* * *

Comment le père de Matthieu a-t-il pu les retrouver. Matthieu ne rêve-t-il pas ?

Vous pouvez commenter et me donner votre avis sur le livre ;)

À bientôt !


𝐃𝐞𝐬𝐭𝐢𝐧𝐲 𝐌𝐚𝐭𝐭𝐡𝐢𝐞𝐮Où les histoires vivent. Découvrez maintenant