Les liens obscurs

Chapitre 6

Colère

CURT

Ma colère gronde à travers les couloirs. Ces pestes gâchent mon programme, je me voyais déjà siroter un cocktail aux Bahamas, pied en éventail sur le sable fin. Et maintenant quoi ? On me dit de m'inquiéter d'un papounet, mais elles ignorent que la véritable menace est d'être là, chez moi. Elles n'ont pas de chance, ici. Et chez elles, elles servent à la science.

- Qu'est-ce qu'elle t'a dit ?

Je secoue la tête tandis que j'allume une cigarette. Lance, mon bras droit, mon compagnon de confiance, mon frère d'une autre mère. L'envie de lui cracher à la figure me démange aussi, mais je me contente simplement de laisser échapper la fumée de ma cigarette à la place.

- Des choses que je savais déjà.

Réponds-je d'un ton sombre, mes pensées s'égrenant dans les méandres du passé. Il arque un sourcil, son regard incisif trahissant sa curiosité, mais aussi une pointe de méfiance à mon égard.

- Je n'ai pas massacré à mort ces abrutis pour elle. C'est lui qui a donné le premier coup, et ça a simplement déclenché mon réflexe de défense.

- Je n'ai rien dit, mec.

Se défend-il, levant les mains en signe d'innocence.

- Ton visage en dit long.

Je riposte, expirant la fumée âcre de ma cigarette.

- Je suis sûr que Mado est en lien avec le daron.

Poursuit-il. Mado est un trafiquant de drogue, j'y ai pensé, mais il n'est pas du genre scientifique, et il n'a pas de famille. Je ne prends pas le temps de lui faire part de ça.

- Il nous faut quoi comme info que tu n'as pas ?

- Retourne voir... C'est quoi son nom ? Vicki ? Pour le savoir.

Je réponds d'un ton distant, mon esprit déjà en train de naviguer dans les eaux troubles de mes souvenirs. Il lève les yeux au ciel, puis adopte un ton sérieux empreint de curiosité.

- Victoire, Gloire et Triomphe... Je parie que leur mère s'appelle Succès ou quelque chose du même genre. Qu'en dis-tu ?

Lance-t-il avec un sarcasme à peine voilé. Je laisse ses paroles glisser sans m'y attarder, agacé par leur banalité. De toute façon, j'en sais plus que lui. Je suis entouré d'incapables qui ne peuvent même pas me fournir des informations nouvelles ! Je crache la fumée de mon cigare tout en me remémorant l'expression sur le visage de ces hommes que j'ai tués. Une pensée fugace me traverse l'esprit concernant la dernière fille : je pourrais presque la garder en vie pour qu'elle cuisine à mon service. Mais cela ne reste qu'une pensée fugace, une ombre parmi les nombreuses qui peuplent mon esprit tourmenté.