Chapitre 9 : Une épine dans le pied

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Je m'enfonce bientôt dans les entrailles du métro, trop heureuse d'échapper pendant quelques instants à la météo du jour et de me fondre dans une foule compacte. Je lance des regards furtifs à droite et à gauche alors que la sensation désagréable d'être observée me colle toujours à la peau.

Mais rien.

Je renifle.

Et pour couronner le tout, un rhume me pend au nez. Littéralement. L'addition manque de sommeil, plus tenue trempée, met assurément à rude épreuve mon système immunitaire. Tout cela ne me donne qu'une envie : me changer et m'enterrer sous une couverture.

Quelques stations plus tard, la surface toujours martelée par le déluge est ralliée.

Une boisson chaude ne me fera pas de mal non plus.

Dehors, les hommes et les femmes sortant du métro se dispersent, courant vers l'abri le plus proche. Moi-même, je longe les murs d'un pas pressé. Il est clair qu'aujourd'hui, les clients ne sont pas légion dans les petits commerces du coin. Le soleil, quant à lui, derrière son rideau de nuage, entame la fin de sa course. Aussi, je ne suis pas mécontente de me retrouver enfin dans le hall de mon bâtiment. La boîte aux lettres est ignorée pour grimper les marches jusqu'au quatrième étage.

Ce n'est qu'au seuil de mon appartement que je me fige.

La porte est entrouverte.

Très mauvais signe. Parce que c'est une certitude, je n'ai jamais oublié de verrouiller derrière moi. D'ailleurs, un regard vers la serrure m'apprend qu'elle a été forcée. Sans grande subtilité de surcroît. Et très franchement, ça ne donne pas envie de jouer à la petite fouineuse, et tant pis tricot et chocolat chaud.

Lentement, je fais un pas en arrière.

De l'autre côté, le parquet grince sous le poids de semelles, des murmures sont soufflés. Non, inutile de rester plus longtemps dans les parages. Je ne désire aucunement participer à la petite sauterie qui se prépare à l'intérieur. Seulement, alors que je me retourne, le destin me tend un magistral doigt d'honneur.

Mon nez me picote désagréablement.

J'éternue.

— Merde, sifflé-je entre mes dents.

Bien sûr, ça met aussitôt la puce à l'oreille des intrus.

La chamade dans le cœur, je cours rejoindre les escaliers. Mais je ne suis pas aussi rapide que je le veux. Une main harponne mon col et m'oblige à tituber en arrière jusqu'à m'écraser comme une masse sur le parquet de mon appartement. Mes lunettes, elles, valdinguent dans un bruit de verre brisé.

Je cille.

Quatre paires de jambes entrent alors dans mon champ de vision erratique.

— Ferme la porte, ordonne une voix grondante.

Le sang bat furieusement contre mes tempes et l'adrénaline impulse l'énergie nécessaire pour me redresser dans un mouvement vif. J'ai assez de réflexes pour anticiper le premier coup et reculer.

La porte d'entrée claque.

Puis on se regarde en chiens de faïence pendant une poignée de secondes. Mes invités ont la dégaine de brutes, la trogne froissée de contrariété. À côté, je ne suis qu'un vulgaire fétu de paille. Néanmoins, ce qui me déplaît le plus au point, ce sont les éclats d'aciers dans leur paluche.

Hors de question de me faire larder.

— Allez vous faire foutre ! Dégagez de chez moi ! hurlé-je.

Des Épines pour IvyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant