L'Ombre d'Alyia - Tome 2

Chapitre 2

Sans un regard de plus vers Valion, je m'engageai dans l'allée menant au club privé. Surnommé l'Opale du jour, en hommage à la cité antique qui avait jadis abrité des Vessoryias et des humains jusqu'à sa destruction à cause de Vareck, le célèbre night-club était une oasis secrète, mais cette fois réservée aux seuls Vessoryias. J'y étais allée quelques fois avec les Faucheurs, malgré l'interdiction formelle de m'y rendre de Vareck.

            Le Vessoryia qui gardait l'entrée, dont un des pouvoirs – outre une très grande force – était de mémoriser dans les moindres détails chaque visage qu'il croisait – me connaissait très bien, tout comme l'ensemble des Faucheurs. S'il parut surpris de me voir après des années, il n'en laissa rien paraitre, se contentant de hocher la tête à mon attention, me permettant de passer devant la foule nombreuse qui attendait de pouvoir entrer dans le saint des saints des établissements nocturnes Vessoryias.

            L'Opale du jour était reconnue comme le nightclub Vessoryias le plus branché de la planète, là où il fallait être chaque nuit. Il s'étendait sur plusieurs étages dans les entrailles de la Terre, et on racontait que certaines strates n'étaient accessibles qu'aux plus vieux et puissants Vessoryias de la planète. Je n'avais pas pénétrée jusque-là, mais les Faucheurs avaient une place de réservée dans un des étages les plus prisés et select du club.

            J'entrai dans le club d'une démarche assurée, je veillais à me tenir bien droite, de sorte à mettre en valeur mon décolleté, bien déterminée à attirer l'attention sur moi. Je savais que je n'aurais rien à faire pour demander à m'entretenir avec Darius, c'est lui qui viendrait à moi. J'étais certaine qu'il savait déjà que je me trouvais dans son club.

            La musique pulsait de plus en plus puissamment à mes oreilles tandis que je m'enfonçais dans les entrailles du club. Les lumières tamisées laissaient voir les corps légèrement vêtus des Vessoryias qui dansaient langoureusement un peu partout autour de moi. La musique glissait sur ma peau comme une caresse, m'invitant à me laisser aller, à laisser mes membres parler pour moi. La musique Vessoryia avait ce genre d'effet – encore plus entrainante et enivrante que la musique humaine – lorsque les Vessoryias jouaient et créaient de la musique, ils y mettaient une partie de leur don, ce qui rendait leur œuvre vivante, puissante, les humains auraient dit magique, voire dangereux.

            Je me dirigeais vers le bar, un sourire assuré scotché sur les lèvres. Pour me donner du courage, je m'imaginais être Dana, décochant des œillades espiègles et passionnées à tous ceux qui osaient soutenir mon regard. J'allais commander un verre lorsque deux femmes masquées aux longues jambes fuselées me rejoignirent, m'encadrant de leur beauté sulfureuse.

            Je dus empêcher un sourire victorieux d'étirer mes lèvres. Cela ne faisait même pas cinq minutes que j'étais entrée dans le club, et Darius envoyait déjà ses sbires à mes trousses.

            -Un verre, mesdames ? leur proposai-je, amusée, alors que leurs regards hypnotiques étaient rivés sur moi.

            Les deux femmes ne parurent nullement amusées.

            -Vous êtes attendues dans les étages inférieurs, me fit l'une d'elles en approchant son visage du mien. Veuillez nous suivre.

            -Maintenant ? fis-je en riant, l'air plus calme que je ne l'étais en réalité, en tapotant le bar de mes ongles vernis.

            -Maintenant, me dit l'autre un peu plus sèchement, ses yeux verts devenus soudain froids et durs.

            -Très bien, fis-je en leur emboitant le pas.