Chapitre 7

454 35 8
                                    

            Je restai quelques minutes à méditer les paroles de Dana, puis constatant que Vareck était toujours dehors, je me levai et me dirigeai vers la grande baie vitrée, mais évidemment, le jour n'était pas encore levé, impossible de distinguer quoi que ce soit, mais je sentais que Vareck n'était pas loin.

J'hésitais. La fatigue commençait sérieusement à se faire sentir et je n'avais qu'une envie, me glisser entre mes draps et dormir. Et en même temps... une partie de moi voulait retrouver Vareck, tout ce que j'avais appris aujourd'hui, de la vérité sur Ea et les Faucheurs, à Darius, en passant par Dana me travaillaient. Sans parler de mes dons auxquels j'avais à nouveau accès. Cette journée avait été pleine de bouleversements, et j'avais besoin de quelqu'un pour en parler. Le temps où je pouvais m'entretenir avec Vareck sans crainte me manquait.

Je repensai alors au souvenir du baiser, volé de ma mémoire par celui-là même qui me l'avait donné. J'avais pensé que la meilleure solution était qu'il ne découvre jamais que je m'en souvenais, mais une partie de moi avait envie de le confronter, qu'il s'explique, pourquoi avait-il cru bon de me voler ainsi mes souvenirs ? J'avais envie de lui dire que je me souvenais, parce que j'étais curieuse de savoir ce qui se passerait ensuite, ce que deviendrait notre relation. Un mélange de crainte et d'excitation m'envahit. Que voulais-je vraiment ? Qu'est-ce que je fuyais ?

Je regardai mes mains et les fausses Iryatza. J'avais à nouveau de quoi me défendre, je n'étais peut-être pas aussi puissante que Vareck, mais je n'étais pas non plus sans défense, j'étais assez forte pour l'affronter, pour mener cette discussion.

Rassemblant tout le courage que j'avais, je sortis du Refuge et me plongeai dans la pénombre. Je suivis la trace écrasante de son pouvoir, et bientôt je le trouvai. Il se tenait en haut d'une falaise, j'étais déjà souvent venue ici pour réfléchir. En plein jour, on pouvait voir la vallée magnifique qui se déployait en contrebas, et de nuit, c'était le meilleur endroit pour observer les étoiles – il n'y avait aucune pollution lumineuse ici. Vareck les observait en ce moment même.

Ne sachant pas quoi dire ni comment engager la conversation, je me contentai de me poster à côté de lui. Je balançai la tête en arrière, et, comme lui, je me laissai aller à contempler silencieusement la voute céleste. Il n'y avait pas un bruit à part le bruit d'une cascade au loin, et de temps en temps, le cri d'un animal nocturne. Rien du tout, à part nous deux.

-Dire qu'un jour, je ne rêvais qu'à étudier les astres, et un jour, peut être, aller moi-même dans cet espace infini, finis-je par souffler. Cela semble si loin, à présent.

Je sentis le regard de Vareck quitter les étoiles pour se poser sur moi. Je continuai à regarder le ciel, soudain prise d'une terrible nostalgie.

-Je rêvais d'avoir des amis sur qui je pourrais toujours compter, je rêvais de trouver l'amour et de fonder une famille. (Je souris tristement.) Et en même temps, une partie de moi a toujours désiré plus, n'arrivant pas à se contenter de ce qu'une vie humaine pouvait m'offrir. Je voulais laisser une empreinte dans ce monde, je voulais vivre plus intensément, je voulais tout savoir.

Je baissai enfin les yeux vers Vareck.

-J'avais trouvé ça auprès de vous, avouai-je. Je m'étais enfin sentie moi-même, en paix, à ma place. Puis tout s'est effondré, et j'ai cru que jamais plus je ne ressentirais ce sentiment. J'ai cru retrouver cette sérénité en compagnie de Jarod, Spencer et Vivi, mais ce n'était qu'un leurre, qu'un fantôme de ce a quoi j'avais déjà gouté. Depuis que je suis à nouveau au Refuge, que les Éternels ne dardent plus leur regard assassin sur moi, que tu m'as libérée, je... mon Dieu, je déteste devoir l'admettre, mais ce sentiment est revenu.

L'Ombre d'Alyia - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant