LES VACANCES . 09

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Le fantôme de la location. 09





Pierre pensait profondément que Benjamin était beau.Il le trouvait sublime, et ce, depuis presque toujours.

Quand il disait que Benjamin était beau, il ne parlait pas seulement de ce qu'il dégageait physiquement, mais d'un tout. En-dehors d'être beau de visage, la profondeur de sa bienveillance, de sa tendresse et de sa gentillesse, finissait de parfaire sa beauté. C'était pour toutes ses qualités, que la première fois qu'il s'était rencontré au collège autour de cette table de cantine, il avait eu envie d'être l'ami de Benjamin.

Avant lui, Pierre n'avait jamais rencontré un garçon dont le silence dégageait une puissance aussi forte et qui n'avait pas besoin de mots pour dire qu'il aimait une personne. Benjamin ne jugeait pas, ne méprisait pas et comprenait toujours.

Il était peu loquace, mais qu'est-ce que ses yeux étaient bavards quand il vous autorisait de vous y plonger !

Près de Benjamin et sans effort, Pierre avait appris l'humilité, la gentillesse, mais surtout avait grandi. S'il fallait recommencer, il aurait encore voulu que ce jour-là, dans la cantine du collège, qu'ils rient autour de ce repas qui ne leur aspirait pas confiance. S'il devait perdre tous ses amis et n'en garder qu'un, il aurait choisi Benjamin sans aucune hésitation.

Grandir ensemble, c'était beau et transcendant parce qu'il lui suffisait de regarder son ami pour se voir évoluer également.

Quelquefois, il se sentait honteux de ne vouloir partager Benjamin avec aucun autre ami. Quelquefois, il réalisait même qu'il était un peu jaloux de la proximité entre Frédéric et Benjamin. Parce que même si ce garçon ne lui appartenait pas et jamais, il n'aurait voulu que Benjamin ne lui appartienne, une part de lui avait constamment peur de ne plus être spécial dans le regard de son ami. Ce regard qui l'avait encouragé, qui l'avait soutenu, qui avait compatis, qui l'avait aimé comme un frère par moment. Ce regard dans lequel il pouvait se perdre des heures. Ce regard qui l'avait si souvent fait s'interroger et douter à la fois.

Ouais, Benjamin était et resterait un point central dans son existence.

Dans le fond, quand Pierre était sincère avec lui-même, il se disait quelquefois que Benjamin n'était pas seulement un ami dont il était très proche. Quand il remettait les choses en perspective, il devait reconnaître que souvent, il s'était senti jaloux du temps que Benjamin passait avec les quelques hommes qui étaient entrés à tour de rôle dans son existence.

Ouais, Benjamin avait plus d'une fois bousculé ce que Pierre croyait être des certitudes, mais il n'était pas prêt à l'admettre de vive voix, encore moins à lui-même.

Pourtant, à un moment, dans sa vie, Pierre avait eu des sentiments pour Benjamin. Ce genre de sentiments trop subtils pour comprendre qu'il ne s'agit pas seulement d'amitié.

Il avait seize ans et Benjamin dix-sept et Pierre se rappelait encore, avoir ressenti de la jalousie comme jamais il n'en avait ressenti. De la jalousie, mais pas seulement. De l'amour. Il avait ressenti de l'amour pour Benjamin. Pas un amour fraternel comme ils en avaient toujours eu. Pas non plus de l'amitié. Un amour amoureux.

Benjamin était à l'époque dans les prémices des relations amoureuses et il y avait cet autre garçon avec lequel il était. Il s'appelait Martin et n'était pas un mauvais gars. D'ailleurs, il était tout autant adorable et doux que Benjamin. Il fallait reconnaître qu'ensemble, ils étaient en harmonie parfaite et Pierre était au premier rang afin d'y assister. Il ne pensait même pas que cela l'affecterait parce qu'il était, au départ, très heureux pour son ami. Mais au fil des mois, chaque fois qu'ils les voyaient ensemble, Pierre se demandait si près de son ami ils auraient été presque aussi beau que Martin et Benjamin.

CACHE CACHE GÉANTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant