Lana
Je marche voir cours jusqu'à ma chambre. Mon cœur bat à mille à l'heure et je claque si fort la porte que j'ai un instant, eu peur de l'avoir cassé. Je mets mes mains devant ma bouche et étouffe le cri qui en sort. Je viens de le rabaisser devant tout le monde. Je suis complètement malade. Si je continue à le titiller je vais me faire remarquer et mon commandement va être remis en question si ce n'est pas déjà le cas !
Je sais qu'être la seule femme de l'équipage est dangereux. J'en ai bien conscience. Mon supérieur me l'avait bien fait remarquer lorsqu'il m'avait donné l'ordre de mission : « Vous pouvez refusez si cela vous dérange trop ». J'ai évidemment accepté. Je n'ai rien qui m'attends sur la terre ferme alors que dans cette boite de fer, je trouve une famille. Elle me considère pour ce que je suis et je ne veux en aucun cas me séparer d'elle. C'est pourquoi je dois être irréprochable sur mes actions et mon comportement. Je le devrai, alors expliquez-moi pourquoi j'entorse toutes les règles que je m'applique depuis des années pour Raffman ?
Je tourne en rond dans ma minuscule chambre. Je sens qu'une crise de panique arrive dans ma poitrine. Je reconnais toujours les signes : tremblements des mains, souffle court, les bruits qui s'estompent et les larmes qui montent. Je sens les vannes se lâchées et toutes mes craintes se déversent comme un tsunami qui me ravage entièrement me laissant sans seule sans aucun gilet de sauvetage.
Suis-je à la hauteur ? Je ne contrôle rien alors que je devrais tout contrôler.
Je ne suis qu'une bonne à rien.
Je rate tout.
Je n'ai pas d'autre vie qu'ici dans un sous-marin.
Réussirai-je un jour ? Non jamais.
Je ne suis rien.
Vais-je réussir la mission ? Vais-je échouer ?
Des gens vont-ils mourir par ma faute ?
Je vais les tuer ?
Je ne suis qu'une meurtrière qui se cache derrière un tableau de commande et qui appui sur des boutons alors que j'ai la vie d'hommes entre mes mains.
Je vais les tuer ?
Je vais donner raison à mon père : je ne serais qu'une ingrate et bonne à rien.
Bonne à rien.
Bonne à rien.
Bonne à rien...
Tout s'emmêle dans ma tête. Mes pensées me submergent et je n'arrive pas à arrêter la descente. Comme dans un avion je sens le crash arriver. Je fais quelques pas fébriles avant de m'écrouler au pied de mon lit. Je sens mon cœur partir dans les tours. J'essaye d'atteindre mon placard et d'attraper mon carnet afin d'écrire mes craintes, de les sortir de ma tête mais mes jambes ne me répondent plus. Elles ne sont que tremblements. Ma respiration devient insoutenable. Lorsque je comprends que je ne vais pas réussir à me lever, je passe mes mains dans mes cheveux. Je ne peux m'empêcher de tirer dessus et de me répéter ces trois mots.
Bonne à rien.
Bonne à rien.
Bonne à rien.
Bonne à rien.
Ces trois mots ont brisé ma vie. Ils ont transformé mon cœur en un organe froid qui n'arrive pas à ressentir l'amour des autres.
J'ai toujours pensé que c'était une faiblesse : aimer. C'est un manque de contrôle car quoi qu'on face, l'amour nous pousse à faire des erreurs. Mes parents m'ont renié car j'avais suivi mon cœur. J'ai perdu Brad car je ne me suis jamais attachée réellement à lui. J'avais toujours peur qu'il s'en aille après lui avoir déclaré mes sentiments. C'est pour ça que je prenais toutes les missions qui se présentaient à moi. J'échappais à l'erreur et à la fin, je n'ai jamais pu éprouver de réels sentiments au lit. Encore et encore. Je ne fais que des erreurs. Je suis une erreur et je continuerais à faire des erreurs. Mais l'amour ? J'ai déjà essayé et je dois éviter.
Mes cris silencieux se perdent dans la pièce et mes gémissements sont étouffés dans ma gorge. Je ne dois rien montrer aux autres sinon ça serait une erreur. Mes bras tremblent et ne semblent pas vouloir s'arrêter. Ma gorge se bloque et l'air n'arrive plus à rentrer afin d'oxygéner mes poumons. Ma trachée est comme bloquée par mes tourments et mes peurs. Elles empêchent toutes tentatives de respiration.
C'est ce que je pensais lorsque deux mains se posent sur mes bras. Ces mains si grandes forcent mes bras à s'ouvrir pour qu'une aille dans mon dos et l'autre sous mes jambes. Ses mains me soulèvent du sol et colle contre un torse massif. C'est en étant collé à ce torse que je reconnais son odeur : Noé. Il est là. Il me tient dans ses bras.
Je le sens faire quelques pas et il me dépose sur quelque chose de moelleux. Mon lit. Il me pose sur mon lit. Je sens alors ses mains me libérer et lorsque je pense qu'il part je sens le lit remuer et son corps se coller au mien en m'encerclant de ses bras. Il se colle au mur et je me retrouve devant lui, mon dos contre son torse. Ses mains sur mon ventre tiennent les miennes. Je me rends compte que je me griffais. A travers mes yeux troubles de larmes, mes avant-bras sont zébrés de griffures rouges. J'entends alors sa voix :
- Respire Lana. Respire.
Je n'y arrive pas. Ma gorge me brule et je suffoque tellement que ma panique redouble en puissance. Sa voix grave continue de me parler. Lorsqu'il voit que je n'arrive, à rien totalement submergée par mes émotions, il me prend par les bras et me retourne. Je me retrouve à califourchon sur ses jambes, mon torse contre le sien. Mon corps ressent le sien. Je ressens chacune des parcelles de son corps qui est en contact avec le mien. Je sens sa main attrapée la mienne et la poser sur son torse, au niveau de son cœur. Je sens alors ce dernier battre contre ma paume, d'un rythme régulier et lent.
- Suis mon cœur Lana. Calle ta respiration sur la mienne d'accord ?
Il commence alors à respirer lentement. Son torse se soulève au fil des respirations. J'essaye, en vain.
- Lana. Lana regarde-moi.
Mes yeux sont bloqués sur ma main. Je n'arrive à rien faire. Mon corps ne m'appartient plus. Il est comme entravé. C'est alors que ses doigts glissent le long de mon menton et le remonte vers le haut. Mes yeux tombent alors sur les siens :
- J'ai dit regarde moi dit-il d'une voix forte.
Je tombe dans ces yeux. Ils sont devenus bleu orage. Ils sont opaques, mates. Ils pénètrent mon âme de toutes part. Je suis happée dans un tourbillon de bleu. Ses cils noirs battent doucement.
- Je veux que tu respires Lana.
Je sens mon corps se détendre comme si auprès de lui, mon corps marchait sous son unique contrôle. Je commence à respirer. Au départ par petites respirations qui s'accompagnait de raclement rauque de ma gorge. Puis, au fil des minutes Mon souffle reprend un cours normal, au même rythme que le sien. Durant tout ce temps mon regard est plongé dans le sien. Le sentir auprès de moi apaise mon corps d'une manière totalement nouvelle pour moi. Ses doigts n'ont toujours pas quitté mon visage, ils sont placés sur ma joue. Je n'émets pas un seul son. Seul nos souffles et le battement de nos cœurs rompent le silence apaisant qui s'est installé. De son pouce il commence à faire de petits cercles. Il ne dit rien, ne cherche pas à savoir. Il est juste là. Je tremble contre lui. Après plusieurs minutes, sa langue se délie et il chuchote :
-Temps mort Lana. Temps mort.
Mon corps n'attendait que ça. Je ne sais pas ce qui me prends mais d'un coup, je plonge contre lui et entoure son cou de mes bras et je pleure. Mes larmes commencent doucement à couler jusqu'à devenir un flot discontinu d'eau salée.
Il ne semble pas étonné car encercle rapidement ses bras autour de moi. Mes pleurs ne sont que les seuls bruits dans la pièce. Il m'encercle, comme une bulle.
C'est alors dans ses bras que je lâche prise. Je pleure. Mon chagrin me submerge et cette fois je n'ai pas peur. Je ne suis pas seule.
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L'amour sous le radar
RomanceL'amour ? Je n'y crois pas. C'est une pure blague. Moi Lana Denvers, j'ai peut-être eu un petit ami mais lorsque celui ci m'a quitté le jour de mon départ en mission sous-marine, j'ai totalement abandonné l'idée. En tant que Vice-Amirale dans la Mar...