Vindicta [ En cours.]

Chapitre 14

Evika.

Le silence pesant continue de régner alors que nous roulons à travers les rues désertes. Les quartiers riches défilent autour de nous, impeccables, lisses, bien trop calmes. Rien à voir avec le chaos du motel où on a failli y rester. Ici, tout semble tranquille, comme si le monde tournait à un rythme différent. Pourtant, derrière ces façades de luxe, des choses bien plus sombres se trament. Et ce soir, on est là pour y mettre un terme, en partie du moins.

Je jette un coup d'œil à Aaron. Son visage est fermé, concentré. La tension entre nous est toujours là, bien présente, mais on s'efforce de l'ignorer. C'est mieux comme ça. On a une mission à finir, et c'est tout ce qui compte. Les émotions, la frustration, ce qui a failli se passer entre nous... tout ça devra attendre.

L'homme qu'on traque n'est pas un simple intermédiaire. Il est impliqué dans un trafic d'êtres humains, une pourriture qui profite de sa position dans les hautes sphères pour orchestrer des réseaux de vente et d'exploitation, caché derrière son masque de respectabilité alors qu'en réalité il vend des enfants à des pervers qui veulent assouvir des besoins malsains. C'est pour ça que je me dois de le faire tomber ce soir.

C'est pour ça que je me bats, que je sacrifie ma vie et mon bonheur.

La voiture s'arrête doucement devant un immeuble moderne, presque indécent de propreté. Une jolie métaphore de la vie quand on y réfléchit, ce sont souvent les plus belles apparences qui cachent les actes les plus monstrueux. Aaron coupe le moteur sans un mot. L'appartement se trouve au premier étage, il se croit à l'abri de tout. Il pense être intouchable. Ce genre de personnes, avec leur argent, leurs contacts, ils se croient au-dessus des lois. Ce soir, on va lui montrer que même dans ses tours d'ivoire, il n'est pas invincible.

Aaron sort de la voiture sans un bruit, je le suis immédiatement. Le vent est léger, mais une froideur me parcourt tout de même l'échine. Pas à cause du climat, mais parce que je sais ce qu'on s'apprête à faire.

Nous sommes garés en bas de l'immeuble, un de ces bâtiments flambant neufs, tout en verre et en béton poli. Chaque fenêtre, chaque angle de cet endroit respire la richesse et la sécurité, une façade parfaite pour masquer l'enfer qu'il contient. J'observe en silence la lumière vacillante au dernier étage. C'est là qu'il est, notre cible, seul, du moins pour l'instant.

— Il est seul maintenant, dis-je en vérifiant une dernière fois les mouvements à travers les jumelles.

À côté de moi, Aaron est concentré, mais il me jette un regard rapide avant de replonger dans son silence. C'est moi qui mène cette opération. C'est moi qui décide du moment où tout commence.

— On bouge, je siffle en posant les jumelles, mon regard fixé sur l'immeuble. Il est temps.

Aaron ne dit rien, mais me suit sans hésitation. Je sors de la voiture, l'air frais de la nuit caressant mon visage alors que nous nous dirigeons vers la porte de service. Nous savons tous les deux que ce qu'on fait ici dépasse de loin une simple mission. C'est une question de justice. Et d'une certaine façon, de vengeance.