Chapitre 38

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          La tente de fortune s'élevait entre deux arbres, au milieu de la forêt, et on voyait briller une lumière diffuse à travers la toile grise. Leur arrivée ne dérangea pas une chouette qui se contenta de hululer sa désapprobation. Aramis descendit de Satan et aida Skye à en faire autant pendant que Valériane glissait du cheval d'Athos sans son aide, comme elle y était montée. Gabriel eut plus de mal à descendre de celui de d'Artagnan. À sa décharge, le médecin n'avait jamais côtoyé un cheval de sa vie. Un cinquième animal était chargé des affaires que Valériane et Gabriel avaient récupérées dans la petite maison abandonnée qu'ils occupaient depuis près d'une semaine.

Deux hommes à la carrure impressionnante sortirent de la tente.

— Horst ! lança Valériane.

Les deux hommes s'immobilisèrent et Valériane s'approcha d'eux, emmenant le cheval de bât avec elle. Ils commencèrent immédiatement à le décharger et à mettre les différents coffres à l'abri sous la tente. La capitaine revint vers Skye.

— Il vous reste quelques minutes, sourit-elle gentiment. Le temps qu'ils transfèrent notre matériel de l'autre côté.

Quelques minutes pour un adieu. De ces adieux sur lesquels on ne revient pas, définitif. Inexorable.

— Merci, répondit Skye d'une voix éteinte.

Elle se détourna de la tente et s'approcha de Satan, glissa une main glacée malgré la douceur de la nuit sous sa crinière. Le cheval souffla et elle appuya son front contre sa joue.

— Tu vas me manquer, mon beau, chuchota-t-elle en le caressant doucement.

Gabriel fit un signe de tête à Valériane.

— Laissons-la, souffla-t-il.

Valériane acquiesça silencieusement avant de se tourner vers les mousquetaires.

— Messieurs, ce fut un réel honneur de vous rencontrer. Merci pour votre aide...

— Ce fut un honneur pour nous aussi, madame, répondit Athos.

Elle lui sourit, puis s'éloigna vers la tente. Gabriel s'apprêtait à la suivre quand Aramis lui barra le passage. Il jeta un regard vers Skye qui leur tournait le dos et glissa un objet dans la main du médecin.

— Donnez-lui cela, quand vous serez... Quand elle ne pourra plus me le rendre.

Gabriel regarda l'objet avant de relever les yeux sur le mousquetaire.

— Vous l'aimez, n'est-ce pas ?

Aramis plissa les yeux.

— Dans quelques minutes, pour elle, je serais mort, alors ça n'a plus d'importance, répondit-il.

Gabriel scruta l'homme devant lui, les sourcils froncés. Le père de l'enfant que Skye portait, et il ne le saurait jamais. Il baissa les yeux.

— Je peux vous poser une question ? demanda Aramis.

— Je vous en prie.

— Pourquoi l'appelez-vous Hélène ?

La question fit sourire le médecin.

— J'ai toujours trouvé que ce prénom était trop doux pour une femme comme elle. Ça m'amusait, et ça l'exaspérait...

Aramis sourit à son tour et son regard pétilla un bref instant.

— Il ne faut pas grand-chose pour l'exaspérer, murmura-t-il. Elle est...

Il se tourna vers Skye.

— Unique, termina-t-il dans un souffle.

Quatre Siècles et une Croix -I- La Croix et l'Épée [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant