4. L'appel du vide

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𝗧𝗪 : 𝗚𝗼𝗿𝗲

"Fait amusant avec les noctambules ; leur côté sentimental et le lien qu'ils entretiennent avec leurs victimes fait parfois qu'ils se retrouvent malgré eux esclaves de leur propre morsure"

𝕵𝖔𝖚𝖗𝖓𝖆𝖑 𝖉𝖊 𝕵𝖆𝖈𝖊 𝕳𝖆𝖙𝖔𝖗𝖞𝖘

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Il allait mourir.

C'était la seule pensée à peu près cohérente qui parvenait à encore faire surface dans l'esprit de Charly. La joue sur le tapis moelleux d'un appartement qu'il ne connaissait pas, tremblant, les cheveux collant à sa nuque à cause du sang qui avait trop coulé, les yeux gonflés de larmes. C'était là qu'il allait mourir, lui, Charly Eckermann, n'ayant même pas réussi l'exploit de faire la moindre découverte d'importance dans sa courte vie d'archéologue.

Il s'était fait piéger par des malades cannibales et il allait mourir.

Un bruit étouffé se fit entendre à côté de lui. Entrouvrant les yeux, il aperçut une paire de baskets blanches des plus banales, si l'on oubliait les quelques gouttes de sang sur la languette. C'était Lust, celui-là même qui l'avait mordu le premier.

Son surnom semblait finalement justifié. Venait-il finir le travail ? Allait-il le dépecer pour utiliser sa peau comme un manteau - et cette perspective ne semblait plus si étrange au vu du déroulé de la soirée.

Charly serra les dents, prêt à résister, du moins un petit peu, histoire de ne pas être la victime de cette histoire. Si les personnes qui retrouvaient son corps apercevaient des traces de lutte, peut-être que sa mort ne serait pas vaine.

Mais rien ne vint, pas même une tentative de coup ; en un mouvement souple, presque paresseux, Lust se pencha sur son corps endolori, marmonnant entre ses lèvres :

— Et dire que c'était censé être rapide...

Sa main glacée parcourut un instant le corps du jeune archéologue, provoquant un frisson de dégoût. Le visage maculé de sang, de son fichu sang, Lust n'était plus si beau, ni même un iota attirant. Il était monstrueux, ses vêtements au ton crème lui donnant une apparence plus fantomatique que réellement apaisante. Mais que fichait-il encore ici ? Un meurtrier n'était-il pas censé fuir après ses crimes ?

Malgré sa vision brouillée causée par la perte de ses lunettes, Charly perçut l'éclat d'une lame d'argent dans son champ de vision.

Ah ! Son heure avait donc bel et bien sonné. Le temps était venu de quitter la vie à laquelle il avait à peine pu goûter. "Piégé", c'est ce qu'on dirait dans les reportages true crime que l'on ferait à propos de sa mort. Il s'était fait putain de piéger et il allait crever ici, à même le sol, égorgé comme un pourceau de l'année. On retrouverait son corps froid dans quelques heures s'il avait de la chance, baignant dans son sang, la gueule ouverte ; face à un couteau, il n'avait aucune chance de pouvoir lutter.

Seulement, alors qu'il attendait son jugement, les yeux grands ouverts pour voir la mort en face, elle ne vint pas. Du moins pas dans la forme attendue. Mais ça n'était pas comme si tout se déroulait de manière vraiment conventionnelle ce soir.

Un poignet prit l'entièreté de son champ de vision. Pâle, deux coupures nettes y avaient été inscrites, laissant un sang presque noir y perler ; Lust venait de se couper. Avec un geste autoritaire, il saisit Charly par les cheveux, plaquant ses lèvres contre la plaie.

Un haut le cœur souleva la poitrine du jeune archéologue en sentant un liquide au goût métallique éclabousser son palais. Il recula, cherchant à échapper à l'étreinte de l'homme qui gronda, raffermissant sa prise pour coller encore davantage son poignet contre sa bouche.

Le Croc de Sobek (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant