Chapitre 8

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La séance se termina dans un grand bruissement. À peine le notaire ramassa t il ses affaires et se dirigea vers la sortie, que Lilith lui courait derrière suivi de Marthe. Les yeux cernés et rouges comme ceux d'un toxicomane, un visage humide et empourpré, elle courait désemparement en poussant les personnes sur son passage. Elle le rattrapa par le bras dans les couloirs:

-" M. Miller! Ces testaments sont insensés! Qu'est ce que cela signifie? Je n'ai jamais entendu de tel. Je n'y crois pas M.Miller, je n'y crois pas! C'est absurde! Mes parents ne m'auront jamais fais une telle chose!"

-" Et pourtant c'était bien la volonté de vos parents. Si vous avez bien suivi, le testament de votre père était identique à celui de votre mère sur le passage où ils parlaient de votre sort. C'était donc une volonté à eux deux. Je sais que c'est dur à recevoir pour vous, j'étais aussi très étonné de mon côté, mais puisqu'ils insistaient sur ce fait, je n'ai rien put faire. Si vous ne me croyez pas vous pouvez aller voir les deux témoins et vérifier."

Lilith allait exploser, son cœur se serrait et se déchirait à la fois. Elle perdit l'équilibre et tomba à genoux sur le dallage froid, mais cela lui importait peu. M. Aubin posa un genou à terre pour être à la même hauteur que Lilith et posa une main sur son épaule:

-" Écoutez mademoiselle, je n'ignore pas que votre cas est très difficile mais soyez forte. Vos parents attendent sûrement quelque chose venant de vous, alors soyez prête et courageuse."

Il l'aida à se relever. Lilith regardait son visage, ses yeux remplis d'empathie à travers ses lunettes à reflet bleue. M. Aubin Miller les salua et continua son chemin. Marthe qui avait assisté à la scène, la prise dans ses bras.

- "Rentrons mademoiselle, le chauffeur est dehors, il nous attend."
Dans la voiture, le silence s'était installé. Seul le son du freinage, les craquements de la boîte de vitesse et l'ongle de Lilith qui tapotait la vitre se faisaient entendre.

-" Mademoiselle, voulez vous que je demande aux cuisiniers de préparer quelque chose spécialement pour vous? Que voulez vous manger?"
-" Mmh, non je ne veux rien, je...je n'en ai pas très envie."

Midi avait sonné mais Lilith n' évoquait pas du tout la faim. Peut être était ce la tristesse et la déception qui escamotaient ce besoin nutritionnel ? Elle n'avait pas mangé et est restée dans sa chambre toute l'après-midi. Un peu plus tard, elle marchait dehors, sans doute histoire d'oublier ce qu'elle a vécu et surtout entendu aujourd'hui. Marthe se mettait beaucoup en peine pour elle. Le soir elle mangeait peu, à peine dix cuillères de sa soupe.

-" Mademoiselle, voudriez vous que l'on en parle ? Je pourrais peut-être vous aider, qui sait?"
-" Que vais je devenir Marthe, je suis perdu. Mes jours ici à vos côtés sont comptés sur le bout des doigts, dit Lilith les yeux remplis de larme et de détresse, ma tante débarquera du jour au lendemain et, vous savez tous comment elle est, que vais je faire, oh quel malheur!"
-"Peut être que le notaire avait raison, attendent- ils quelque chose de vous? Vos parents vous aimaient énormément Mademoiselle, jamais ils ne voudraient votre malheur.

Rick et Victoria ont toujours choyé leur fille unique. Ils étaient doux et généreux avec elle. Des professeurs distingués et sortant des grandes écoles lui ont accompagné, et ses parents s'en était toujours bien assuré pour chaque année scolaire. Elle souffrait quelque fois de leur absence mais si on fermait les yeux sur ce point là, elle ne manquait de rien.

-" Et bien, si cela vous intéresse, j'ai une cousine qui vit dans un couvent et peut être que vous.."
Lilith la coupa net.
-"Vous plaisantez sûrement Marthe, un couvent!? Je vous ai toujours considéré comme ma deuxième mère mais là je ne vous comprends pas."
-" Excusez moi mais je pensais que cela vous aiderai..."
-" Saisissez ma situation enfin, c'est l'argent qu'il me faut, pas la béatification."

Marthe se tut, sa petite était beaucoup trop contrarié pour parler de manière aussi blessante. Elle lui souhaita une bonne soirée et se dirigea vers ses appartements.

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