DARRELL

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Le crépuscule commençant à tomber, les trois voyageurs décidèrent d'un commun accord de s'arrêter pour la nuit et de reprendre leur périple le lendemain. Débarquer dans une ville inconnue en pleine pénombre était une idée qu'on ne pouvait qualifier que de très mauvaise. Darrell et Marv instaurèrent des tours de garde, laissant expressément Leonor de côté. Leur confiance envers la jeune femme n'était pas encore totalement acquise.

Ils grignotèrent rapidement les quelques provisions que contenaient le sac de leur captive. Le repas se déroula sans un bruit, tous trois trop obsédés par la journée du lendemain pour décrocher un mot. Enfin, c'était ce que pensait Darrell. Le silence de Leonor était peut-être seulement dû à la rancœur qu'elle éprouvait pour les deux hommes.

Très vite, les jeunes gens se couchèrent, essayant tant bien que mal de trouver une position confortable malgré les irrégularités du terrain. Darrell prit le premier tour de garde. Adossé contre un arbre, il regardait le ciel se teinter délicatement de sa palette de couleurs crépusculaires. Au-dessus de lui, protectrice, la lune était large, pleine et portait encore un reste de rouge, très léger. Le jeune homme ne pouvait détacher les yeux de sa couleur sanguine.

A la frontière entre nature et civilisation, ce spectacle céleste semblait être coupé du temps. Après la chaleur insoutenable de la journée, la tiédeur du soir était la bienvenue. Une brise, légère, venait caresser la peau moite du jeune homme et faisait bouger, de temps à autre, les cheveux qui encadraient son visage. Darrell aurait aimé que cet instant s'éternise. A cette heure de la nuit, tout semblait si paisible, si... normal. Qui aurait crût que, quelques semaines plus tôt, le monde était en proie à la propagation d'un étrange virus qui allait transformer l'humanité ?

Après avoir réveillé son frère pour qu'il prenne la relève, Darrell s'endormit aussitôt, l'esprit serein. La journée du lendemain allait être éprouvante, il le savait. Pourtant, à la lisière de la forêt, il se sentait en sécurité. La nature l'avait toujours protégé.

Cette nuit-là, pour la première fois depuis des semaines, Darrell dormit d'un sommeil paisible.

Les premières lueurs du jour éveillèrent doucement les trois voyageurs. En silence, ils préparèrent leurs affaires, burent quelques gouttes de l'eau encore contenue dans leurs gourdes et se remirent en marche. Ce n'est qu'en fin de matinée qu'ils arrivèrent près des premiers bâtiments de la ville. Un panneau, placé sur le côté de la route, indiquait son nom. Il était cabossé et rayé de toutes parts. Seule subsistait la première lettre du nom : un V.

Darrell fouilla dans son esprit, mais il lui fut impossible de retrouver de quelle ville il s'agissait. Il n'était même pas sûr du coin dans lequel ils se trouvaient. Son frère et lui ne s'étaient pas encombrés de cartes routières pour leur voyage. Il jeta un regard à Marv, qui haussa les épaules. Ce dernier n'était pas plus renseigné que son jeune frère.

« On fait quoi, maintenant ? », demanda Leonor, rompant le silence qui s'était installé dans le groupe depuis le matin.

« On fait un détour pour éviter d'rentrer dans la ville. », lança Marv, sur un ton sarcastique.

Darrell ferma les yeux. Il se doutait de ce qui allait suivre. Il y eut quelques secondes de silence.

« Tu crois quoi, catin ?, s'énerva l'aîné. On explore ce bled pour trouver des trucs utiles ! »

Darrell essaya de calmer le jeu.

« Il nous faut de la nourriture, en priorité, expliqua-t-il sur un ton calme en se tournant vers la jeune femme. Des boites de conserves et des vivres qu'on puisse garder une semaine ou deux, si possible. Des armes, ça peut toujours servir. Pour tout ce qui est confort, on verra après.

KhaosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant