soleil ardent [giyûxoc]

13 - coupable

Liang se réveilla de nouveau dans les draps qui sentaient la glycine. Cette odeur fruitée était présente également. Elle ne voulait pas ouvrir les yeux, car elle serait obligée de s'expliquer, et elle n'en avait aucune envie.
Pourquoi était-elle au Domaine des Papillons ? Ils étaient en train de combattre quand elle avait perdu connaissance. La dernière chose qu'elle avait vu était le visage de Giyû en train de se décomposer en réalisant qui elle était.
Comment lui expliquer ? Quelle excuse était assez valable pour expliquer la lâcheté dont elle a fait preuve ?

Après une minute de réflexion, elle se dit finalement qu'elle n'y échappera pas et qu'il était inutile de se cacher encore plus longtemps. Elle avait du faire énormément souffrir Giyû et ça, elle ne se le pardonnerait jamais.

Elle ouvrit un œil puis le deuxième avant de se redresser et de constater que le Pilier était assoupi sur une chaise, à côté de son sommier. Elle l'observa quelques secondes et le détailla.
Il était beau, sublime même. Son visage paraissait à la lumière, surréaliste. Sa peau avait l'air douce comme une pêche et ses cheveux en bataille lui donnait un air indomptable et sauvage. Il sentait le frais et l'hiver ce qui concordait avec son comportement.
Sa respiration était lente et tranquille. Ses petites cernes témoignaient du manque de sommeil qu'il éprouvait.

Liang se rendit compte qu'elle n'avait pas de masque, Shinobu avait dû voir son visage aussi. Cela la soulageait un peu, elle n'aurait plus à se cacher car malgré ce qu'on pourrait croire, il était assez compliqué de garder son identité secrète. Pendant cinq ans, Liang avait porté ce masque et le fait de l'enlever subitement était à la fois décontractant et très étrange.
La noiraude passa une main dans ses cheveux, ils étaient tout emmêlés. Sa peau était sèche et ses lèvres encore plus. Elle sortit tout doucement du lit et remarqua que toutes ses affaires étaient disposées au pied de celui-ci.

Giyû aurait donc fait tout ce chemin inverse avec ses bagages, Liang sur le dos et les affaires de Liang ? Impossible. Elle n'en revenait pas.

La noiraude chercha dans ses affaires et prit sa brosse pour démêler ses cheveux. Elle retira une masse importante de cheveux morts mais s'en réjouit, ils étaient doux maintenant.
Elle se passa un coup de baume hydratant pour les lèvres avant de sortir de son lit.
Elle portait la même tenue que lorsque le combat avait eu lieu, elle se sentait un peu sale. Alors elle prit de quoi se changer - des sous-vêtements, un pantalon en large toile noire et un col roulé moulant noir lui aussi - ainsi que de la crème hydratante pour le corps et partit en direction des bains.

En sortant de sa chambre, elle prit soin de ne pas claquer la porte trop fort et croisa Shinobu. Celle-ci paraissait surprise et se précipita vers la noiraude.

-     Liang, tu es réveillée, dit-elle soulagée. Comment tu te sens ? s'enquit la brune.

Liang tiqua légèrement à l'entente de son prénom mais ne releva pas, elle répondit :

-     Je vais bien, merci Kochou, dit la plus âgée posément. Quel jour sommes-nous ?

-     Samedi, tu as dormi un jour environ, affirma Shinobu.

-      Qui m'a ramenée ici ? demanda la noiraude dans l'espoir d'éclaircir les zones d'ombre auxquelles elle faisait face.

-     Giyû t'a portée jusqu'ici et un pourfendeur s'est porté volontaire pour transporter vos affaires, expliqua le Pilier. Tomioka ne s'est pas arrêté une seule fois après son combat, il voulait vite te ramener ici.

-     D'accord, et euh..., elle marqua une légère pause avant de reprendre, est-ce qu'il avait l'air énervé ? s'enquit timidement Liang.

-     Non, il avait l'air plutôt inquiet et troublé. Ses discours n'étaient pas cohérents, il avait du mal à s'exprimer, raconta la brune. C'était la première fois que je le voyais perdre son sang froid de cette manière, avoua-t-elle.

-     Je vois, merci Kochou, dit simplement la noiraude.

Un ange passa et Shinobu continua en souriant :

-     Je ne t'imaginais pas aussi jolie sous ton masque, finit-elle par avouer.

Liang sentait ses joues chauffer légèrement. Elle se contenta de sourire à Shinobu avant de reprendre plus sérieuse :

-     Qui d'autre a vu mon visage à part toi ?

-     Eh bien, presque tous les Piliers. Ils sont presque tous ici pour se reposer, répondit-elle calmement. Uniquement Muichiro et Gyomei ne l'ont pas vu, ils ne sont pas là.

-     ...

-     Cela te dérange qu'ils l'aient vu ? s'enquit rapidement le Pilier du Papillon voyant que son interlocutrice ne réagissait pas.

-     Non, aucun problème, conclut Liang avec un léger sourire.

-     D'ailleurs maintenant qu'on connaît ton visage et ton prénom, pourquoi te cachais-tu ? demanda la brune, curieuse. Tomioka avait l'air de savoir, puisqu'il connaissait ton vrai nom, mais il n'a rien dit, il est directement parti dans ta chambre et n'est pas sorti depuis, raconta-t-elle. Il voulait attendre ton avis.

Liang sentit son cœur se serrer doucement. Giyû avait beaucoup fait pour elle jusqu'à s'endormir sur une chaise en bois alors qu'il avait marché toute la nuit pour ramener Liang au Domaine. Elle se sentait aussitôt coupable.

Liang hésita un peu avant de se lancer :

-     Disons que je connaissais Tomioka, il y a longtemps, commença Liang. Puis j'ai perdu sa trace et j'ai fini par le retrouver mais il me pensait sûrement morte. Je n'ai pas osé me montrer alors je faisais tout pour avoir quand même un œil sur lui et quand j'ai rencontré Kagaya et qu'il m'a proposé d'être son "garde", j'ai tout de suite saisi l'opportunité, raconta la noiraude avec une pointe d'amertume. Je voulais tout révéler à Giyû mais finalement, mon masque a eu raison de moi. Je suis tellement lâche, pas une seule fois il n'a été au courant en cinq ans que je travaillais pour Kagaya, confit-elle les lèvres pincées.

Shinobu n'avait rien dit, se contentant de prendre dans ses bras Liang.
Le Pilier continua prudemment :

-     Allons au bain, ça te détendra, conseilla la brune. Tu sais, je suis sûre qu'il ne t'en veut pas. Tu aurais vu l'état dans lequel il était, jamais une once de colère n'a traversé son visage, affirma-t-elle.

Liang ne répondit rien et se contenta d'adresser un fin sourire à Shinobu. Elle lui était tellement reconnaissante. Cette femme trouvait toujours les bons mots, au bon moment.
Les deux femmes se dirigèrent dans un premier temps dans la chambre de Shinobu pour qu'elle puisse prendre ses affaires de rechange et toutes les deux allèrent au bain.

Là-bas, Liang confia quelques détails de plus à Shinobu avant qu'elles ne discutent de sujets plus légers.
Après être restées plus d'une vingtaine de minutes, Liang sortit, désormais propre et s'habilla de ses vêtements de rechange. Shinobu l'imita.

Elles partirent toutes le deux des bains avant de se séparer à l'entrée de l'infirmerie où Shinobu devait vérifier l'état des pourfendeurs qu'elle soignait.

Liang retenait sa respiration devant la porte de sa chambre, priant pour que Giyû dorme encore.
Elle entra doucement et jeta un coup d'œil à l'intérieur. Il était réveillé et l'attendait.

—————————————————