CHAPITRE 11 - Casser la tige

26 8 2
                                    

Tialvo

Lorsqu'il réussit enfin à sortir de chez lui, Tialvo retint un soupir de frustration. Il pensait que Elhonro ne le laisserait jamais partir, alors que poser un millier de questions n'était d'habitude pas son genre ! Plutôt le style de Pazina...

Pourtant, son beau-frère l'avait arrêté alors qu'il s'apprêtait à aller « en ville » et décidé qu'il s'agissait du meilleur moment pour s'enquérir de l'état de sa vie, de ses activités et de ses relations.

— Je m'intéresse juste à ta vie, sonhadrio, s'était justifié Elhonro lorsqu'il avait manifesté un signe d'agacement. C'est aussi un peu mon rôle de veiller sur toi...

Pendant une seconde glaçante, Tialvo avait craint que Pazina ne lui ait confié la discussion qu'ils avaient eu en son absence. Mais il se rassura vite en se disant que Elhonro n'avait jamais été un maître de la subtilité, et qu'il aurait sans doute abordé franchement le sujet s'il avait voulu lui en parler.

Enfin, son beau-frère avait fini par le laisser partir, non sans plaisanter sur son empressement à vouloir s'échapper dans un rire moqueur. Tialvo se rendit compte alors qu'il s'éloignait de chez lui qu'Elhonro ne l'avait gratifié d'aucun clin d'œil, contrairement à son habitude. Mais il chassa vite son beau-frère de son esprit pour laisser la place à Skuma, qu'il n'avait pas vu depuis quatre jours.

Quatre jours. Une éternité.

Les jours avaient beau s'écouler, il ne put retenir le frisson qui étourdit son cœur et le sourire qui monta à ses lèvres lorsque Skuma émergea des feuilles du saule pleureur. Elle souffla légèrement pour dégager une mèche qui lui tombait devant les yeux, puis se tourna vers lui avec un sourire en coin. Des flammes riaient dans ses yeux.

— Oui, cette attente était interminable, et non, je n'ai pas assassiné l'idiot qui a rajouté une conférence à la dernière minute, murmura-t-elle en se jetant dans ses bras.

— Je n'ai jamais suggéré une chose pareille, sourit Tialvo contre sa tempe.

— Menteur...

Alors qu'il parcourait des lèvres le cou, le visage, les mains de Skuma, qu'il écoutait chacun de ses soupirs et son prénom murmuré, Tialvo oublia tout. Tandis qu'ils s'affalaient dans l'herbe, elle laissait courir ses doigts sur sa peau, son regard brûlait son cœur, elle riait, il la taquinait, elle l'embrassait pour le faire taire. Ce qui marchait toujours très bien.

Soudain, Skuma s'écarta brusquement et tourna la tête vers le saule. Elle laissa glisser ses mains contre le torse de Tialvo et fronça les sourcils.

— Tu n'as pas entendu quelque chose ?

Tialvo tendit l'oreille, mais à part le sifflement des oiseaux, le ronronnement de la rivière et le bruissement des feuilles, aucun son ne troubla son ouïe. Il haussa les épaules et secoua la tête.

— J'en connais une qui a besoin de se détendre, susurra-t-il en caressant la courbe de sa joue.

Il déposa ses lèvres dans le creux de son cou, avant de remonter le long de son visage. Un délicieux frisson le parcourut tandis qu'il la sentait frémir sous ses baisers. Elle passa lentement une main dans ses cheveux.

— Un jour, je jure que tu auras ma peau, souffla-t-elle. Min liebek, ajouta-t-elle dans un sourire.

Comme chaque fois qu'elle laissait échapper un mot noxain, le cœur de Tialvo chavira. Il la serra plus près de lui, l'âme sur le point de s'envoler.

Âme qui retomba sec lorsqu'une voix glaciale trancha la chaleur de l'air.

— Alors ? Je vous avais dit qu'ils seraient là !

Le Champ de lys - PRÉQUELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant