CHAPITRE 6 - Chercher la lumière

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Tialvo

Je dois être en train de rêver. C'était la seule explication : un tel miracle ne pouvait pas se produire dans la vraie vie. Une telle fée ne pouvait pas exister dans la vraie vie. Un tel baiser ne pouvait pas être aussi merveilleux dans la vraie vie.

Soudain, il se sentit violemment repoussé en arrière et manqua de trébucher. En une seconde, il intégra de nouveau les sons et les couleurs. La réalité afflua de tous les côtés, agressant sa vue et son ouïe.

— Ôte tes sales pattes de son visage !

En une seconde, il reconnut le jeune Noxain que défiait Elhonro quelques minutes plus tôt. Et il n'avait pas l'air plus amène de près... Tous ses traits étaient figés en une expression glaciale, ses sourcils froncés accentuaient la rage qui couvait dans ses yeux bruns. Il avait la même peau blanche, les mêmes cheveux noirs que la fée que Tialvo embrassait quelques secondes plus tôt. Mais alors que les yeux noirs de cette dernière  flamboyaient et embrasaient son cœur, ceux du Noxain étaient froids comme la grêle.

— Non mais ça va pas ? Kunnias, qu'est-ce qui te prend ?

La jeune fée, que le dénommé Kunnias avait placé derrière lui, était revenue à son niveau et le fusillait du regard.

— C'est toi qui demande ça ? C'est plutôt à moi de te poser la question ! s'offusqua-t-il en se tournant brusquement vers elle. Tu te rends compte de ce que tu viens de faire ? C'est un Hémérien ! Tu sais bien qu'il n'y a qu'une chose qui l'intéresse chez une Noxaine !

— N'importe quoi, c'est complètement faux ! protesta Tialvo en s'avançant d'un pas. C'est complètement faux, répéta-t-il lorsqu'il croisa les yeux noirs de la jeune fée.

Il se fichait de ce que pouvait penser l'autre, mais il ne pouvait pas le laisser le calomnier auprès d'elle... Il ne put la regarder que quelques secondes avant que Kunnias n'occupe de nouveau tout son champ de vision. Il faisait environ sa taille et devait être un peu plus jeune que lui, mais ça ne l'empêchait pas de paraître menaçant. S'il n'avait pas été obnubilé par la jeune fée, Tialvo aurait sans doute été effrayé.

Kunnias le fixa droit dans les yeux, les traits crispés. Autour d'eux, Noxains et Hémériens commençaient à former un petit cercle, alertés par les éclats de voix.

— Si je te reprends à poser le moindre doigt sur elle...

— Qu'est-ce que tu feras ? Tu lui jetteras des fleurs à la figure ?

Tialvo se retourna et découvrit Elhonro et Pazina derrière lui. Sa sœur le contempla d'un air soucieux et vint se poster à sa gauche dans une attitude protectrice. Elhonro se contentait de toiser Kunnias d'un air moqueur. Mais Tialvo remarqua sa mâchoire serrée et son regard qui voleta de Kunnias à la jeune Noxaine derrière lui.

— Ne te mêle pas de ça, ce ne sont pas tes affaires, fremrosk ! cracha l'autre.

Des hoquets de stupeur parcoururent l'assistance. Tialvo serra les poings face à l'insulte. Il ne connaissait pas un mot de noxain, sauf celui-ci. Un doux mélange entre « étranger » et « ordure ». Elhonro ne laissa rien transparaître sur son visage, mais ses yeux se plissèrent et prirent un éclat belliqueux.

— Tu es en train de menacer mon beau-frère, alors je pense au contraire que ce sont totalement mes affaires. Et ce ne sont pas tes airs de petite terreur qui vont m'effrayer, bandiro !

Nouveaux hoquets, de l'autre côté du cercle. Tialvo sentit Pazina se crisper à côté de lui. Face aux yeux glacés de Kunnias et aux sourcils froncés des quelques Noxains derrière lui, lui-même ne se sentait plus du tout à l'aise. Il se demanda comment la situation avait pu déraper à ce point...

Le Champ de lys - PRÉQUELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant