𝚇𝙸 | 𝙲𝚞𝚙𝚒𝚍𝚎

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"Ce n'est pas parce que tu aimes l'océan
que tu dois t'y noyer."


   Tous les regards sont rivés sur Mme Keating, notre professeur de littérature, qui nous a gardés après la sonnerie pour nous annoncer une grande nouvelle. Connaissant sa réputation, nous ne nous attendons pas vraiment à grand-chose ; elle a la tendance à se passionner pour les moindres petites choses.

   Ma jambe tremble nerveusement, et le bruit constant de mon pied frappant le carrelage attire les regards désapprobateurs de mes camarades de classe. Je m'excuse encore et encore, chaque fois qu'un d'eux souffle en se tournant vers moi. Je cache mon visage dans mes avant-bras, envahie par une profonde honte à cause du dérangement que je leur cause.

   Je relève la tête uniquement lorsque la voix joyeuse de la prof résonne dans la salle. Mes sourcils se froncent en la voyant tenir une pile de papiers entre ses mains. La classe devient soudainement plus attentive, les murmures cessent et les chaises grincent alors que chacun se redresse pour mieux voir. La prof pose la pile sur le bureau et se tourne vers nous avec un sourire mystérieux. Les yeux de certains élèves s'illuminent tandis que d'autres murmurent entre eux, curieux de savoir ce qui nous attend.

   – Nous allons réaliser un voyage scolaire à but culturel et littéraire ! S'exclame-t-elle, bien que l'avis général de la classe soit plutôt réservé.

   Ma jambe cesse brusquement de trembler, et la nausée qui me torturait le ventre depuis que je suis au lycée diminue légèrement alors que je me rends compte de ce que ça signifie. Un voyage scolaire, loin de cette maison devenue étrangère, loin de l'ambiance tendue et de la froideur des disputes incessantes. Mon cœur bat plus vite, mais cette fois, c'est de soulagement.

    Je lève les yeux vers la professeure, qui continue d'expliquer les détails du voyage avec enthousiasme. Chaque mot résonne en moi comme une promesse de liberté. Pendant un instant, tout semble plus clair : je vais enfin avoir un répit, un espace pour respirer, loin de cette atmosphère oppressante.

   – Nous allons partir à New York pendant.. 1 mois ! Elle termine sa phrase en sautillant, les bras levés vers le ciel. Faites bien attention, les papiers doivent être rendus dans maximum deux semaines !

   Les autres élèves autour de moi discutent déjà de la destination, des activités, mais moi, je me laisse envahir par une vague d'espoir. J'essaie de me concentrer sur les aspects pratiques du voyage, cherchant à chasser les dernières traces d'inquiétude. La perspective de cette évasion m'apporte un réconfort inattendu, un sentiment de légèreté qui m'avait semblé inaccessible jusque-là.

  1 mois à New York.

   Les discussions autour de moi continuent d'évoluer, mêlant enthousiasme et prévisions minutieuses. Mais je reste en retrait, écoutant les voix sans vraiment les entendre, absorbé par mon propre rêve.

   La prof parcourt les tables, arborant un large sourire, pour distribuer les formulaires d'inscription. Mon enthousiasme explose lorsque je commence à feuilleter les différentes activités proposées, chaque page me plongeant davantage dans l'excitation de ce qui nous attend.

   – Ton sourire m'avait manqué, Cupide.

   Je lève les yeux vers Mme Keating, qui incarne parfaitement l'expression "avoir des étoiles dans les yeux". Je lui sourit brièvement avant qu'elle ne continue à distribuer les papiers au reste de la classe.

   Les discussions entre les élèves de ma classe ne cessent pas alors que la prof nous libère enfin de la salle, nous souhaitant une bonne journée. Je suis tellement heureuse de pouvoir enfin avoir une pause que je ne me rends pas tout de suite compte qu'il n'y a plus personne dans la classe, trop occupée à regarder les papiers dans mes mains. D'ailleurs, je ne me rends compte que lorsque je relève le regard vers la classe et que je vois que toutes les tables sont vides.

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