𝚇𝙸𝚅 | 𝙴𝚕𝚕𝚒𝚘𝚝

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"C'est terrible d'aimer quelque chose
que la mort peut toucher."





5 Octobre.





   Je franchis le seuil de la salle de classe, les feuilles d'inscription serrées dans ma main. L'effervescence du voyage scolaire résonne encore dans mes oreilles, une aventure dont tout le monde parle depuis des semaines. Pourtant, en ce moment, mon cœur n'est pas aussi léger que celui de mes camarades.

   Je m'avance vers le bureau de Mme Martin, ma prof principale. Elle est plongée dans ses papiers, une expression concentrée sur son visage. Je dépose discrètement mes feuilles sur son bureau, espérant passer inaperçu et quitter la salle sans attirer l'attention. Mais alors que je me dirige vers la porte, sa voix s'élève.

   – Je n'étais pas sûre que tu viendrais.

   Ses mots me frappent comme un coup de poing dans l'estomac. Je m'arrête net, incapable de faire un pas de plus. Lentement, je baisse la tête, sentant la lourdeur de sa remarque. Je sais pertinemment pourquoi elle dit ça. Mon anniversaire tombe en plein pendant le voyage, et elle est au courant que j'ai l'habitude de partir deux, trois jours en Pologne pour le fêter avec ma famille et mes amis.

   – Je sais que ce n'est pas facile pour toi, poursuit-elle, sa voix douce mais empreinte de compréhension. Mais je suis contente que tu aies décidé de participer.

   Je relève la tête et croise son regard. Madame Keating a toujours été attentive, une prof qui comprend que nos vies en dehors de l'école ont un impact sur ce que nous sommes ici. Un léger sourire étire mes lèvres, bien que l'émotion me serre la gorge.

   – Merci, Madame, dis-je simplement, la voix un peu rauque.

   Elle me sourit en retour, et je sais qu'elle comprend sans qu'aucun autre mot soit nécessaire.

   – Une dernière petite chose Elliot, Cupide ne vient pas au lycée cette semaine, est-ce que je peux te donner son numéro pour que tu lui transmettes les cours ?

   Je la regarde en silence pendant un moment, ne comprenant pas vraiment pourquoi elle me demande ça à moi. Puis, la réponse me vient sans que j'aie besoin de demander. Les autres auraient profité de connaître son numéro pour se moquer d'elle. C'est vrai qu'elle l'a changé depuis... l'incident.

   Je sens une hésitation monter en moi. Accepter signifie m'impliquer un peu plus dans quelque chose que j'ai toujours essayé d'éviter. Je respire profondément, pesant le pour et le contre. Finalement, je finis par hocher la tête à contrecœur.

   – D'accord, dis-je, ma voix plus basse que je ne l'aurais voulu.

   Elle me remercie avec un sourire timide, et je ne peux m'empêcher de me demander pourquoi le monde semble toujours trouver un moyen de la pousser vers moi. Madame Keating sort un petit bout de papier de son carnet et commence à y écrire le numéro. Lorsqu'elle me le tend, je prends le papier et lui souris légèrement en signe de remerciement. Elle me rend un sourire encourageant, et je me tourne pour quitter définitivement la pièce.

   Je me promène dans les couloirs, essayant de me rappeler de mon prochain cours, mais mes pensées sont ailleurs. Les murs résonnent d'un bourdonnement de voix étouffées et de pas pressés.

   Finalement, je décide de sortir du lycée. L'air frais me fait du bien alors que je me dirige vers l'un des seuls bancs qui n'est pas mouillé par la pluie. Le ciel est encore lourd de nuages, mais la pluie semble avoir cessé, laissant derrière elle un parfum terreux et une légère brise. En regardant autour de moi, je remarque les feuilles des arbres qui brillent sous les reflets grisâtres du ciel, comme si la nature elle-même respirait après l'averse.

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