CHAPITRE 3

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WILLIAM

Ça vous est déjà arrivé de remettre vos choix de vie en question ?

Moi, oui.

Être professeur, c'est avant tout donner de son temps pour transmettre ses connaissances aux élèves, en adaptant les notions, de manière à les rendre compréhensibles. Dans le milieu, c'est ce qu'on appelle la transposition didactique.

Honnêtement, en voyant les résultats des travaux de mes élèves, je me demande pourquoi je me donne autant de mal à leur offrir des cours structurés. La moitié des productions ne représente que des bonhommes bâtons avec des corps si disproportionnés que je commence à m'en inquiéter.

Je soupire en apposant la note sur la feuille.

Le prochain travail sur la pile me fait hausser un sourcil, tandis que je ne peux me retenir de m'exclamer :

— Mais non ! Il n'a pas osé !

Il y a des bites partout. J'oscille entre le rire et le désespoir. Je leur avais demandé de créer un motif qui leur ressemble, j'aurais dû être plus précis.

Je prends une rapide photographie du travail et l'envoie illico dans le groupe Instagram qu'on partage avec mes meilleurs potes. Eux, c'est sûr que ça les fera bien rire.

J'ai à peine le temps de reposer mon IPhone qu'on toque à la porte et qu'elle s'ouvre à la volée pour dévoiler la CPE.

Ça ne va pas recommencer...

Je cache rapidement le travail bourré de phallus pour ne pas avoir à justifier ça, puis me redresse pour faire face à la nouvelle arrivante.

— Monsieur Collins ? Je peux vous déranger cinq petites minutes ?

J'acquiesce en silence, les lèvres pincées.

Je le sens mal.

En voyant Zachary rentrer, suite à ma collègue, je me fais violence pour ne pas soupirer.

— Qu'a-t-il encore fait ?

La CPE prend une grande inspiration, puis, d'une main, me tend un dossier de quelques pages, que je réceptionne dans l'instant.

« Rapport d'incident ».

Je lève un regard foudroyant sur le gamin, mais avant que je n'ai le temps de lire le rapport plus en détails, ma collègue lève sa deuxième main en l'air, dans laquelle elle tient ce qui semble être une poignée de cheveux blonds.

C'est quoi ce bordel ?!

Mon regard doit en dire long sur mon étonnement, puisqu'elle explique :

— Il a trouvé intelligent de couper les cheveux de sa voisine en cours d'histoire.

— Tu as fait quoi ? je m'offusque.

— Ses cheveux allaient sur MA table ! rétorque-t-il avec véhémence, comme si ça justifiait son acte.

Je hausse un sourcil tout en fronçant l'autre.

Il n'est pas net.

D'où lui viennent toutes ces idées à la con ?! Deux pensées me viennent simultanément à l'esprit :

« Encore des papiers à remplir ».

« Il faut que je raconte ça à Max et Luke ».

— Je peux vous le laisser ? Les parents de la jeune fille sont arrivés.

— Pas de pro-

Je n'ai même pas fini ma phrase que la conseillère principale d'éducation a déjà fait demi-tour. Zachary reste planté devant mon bureau, son sac à dos sur une seule épaule et le regard dans le vide.

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