Collision

CHAPITRE 13

WILLIAM

L'appartement était encore dans un piteux état il y a quelques heures mais j'ai su me montrer persuasif pour contraindre Luke à tout nettoyer. Déjà, parce que c'était son idée d'organiser le nouvel an chez nous, et ensuite, sa frustration était telle, qu'il m'a suffit de lui promettre une partie de jambe en l'air digne de ce nom, pour le voir astiquer la coloc du sol au plafond.

Voilà la raison pour laquelle je me coltine une démarche de pingouin en arrivant devant le collège ce matin. Je salue rapidement mes collègues, leur souhaitant une bonne année avant de préparer ma salle.

J'enlève les décorations de Noël que nous avions accrochées tous ensemble et je fais peau neuve, ici aussi.

— Je suis déjà à bout, râle Noah en entrant discrètement dans ma salle.

Je me tourne vers lui et le détaille rapidement. Son visage au bronzage de ski semble totalement éteint, à la limite du désespoir.

— Ça fait deux minutes qu'on est revenus de vacances, je ricane en le saluant amicalement.

— Ce sont deux minutes de trop.

Je secoue la tête avec amusement, en ravalant difficilement mon sourire. Lui, il est surtout devenu prof pour les vacances. C'est la même rengaine à chaque rentrée, à croire qu'il ne s'y fera jamais.

Le prof de français dépose ses affaires sur mon bureau et s'installe au bord de la table pour siroter son café tranquillement.

— J'ai préparé le diapo à leur projeter, je déclare en m'installant à ses côtés. Il va faire son petit effet, j'en suis sûr !

— En même temps, c'est pas souvent qu'ils ont l'occasion de manquer des cours pour partir en voyage.

Un point pour lui. Dès que ça parle d'autre chose que du cours, on a l'entière attention des élèves.

— T'as imprimé les formulaires ?

Il me lance un clin d'œil accompagné d'un sourire malicieux, puis extirpe un tas de paperasses de sa mallette.

— J'ai toutes les infos. J'ai même agrafé les pages entre elles pour ne pas qu'elles se mettent à voler dans la salle. Évidemment, y aura toujours l'un ou l'autre génie qui réussira à perdre l'autorisation de sortie, mais bon...

— Connaissant les zozos, t'as bien fait, j'acquiesce d'un signe de tête.

Noah grimace, puis reprend, d'un ton clairement embarrassé :

— En parlant de zozo, t'as pas peur que Zachary Grant vienne foutre la merde ? Je sais que c'est ton petit protégé, mais le laisser assister à ce voyage n'est pas la meilleure idée du siècle.

Je me mords la langue pour m'empêcher de rétorquer à chaud. Zachary n'est toujours pas remonté dans l'estime de mes collègues et ces derniers se la jouent bien langue de vipère en salle des profs. Même Lucy n'a toujours pas changé d'avis à son sujet.

— Il faut qu'on lui laisse sa chance.

Noah gronde de mécontentement, agacé de me voir encoooore prendre la défense du gamin.

Sorry not sorry.

— Et...t'as déjà pensé à des accompagnateurs ? reprend mon collègue, en changeant radicalement de sujet.

— Je me suis dit qu'on pouvait proposer à monsieur Grant de nous accompagner ? Il ne sera pas de trop comme soutien...

— Comme si il avait que ça à foutre, ricane Noah, avec mauvaise foi. Il ne sera sans doute même pas dans le même pays que nous.