Chapitre 20

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Le reste de la journée bien chargée en émotion est passé beaucoup trop vite. Je ne comprends même pas comment j'ai atterri en morceau au Petit Danois avec Lola et Adrian qui se galochent sur le canapé d'en face. Je n'ai pas revu Soren depuis qu'il m'a accompagné sur la piste pour l'annonce des sélections. Il a dû surement filer avec Anaïs, trop effrayé par son moment philosophique sur la table de pique-nique. Le bar est rempli de plus de monde qu'il peut contenir, et cette fois-ci, il est ouvert au public pour célébrer la sélection du pôle compétition de la station. Malgré la chute de Soren rattrapé par l'extraordinaire figure de Lola, ils ont réussi à être sélectionné pour les championnats du monde en première place. Autant dire qu'ils sont tous à fond. Mon verre d'eau à la main, je les observe célébrer ce moment qui mérite d'être célébré comme il se doit. J'aurais aimé en danse atteindre un si bon niveau pour faire des sélections comme celle-ci. Peut-être dans une autre vie.

- Tu t'amuses avec ton verre d'eau ?

Je fixe Lucas et bouge la main nonchalamment dans sa direction.

- Je rigole !, dit-il en s'enfonçant lourdement dans le canapé à côté de moi

Il est déjà complètement bourré et je n'ai pas envie d'avoir un coma éthylique à gérer.

- Tu devrais passer à l'eau d'ailleurs toi

- Non madame, je compte bien repousser mes limite en ce jour de gloire

- Tu peux remercier Lola pour avoir rendu ce jour glorieux

- C'est déjà fait en revanche, je n'ai pas tabassé Soren pour avoir failli le foirer

Je plisse les yeux devant ce mot fort qu'il vient de sortir. Certes, il est bourré, mais il l'a dit avec une intention plus que réelle.

- Relax, je rigole !

- Tu rigoles beaucoup quand tu es bourré dis donc

- L'alcool rigolo comme on dit

- Je ne suis pas sûr qu'on dise ça mais bon

Il ne relève pas ma remarque, il me fixe avec ses yeux vitreux, l'alcool a complétement pris le dessus. Je reporte mon regard vers mon verre d'eau en espérant qu'il parte. Ce n'est pas très sympa de ma part, mais je n'ai pas la force aujourd'hui de gérer un mec complètement ivre. Je secoue nerveusement ma jambe, mais il ne fait que se rapprocher de moi.

- Tu... Tu me rappelles tellement Emma, marmonne-t-il en se rapprochant toujours plus

Je me tourne davantage vers lui et je sens son souffle changé d'alcool, une vague de nausée m'envahit.

- Emma ?

- Oui...Tes cheveux... mais surtout tes yeux

Les informations qu'il me balance n'ont pas le temps de monter à mon cerveau que ses lèvres s'écrasent sur les miennes. Mon monde bascule. Mon cœur s'emballe pour une mauvaise raison et une panique que je n'avais pas ressentie depuis un moment resurgi violemment.

- Lucas ! Stop ! Mais t'es malade ! je crie en le poussant avec plus de force que voulu, les yeux écarquillés par la peur

Je recule précipitamment et mon dos heurte l'accoudoir du canapé. L'air du bar devient irrespirable. Ma respiration s'accélère et je tourne la tête pour chercher un support féminin dans cette épreuve qui me rend plus que vulnérable. Mais Lola est accoudée avec Adrian au bar, le seul regard que je croise, c'est celui de Lucas, un regard confus, blessé.

- Je... je suis désolé Aria, balbutie Lucas

Je n'arrive pas à bouger du canapé et pourtant il faut que je le fasse. Des flashs de mon accident, de ma dispute avec ma mère, de Soren et puis de ça. La crise de panique me transperce l'estomac, rampe dans ma gorge comme un serpent jusqu'à mon visage et je suis au bord du malaise.

- Aria s'il te plait... il ne finit pas sa phrase et renverse mon verre d'eau

Je me redresse instantanément trempée. Je m'éloigne le plus possible de Lucas et du canapé. Je ne sais plus où me mettre. Mon cœur, déjà lourd, sombre encore plus. Mon esprit tourbillonne trop vite, trop fort. Je déambule dans le reste du bar à la recherche des toilettes ou un autre endroit calme pour me ressaisir. Je n'ai pas la force de sortir seule pour rentrée, il faut que je me calme. Les toilettes sont introuvables alors que je suis déjà venu ici. Ma main tremblante, j'ouvre la première porte entrouverte et la ferme brusquement. Je glisse contre elle, mon dos me faisant un mal de chien. Je vais avoir un beau bleu en forme d'accoudoir. Mes mains sur le ventre, je fais des exercices de respiration pour me calmer, mais les images de ce qu'a fait Lucas mélanger à la crevasse me reviennent si bruyamment dans ma tête. Impossible. Je n'arriverai jamais seule. Mais je veux que ça s'arrête. J'ai l'impression que je vais mourir. J'ai perdu le contrôle. Je me recroqueville les genoux contre ma poitrine et je me balance pour me bercer. Pour m'échapper de ce cauchemar éveillé. Ma bulle et le silence de la pièce est percé par des voix étouffées venant de derrières une autre porte. Ma curiosité atténue la panique et je prends sur moi pour aller voir ce qu'il se passe. Je m'avance doucement et je reconnais les cheveux d'Anaïs. Je me colle précipitamment au mur et m'accroupis, les jambes encore tremblantes

- Je te connais Soren ! Par cœur même ! L'unique raison pourquoi tu as chuté, c'est parce que tu l'as vue, tu l'as vue avec Lucas et tu n'as pas supporté.

Un long silence s'installe et Soren apparait, se tournant vers Anaïs. Ma respiration se coupe à nouveau.

- Oui ! Ok ça m'a déconcentré !

Anaïs part dans un éclat de rire à en faire peur n'importe quel pioupiou

- Tout ça pour une fille

- Ne me fais pas de leçon de morale Anaïs, je n'en veux pas, surtout pas venant de toi ! C'est l'hôpital qui se fout de la charité là 

Elle le fixe intensément sans lâcher le regard. Je ne comprends rien à la discussion avec mon cœur qui bat à la chamade alors, je colle mon oreille directement sur le mur.

- Et puis je ne comprends pas pour, tu parles encore de ça, c'est réglé, je ne suis même pas blessé et on est sélectionné, c'est ce que tu voulais, ce qu'on voulait tous et ont là maintenant lâche-moi la grappe

- Il n'y a pas que ça que je veux Soren

- Quoi alors ? hurle Soren à bout

- Ce que je veux, c'est que tu le dises

- Dire quoi bon sang Anaïs ?

- Que tu l'aimes 

Tout SchussOù les histoires vivent. Découvrez maintenant