Ethan passa en revue les photos qu'il venait de prendre. Il était assis dans un café tranquille, loin du brouhaha habituel qui accompagnait ses après-midis d'entraînement ou ses soirées avec l'équipe. Les images sur l'écran de son appareil photo captivaient toute son attention : un coucher de soleil vibrant de nuances d'or et d'orange, une rue pavée solitaire bordée d'arbres anciens, et enfin, le portrait doux de Matilda, sa silhouette baignée dans la lumière du crépuscule.
Il sourit en regardant cette dernière photo. Matilda. Ces derniers temps, elle était devenue la pièce centrale de sa vie, celle autour de laquelle tout le reste semblait graviter. Il repensa à leur dernière sortie, une promenade dans un parc presque désert où ils avaient parlé de tout et de rien, simplement heureux d'être ensemble.
Mais en arrière-plan, une ombre grandissait. Il la sentait, ce poids qui s'alourdissait chaque jour. Ses amis. L'équipe. Les soirées qui s'étaient autrefois succédé sans fin, les rires, les discussions bruyantes autour de bières bien fraîches. Tout cela commençait à perdre son attrait. Ses conversations avec ses coéquipiers lui paraissaient désormais creuses, dénuées de sens.
Il avait commencé à esquiver leurs invitations, prétextant être occupé ou trop fatigué après l'entraînement. Mais il savait que ce n'était pas la vraie raison. La vérité, c'est que ces soirées, autrefois synonymes de détente et d'amitié, n'avaient plus de saveur pour lui.
Ethan était plongé dans ses pensées quand son téléphone vibra. Le nom de Lucas, son meilleur ami depuis le lycée, s'afficha à l'écran. Il hésita un instant avant de répondre.
- Ethan, tu fais quoi ce soir ? demanda Lucas sans préambule. On se retrouve tous au bar pour fêter notre dernière victoire. Tu viens, non ?
Ethan soupira intérieurement. Le ton de Lucas n'était pas une simple invitation. C'était une injonction, celle à laquelle il avait répondu sans faillir pendant des années. Mais ce soir, l'idée même de les rejoindre le fatiguait.
- Désolé, Lucas, je ne crois pas que je vais pouvoir venir. Je suis crevé et j'ai encore quelques trucs à faire.
Il y eut un silence de l'autre côté de la ligne, un silence lourd de non-dits.
- C'est la troisième fois cette semaine que tu nous plantes, Ethan. Qu'est-ce qui se passe ? T'es jamais dispo ces derniers temps. On dirait que tu nous évites.
Ethan sentit la pression monter. C'était ce qu'il redoutait. Ses amis avaient remarqué son détachement, et maintenant, ils réclamaient des explications. Il savait que ce moment viendrait, mais il n'était pas prêt.
- Je t'évite pas, mec, se défendit-il. C'est juste que... j'ai d'autres trucs en tête en ce moment.
Lucas ne laissa pas passer cette réponse vague.
- D'autres trucs en tête ? Sérieux ? Tu sais que t'es notre capitaine, non ? On a besoin de toi, pas juste pour les matchs, mais pour tout le reste aussi. Tu sais ce que c'est l'esprit d'équipe, ça te parle encore ou quoi ?
Ethan ferma les yeux, ressentant un mélange de frustration et de culpabilité. Il savait que Lucas avait raison sur un point. Il s'était éloigné. Mais il ne savait pas comment leur expliquer que ce n'était pas contre eux, mais pour lui-même.
- Écoute, Lucas, j'ai vraiment besoin de temps pour moi en ce moment, répondit-il finalement, cherchant les mots justes. J'ai découvert des choses qui me passionnent, comme la photographie. Et puis... y a Matilda aussi. Je me rends compte que j'ai besoin d'équilibrer tout ça. J'espère que tu comprends.
Un long silence suivit cette confession. Ethan pouvait presque entendre Lucas digérer ses paroles de l'autre côté.
- Matilda, hein ? lança finalement Lucas, la voix plus froide qu'avant. C'est pour elle que tu nous lâches ? Pour une fille ?
Ethan sentit une pointe de colère monter en lui. Il savait que c'était plus compliqué que ça, mais il n'aimait pas la manière dont Lucas simplifiait tout.
- Ce n'est pas "juste" pour elle, Lucas, dit-il en tentant de rester calme. C'est pour moi. J'ai besoin de ça. J'ai besoin de savoir qui je suis en dehors du foot, en dehors de l'équipe. J'espérais que tu comprendrais.
- Comprendre ? Tu te fous de moi, Ethan ? Ça fait des années qu'on se serre les coudes, et là, tu décides que t'as besoin de "découvrir qui tu es" ? Et l'équipe, t'y penses un peu ? On est tous dans le même bateau, et toi tu veux sauter par-dessus bord ?
Ethan serra les dents. La conversation prenait une tournure qu'il n'aimait pas. Lucas ne comprenait pas, ou peut-être ne voulait-il pas comprendre. Tout ce qu'il voyait, c'était qu'Ethan s'éloignait, et pour lui, c'était une trahison.
- Je ne vous abandonne pas, insista Ethan. J'ai juste besoin de rééquilibrer les choses. Et si tu étais vraiment mon ami, tu respecterais ça.
Lucas éclata de rire, un rire sans joie.
- Te respecter ? Bien sûr. Fais ce que tu veux, Ethan. Mais rappelle-toi que quand t'auras besoin de nous, on sera peut-être plus là.
La ligne se coupa brusquement, laissant Ethan seul avec le silence de la pièce. Il resta un moment immobile, les mains serrées autour de son téléphone, essayant de calmer la tempête d'émotions qui faisait rage en lui. Lucas avait touché une corde sensible, celle de la loyauté, du devoir envers l'équipe. Mais Ethan savait qu'il ne pouvait pas continuer à se mentir. Il ne pouvait plus jouer ce rôle du capitaine parfait, celui qui était toujours là, qui souriait, qui faisait la fête, alors que son cœur était ailleurs.
Quelques heures plus tard, Ethan se trouvait seul dans un studio de photographie qu'il avait loué pour la soirée. Il avait besoin de ce moment, de cet espace pour lui. La photographie était devenue une échappatoire, un moyen de canaliser ce qu'il ressentait sans avoir à l'exprimer par des mots. Il prépara son matériel en silence, l'esprit encore agité par la conversation avec Lucas.
Au moment où il ajustait son appareil pour capturer une lumière douce filtrant par la fenêtre, son téléphone vibra à nouveau. Cette fois, c'était un message de Matilda. Elle lui demandait s'il voulait la rejoindre pour une promenade nocturne.
Ethan sourit. Rien que l'idée de la voir apaisait un peu les tourments qui le hantaient. Mais il savait aussi que Matilda finirait par comprendre ce qu'il traversait. Il ne pouvait plus tout garder pour lui. Lorsqu'ils se retrouvèrent, un peu plus tard, sous un ciel étoilé, elle le remarqua immédiatement.
- Tu es pensif, ce soir, lui dit-elle doucement, glissant sa main dans la sienne. Quelque chose ne va pas ?
Ethan serra sa main, appréciant sa chaleur. Ils marchèrent en silence pendant quelques minutes avant qu'il ne se décide à parler.
- Lucas m'a appelé tout à l'heure. Ils ne comprennent pas ce qui m'arrive. Ils pensent que je les abandonne, que je change à cause de... toi.
Matilda s'arrêta et le regarda, ses yeux pleins d'inquiétude.
- Je ne veux pas te causer des problèmes, Ethan. Si tu as besoin de temps pour eux, je comprendrai.
Il secoua la tête, refusant cette idée.
- Non, ce n'est pas ça. Tu n'es pas le problème, Matilda. En fait, tu es la seule chose qui semble avoir du sens en ce moment. Mais j'ai l'impression de perdre pied, de ne plus savoir où je vais. Je veux la photographie, je veux être avec toi, mais je sens que ça m'éloigne de tout le reste. Je ne sais pas comment jongler avec tout ça.
Matilda resta silencieuse, prenant le temps de réfléchir avant de répondre.
- Parfois, il faut faire des choix, Ethan. Des choix difficiles. Mais je suis là pour toi, peu importe ce que tu décides. Je veux juste que tu sois heureux, que tu sois en paix avec toi-même.
Ethan sentit une vague d'émotion l'envahir. Il s'arrêta, se tournant vers elle, et la serra dans ses bras. Elle avait raison. Il devait faire un choix. Mais pour la première fois, il se sentait moins seul face à ce dilemme.
Ce soir-là, alors qu'ils continuaient à marcher sous les étoiles, Ethan réalisa que les premières ruptures n'étaient pas toujours des fins, mais parfois des débuts. Des débuts d'une vie plus authentique, plus en accord avec qui il était vraiment. Les sacrifices seraient inévitables, mais tant qu'il pouvait avancer avec Matilda à ses côtés, il sentait qu'il pourrait affronter ce qui l'attendait.
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Whispers in the Hallways
RomantikMatilda Thompson savait que le lycée n'était qu'une étape, un passage obligé vers quelque chose de plus grand, de plus vrai. Pour l'instant, son monde était rempli de devoirs à rendre, de clubs à présider, et de regards furtifs échangés dans les cou...