Je suis de retour à Eagle Mountain Academy. C'est toujours cette même école somptueuse, studieuse et dirigée d'une main de maître par les RES.
Pourtant, tout semble avoir changé.
Parce qu'Easton Cooper ne me regarde plus comme si j'étais son monde...
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Retourner à l'entrainement est presque... étrange. Peut-être parce que la pression a considérablement augmenté maintenant que les mondiaux ne se compte plus en mois mais en semaine. Avec toutes les merdes qui nous sont tombés dessus, je n'ai pas vu le temps passé. J'ai dû mal à croire que dans quinze jours, on prendra l'avion pour les États-Unis, direction Raleigh et la PNC Arena. L'ambiance n'est pas la même que d'ordinaire, même les remplaçants jouent avec plus de concentration que d'habitude. Les entre-partie sont silencieuse et Simon, notre coach prend des notes sans dire un mot.
L'Esport, ça a toujours été un moment d'accalmie dans ma vie tumultueuse, cependant, aujourd'hui, ça fait monter ma dose de stress à un stade que je ne pense jamais avoir atteint. Ren, Shawn et moi, sommes parfaitement conscient que c'est notre dernière saison pour marquer l'histoire. L'année prochaine, nous rentrerons à l'université et nos parents, même les miens, ne prendrons pas le risque que notre carrière éphémère prenne le pas sur nos avenirs radieux. De toute façon, lorsqu'on s'est lancé, on avait décidé que ça se passerait ainsi, qu'on continuerait jusqu'à la dernière années de lycée avant de prendre nos retraites. Et puis, ce n'est pas plus mal non plus, la main de Ren tremble désormais même lorsque nous ne jouons pas. Il a de plus en plus de mal à contrôler ses mouvements, ce qui affecte sa précision. Il ne l'a jamais dit à voix haute, mais on le voit bien. Pour un joueur pro, surtout à notre niveau, chaque milliseconde compte, chaque mouvement doit être calculé, et je sais que Ren en souffre. C'est difficile pour lui, mais il tient bon, probablement parce qu'il sait que c'est notre dernière chance.
Aujourd'hui, pourtant, l'excitation qui devrait m'envahir à l'approche des mondiaux est éclipsée par une étrange anxiété. La réalité de ce qui nous attend à Raleigh me frappe de plein fouet. On a toujours rêvé de cette compétition, de ce moment où on pourrait enfin montrer au monde ce dont on est capable, mais maintenant que c'est si proche, l'enjeu me paraît presque insurmontable.
Je jette un coup d'œil à Ren, qui se masse discrètement le poignet entre deux parties. Il essaie de ne pas attirer l'attention, mais je le remarque. Shawn aussi. On sait tous les deux que Ren se bat contre quelque chose de plus grand que le stress des compétitions, et ça nous pèse. Mais on ne dit rien. Pas maintenant. On ne peut pas se permettre de faiblir à quelques semaines des mondiaux.
Le silence dans la salle est presque oppressant. D'habitude, on plaisante, on se chambre, on rigole même de nos erreurs, mais aujourd'hui, il y a une gravité dans l'air qui rend tout plus intense. On est tous concentrés sur notre objectif, mais je sens aussi le poids de ce qui pourrait être notre dernière chance de prouver ce qu'on vaut vraiment. Qu'on a pas prit tant de risque juste pour se planter avant même de commencer. Putain, je n'imagine même pas se qui se serait passé si Ren n'avait pas quitté la maison de sa génitrice quand Suzy nous a balancé. Je ne suis même pas certain qu'il serait encore là à l'heure qu'il est.
Simon continue de prendre des notes sans un mot, son visage impassible. Je sais qu'il ressent la même pression que nous. Il a toujours été là pour nous pousser, pour nous encourager à aller plus loin, mais aujourd'hui, même lui semble comprendre l'enjeu. C'est maintenant ou jamais.
