chapitre 9: retour à la réalité

235 7 5
                                    

Jordan s'était lentement laissé aller dans cette soirée, où pour la première fois depuis bien longtemps, il avait ressenti une paix intérieure. La tension, présente depuis le début de la soirée, s'était peu à peu dissipée, laissant place à une conversation plus légère, presque anodine. Les sujets les plus banals avaient pris une importance nouvelle, comme si le simple fait de parler, de rire, avait soudainement effacé les ombres du passé.

Assis côte à côte sur le canapé, ils avaient discuté de tout et de rien, leurs voix se mêlant doucement, comme une mélodie apaisante dans la nuit calme. Il n’y avait plus de malaise, plus de poids oppressant entre eux. Chaque mot, chaque regard échangé, avait le goût de la simplicité, de la normalité. C’était comme s’ils se connaissaient depuis toujours, comme si les disputes, les tensions, et les doutes n’avaient jamais existé.

La soirée s'était éternisée, les heures filant sans qu'ils ne s'en rendent compte. Mais il était temps pour Jordan de rentrer. L’heure tardive le rappelait à l’ordre, bien qu’il n’ait aucune envie de quitter Gabriel. Leurs adieux étaient difficiles, teintés de cette étrange hésitation qui plane entre deux personnes qui ne veulent pas se séparer, mais qui savent qu’ils n’ont pas le choix.

Gabriel, d'une voix douce et presque murmurée, lui dit alors : « Fais attention en rentrant. »

Ces mots, simples, étaient empreints d'une sincérité touchante. Jordan, incapable de retenir un sourire, le premier vrai sourire qu’il esquissait depuis des mois, répondit avec une pointe d'ironie dans la voix : « T’inquiète pas, je saurai éviter les vieilles dames en trottinette. »

Gabriel éclata d’un rire surpris, légèrement jaune, mais sincère. Il tapota affectueusement l’épaule de Jordan, un geste à la fois complice et affectueux.

Au moment de se dire au revoir, une hésitation palpable s’installa entre eux. Se serrer la main semblait trop formel, une bise trop familière, et un baiser peut-être trop audacieux. Jordan, troublé par cette ambivalence, resta figé. Mais Gabriel, en voyant son embarras, prit les devants. Il emprisonna doucement le visage de Jordan entre ses mains et l’embrassa. Ce baiser, plus profond que le premier mais tout aussi tendre, fit naître en Jordan une chaleur douce et réconfortante.

Jordan se détacha lentement, un sourire timide se dessinant sur son visage, révélant ses fossettes cachées. Il jeta un dernier regard à Gabriel, empli de tendresse et de promesses silencieuses, avant de quitter l’appartement.

Une fois dehors, le vent glacial de la nuit parisienne frappa Jordan, mais il se sentait étrangement réchauffé de l’intérieur. Le goût des lèvres de Gabriel restait ancré en lui, chaque détail de la soirée repassant en boucle dans son esprit. Il appela un taxi, et le temps d’attente de vingt minutes lui permit de savourer une dernière fois ce souvenir. Ses lèvres, encore marquées par le baiser, esquissèrent un sourire lorsqu’il passa sa langue dessus.

Le taxi arriva enfin, et Jordan monta à l’intérieur, saluant le chauffeur avec une cordialité inhabituelle. Il donna l’adresse de son appartement, et tout au long du trajet, ce sourire niais ne quitta pas son visage. Les images de Gabriel revenaient en boucle, et même les lumières nocturnes de Paris semblaient avoir une teinte plus douce, plus chaleureuse.

Mais en arrivant devant la porte de son immeuble, ce sourire disparut instantanément. Il aperçut une silhouette féminine, familière, qui se tenait devant la porte. Son cœur se serra, et il sut immédiatement de qui il s'agissait. La silhouette élégante, perchée sur des talons hauts, habillée d'une robe noire assortie à sa veste, ne pouvait être que Marine.

Jordan s’approcha, essayant de contenir le malaise qui montait en lui, et demanda d’une voix inquiète : « Marine, qu’est-ce que vous faites ici ? »

Sous les masques du pouvoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant