Écarlate - Kidofudo

Chapitre 12 - Victoire par KO technique

Vous vous souvenez de l'époque où j'appelais Jude "le gosse de riche" ? Je pense qu'il s'agissait d'un doux euphémisme.

Plus sérieusement, en arrivant, je pensais que Google maps m'avait paumé et amené à un château du XVe siècle. J'en étais rendu à chercher le guichet des visites, avant de me rendre compte qu'effectivement, il s'agissait bien de la demeure des Sharp. Vous me croyez si je vous dis que la baraque est plus grande que celle de Xavier ? Et pourtant, croyez-moi qu'on pourrait déjà ouvrir un hôtel 100 places dans la sienne, avec un peu d'aménagement.

Enfin, c'est pas tout ça mais je suis censé faire quoi moi maintenant ? Parce que je doute qu'on puisse rentrer chez monsieur le marquis de Sharp comme ça, juste en frappant. Surtout qu'à cette heure-ci, il doit être en train de prendre le thé avec sa femme tout en discutant du dernier coup de "génie" de l'extrême droite et en riant de la plèbe.

Je finis par envoyer un message à Jude, qui aura sûrement de meilleures idées que moi.

[Conversation privée Inazuchat : Jude]

Racaille_de_l'espace : Bonjour très cher comment puis-je infiltrer votre humble château

Jude : Attends j'arrive.

Racaille_de_l'espace : Merci bien votre majesté, c'est très aimable à vous

J'attends deux minutes avant de le voir passer la porte d'entrée plus grande que l'égo de Xavier. Visiblement, il n'a pas cédé à la tentation de partir en virée nocturne pour aller retrouver ses lunettes adorées (vous me direz, il doit bien avoir d'autres paires chez lui) puisque ses yeux sont aujourd'hui encore à la vue de tous. Enfin, surtout à la mienne actuellement, et je ne me gène pas pour en profiter.

- Mes parents sont à l'étage.

Hein ? Quoi ? Ah, oui, c'est vrai, la mission. Je ne pensais pas dire ça un jour, mais c'est l'heure d'interrompre le goûter. Jordan me tuerait s'il m'entendait dire ça.

- Ils ont rien dit sur tes lunettes ? je lui demande, me doutant qu'ils n'avaient pas dû apprécier voir leur fils rentrer sans.

- On ne s'est pas croisé.

- Ça veut dire qu'ils vont avoir la surprise, je lance ironiquement.

Ma remarque arrache un petit sourire à Jude. Victoire ! C'est sûr qu'il doit pas être serein actuellement. En même temps, on n'efface pas des années à se plier en quatre pour ses géniteurs comme ça. C'est bien pour cette raison qu'il m'a demandé de venir en soutien moral. Et, croyez-moi, je compte bien m'acquitter de cette tâche du mieux que possible.

On entre à l'intérieur du manoir et... bon, là, j'abandonne, c'est plus possible. Je pensais que l'hôpital était un labyrinthe destiné à perdre les patients histoire d'avoir plus de place pour les prochains, mais là on atteint le niveau suprême. Ils se sont cru à Poudlard pour mettre des escaliers partout comme ça ? Je m'attendrais presque à ce qu'ils se mettent à bouger pour m'envoyer dans un cul de sac avec un chien à trois têtes.

Heureusement que Jude a un GPS intégré grâce à son expérience dans ce lieu hostile à toute forme de vie, et il me guide jusqu'à la porte qui, j'imagine, mène à la réunion tupperware version porcelaine. Je le sens hésiter lorsqu'il lève le bras pour appuyer sur la poignée. Dès qu'il ouvrira cette porte, il ne pourra plus retourner en arrière.

- T'inquiète, si ils te virent on a encore de la place à l'orphelinat. T'auras juste à supporter Jordan qui croit qu'on est tous des aliens et Claude et Bryce qui alternent entre se foutre sur la gueule et se rouler des pelles.

Nouveau sourire. Je crois que le faire sourire est devenu mon activité préférée, après manger et faire chier Xavier. Il appuie sur la poignée, et la porte s'ouvre en un petit grincement. La pièce est un petit salon au milieu duquel trône une table, probablement en chêne massif ou quelque chose comme ça. Assis à cette table, deux individus adultes nous regardent du même regard que m'a lancée la directrice quand j'ai débarqué au lycée Raimon. Cool, je peux enfin mettre un visage sur mes envies de meurtre.