Chapitre 8

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Une partie de moi espérait que Tommy annonce le contraire.

Je n'ai aucune envie d'entrer dans cette maison sinistre et plongée dans le noir, encore moins d'y dormir et d'y vivre pour un temps indéterminé. La lumière des phares laisse deviner une façade de planches sombres qui n'aident pas à rendre la maison plus accueillante à cette heure de la nuit. Du lierre court sur les murs, preuve de l'entretien inexistant du bâtiment. Depuis combien de temps l'endroit est-il abandonné ? J'évite de porter mon regard au-delà des murs, où l'obscurité guette de tous les côtés, et reste collée à Aurore en tendant l'oreille pour prévenir le moindre danger.

Une fois à l'intérieur, je pose mon sac dans l'entrée sans m'aventurer plus loin. L'électricité n'est pas encore remise en route et les pièces sont aussi sombres que les bois alentours. Je préfère me concentrer sur l'agitation de mes camarades avant d'essayer de trouver le courage de m'aventurer plus loin. Je croise Jules et Mehdi en sortant qui terminent déjà un premier aller avec une grosse caisse remplie de matériel. Tommy est dans le coffre du camion, occupé à sortir les fournitures pour faciliter leur transport, alors je m'approche de lui :

- Je peux aider ?

Sans un regard vers moi, il me demande, légèrement essoufflé :

- Tu peux regarder à l'intérieur s'il y a de quoi allumer un feu ? Une cheminée et du bois. Il nous faut de la lumière et de la chaleur pour passer cette première nuit.

Même s'il est concentré sur sa tâche, je hoche la tête pour lui signifier que j'ai compris et retourne à l'intérieur, où Rose commence déjà à installer un espace pour que nous puissions tous coucher dans le salon cette nuit, le temps de mieux nous installer demain à la lumière du jour. Grâce à elle, je découvre la forme de l'âtre qui servait autrefois à chauffer la maison et m'attelle à essayer d'en faire sortir une flamme. Je n'y parviens qu'avec l'aide d'Amina, venue en renfort lorsqu'elle m'a vu perdre patience face à mes échecs successifs.

Une fois le feu lancé, une nouvelle ambiance plus chaude s'installe sur la pièce en bazar. Rose a poussé tous les vieux meubles dans un coin, libérant un espace suffisamment dégagé pour nos couchettes et toutes les caisses que nous avons apportées avec nous. Entre la poussière, les toiles d'araignées et les saletés accumulées au fil du temps, notre présence rompt avec l'image de la longue tranquillité qui a habité ces lieux ces dernières années. S'il n'y avait pas eu l'odeur du feu de cheminée et de la chaleur nouvelle qui s'en dégage, nous aurions dormi dans les relents de renfermé qui persistent malgré notre présence.

À peine l'installation terminée, nous nous rassemblons tous dans le grand salon sombre et poussiéreux, mais avant que nous puissions nous coucher pour une bonne nuit de sommeil méritée, Tommy nous coupe dans notre élan :

- J'ai besoin de volontaires pour monter la garde jusqu'au matin. Il faut que je me repose, je ne peux pas le faire moi-même.

Je m'accorde avec lui sur le fait qu'il a l'air épuisé. Il s'est certainement levé avant nous ce matin, je ne l'ai pas vu fermer l'œil pendant notre trajet en avion et il a conduit toute la journée et une partie de la nuit. Oui, je veux bien admettre que ses batteries sont à plat.

Et un Tommy éreinté, c'est un Tommy encore plus insupportable que d'habitude.

Notre équipe en fait les frais alors que nous ne lui offrons aucune réponse satisfaisante dans les secondes qui suivent sa demande. Un Tommy épuisé, c'est aussi un Tommy impatient... Trop impatient.

Il souffle et se passe une main sur le visage, ne cachant pas son agacement :

- Décidez-vous, putain...

See No Evil [TOME 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant