Sous la Peau

Chapitre 1 : Le Stage

Léa n'avait jamais imaginé que la clinique serait aussi isolée. Perchée au sommet d'une montagne, entourée de forêts denses et de brume épaisse, l'endroit semblait figé dans le temps. Une vieille bâtisse en pierre, défigurée par les années, mais encore solide malgré les apparences. En arrivant, elle avait ressenti un frisson étrange, mais elle avait vite écarté cette sensation comme étant le simple malaise d'une première journée dans un endroit inconnu. Elle s'était toujours dit qu'elle était une battante, qu'aucune peur n'était plus grande que sa soif de réussir.

"Bienvenue à la clinique Saint-Esprit", lui avait dit le Dr. Moreau, le médecin-chef, d'une voix basse, presque comme un murmure, lorsqu'il l'avait accueillie à l'entrée. Il avait l'air d'un homme d'un autre temps, avec sa barbe grisonnante et ses lunettes rondes, mais ses yeux, perçants, ne cessaient de l'observer. Un regard qui la suivait, pénétrant, comme s'il savait tout d'elle avant même qu'elle ne prononce un mot.

Elle avait accepté le stage sans trop réfléchir. Loin des grandes villes, c'était un endroit idéal pour se concentrer sur ses études. Loin des distractions, loin des bruits incessants de Paris. Elle s'était imaginée passer ses journées à observer des chirurgies, à assister à des consultations, à remplir des dossiers médicaux. Mais depuis qu'elle était arrivée, quelque chose semblait dérailler.

Les couloirs de la clinique étaient étrangement silencieux. Personne ne parlait, et chaque bruit, même un simple pas sur le carrelage, semblait se répercuter contre les murs de manière disproportionnée. Les patients qu'elle croisait, tous assez âgés, avaient des regards vides, comme si la vie s'était échappée de leurs yeux. Parfois, elle les surprenait à la fixer de manière intense, leurs visages marqués par des cicatrices que Léa ne pouvait pas expliquer.

"Le Dr. Moreau vous attend", lui avait dit la secrétaire, une jeune femme pâle aux cheveux sombres, d'une froideur glaciale. Elle n'avait pas souri, ni même levé les yeux de son écran d'ordinateur lorsqu'elle lui avait parlé. Mais tout le monde ici semblait porter cette même aura étrange, détachée.

Le Dr. Moreau l'avait guidée à travers le dédale de couloirs. À chaque porte qu'il passait, il y avait un léger souffle, un râle presque imperceptible. Léa s'était arrêtée une fraction de seconde devant l'une d'entre elles, la main sur la poignée, mais il l'avait empressée à avancer, comme si une telle pause n'était pas permise.

"Les patients ici sont... particuliers", avait-il dit en jetant un coup d'œil derrière lui, comme s'il s'assurait qu'aucun autre regard curieux ne se posait sur eux. "Ils viennent ici pour des traitements qu'ils ne peuvent trouver ailleurs. Mais soyez rassurée, tout est sous contrôle."

Sous contrôle. Ces mots résonnaient dans sa tête tandis qu'ils s'enfonçaient plus profondément dans la clinique. La sensation de malaise grandissait, mais elle s'efforça de ne pas se laisser envahir par ses pensées. Ce n'était pas le moment d'avoir peur. Pas maintenant.

En pénétrant dans le bureau du Dr. Moreau, elle remarqua tout de suite une étrange odeur. Un mélange de désinfectant et de quelque chose d'autre, quelque chose de plus lourd, d'indéfinissable. L'homme s'assit derrière son bureau, ses mains jointes.

"Nous avons des ressources limitées ici", commença-t-il. "Mais ce que vous apprendrez ici vous marquera à jamais. Certaines choses ne sont pas visibles à l'œil nu. Et il est de votre devoir, en tant que future médecin, d'apprendre à les voir."

Léa fronça les sourcils. Ces paroles n'avaient aucun sens. Quelles « choses » ? Elle était là pour des études, pas pour être initiée à des mystères. Mais elle n'osa pas poser la question.

"Je vais vous assigner un patient pour votre premier jour. Un cas particulier, vous verrez. Mais ne vous inquiétez pas, il ne faut pas avoir peur. Il faut simplement apprendre à regarder au-delà de ce que vous voyez."

Elle hocha la tête, un peu déconcertée, avant de s'assoir en face de lui. À travers la fenêtre derrière lui, elle aperçut une silhouette se déplacer dans le jardin, un homme vêtu d'une blouse blanche. Il semblait tout droit sorti d'un film d'horreur, avec son ombre qui s'étirait dans la brume. Léa détourna rapidement les yeux.

"Je vous amène le dossier de votre patient dans quelques minutes", dit Dr. Moreau avant de se lever et de quitter la pièce sans un mot de plus.

Le silence s'installa à nouveau. Léa regarda autour d'elle, cherchant à se concentrer sur autre chose. Ses pensées dérivèrent vers ce qu'elle avait vu dans les couloirs, ce regard, ces visages déformés par des cicatrices. Elle avait la sensation que la clinique elle-même cachait quelque chose de profondément dérangeant. Mais elle était ici pour apprendre. Pour accomplir son rêve. Et elle ne comptait pas laisser ses peurs l'arrêter.

Pourtant, une question persistait dans son esprit : Que cachait réellement la clinique Saint-Esprit ?

( A votre avis qu'es-ce qui cachait réellement la clinique Saint-Esprit )