Chapitre 14 : L'Œil de la Tempête

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La brume rouge envahissait tout. Chaque pas que Léa et Moreau tentaient de faire était comme marcher à travers une mer de plomb. Le monde autour d’eux semblait distordu, comme si la réalité elle-même se pliait sous le poids de la brèche.

"Ne t'arrête pas," murmura Léa, sa voix tremblante d’épuisement mais chargée de détermination. Elle continuait de tirer Moreau à travers le couloir dévasté, bien que chaque mouvement leur coûtât une énergie qu’ils n’avaient plus. "Il doit y avoir une issue."

"Une issue ?" Moreau riait amèrement. "Il n'y en a pas. Nous avons tout essayé, Léa. Ce… cette chose n’est pas seulement une brèche. C'est un être à part entière. Une conscience."

Léa serra les dents. "Je refuse de croire que c'est la fin. Il y a toujours un moyen."

Ils atteignirent enfin une grande pièce à moitié effondrée. C’était autrefois une salle d’observation, remplie d’équipements scientifiques et de machines. Maintenant, elle n’était qu’un amas de débris, mais quelque chose au centre de la pièce attira l’attention de Léa. Une structure circulaire massive, presque comme un portail mécanique, encore connecté à des câbles et à des écrans qui clignotaient faiblement.

"Qu'est-ce que c'est que ça ?" demanda-t-elle, ses yeux écarquillés.

Moreau s'arrêta, son regard suivant celui de Léa. "C'est... c'était un projet sur lequel nous travaillions. Une tentative de stabiliser la réalité entre notre monde et... d'autres dimensions. Mais il n'a jamais été terminé."

Léa s'approcha du portail avec une lueur d'espoir. "Peut-être que c'est exactement ce qu'on doit faire. Utiliser cette machine pour stabiliser la brèche et l'empêcher de grandir."

Moreau secoua la tête, incrédule. "Mais ce projet n’a jamais fonctionné. Nous n'avons jamais réussi à contrôler l'énergie qu'il dégageait. Si nous l'activons maintenant, ça pourrait empirer les choses."

Léa jeta un coup d’œil derrière elle. La lumière rouge grandissait encore, et les créatures dans l’ombre devenaient de plus en plus tangibles, approchant lentement, leurs formes ondulant dans la brume. Il n’y avait plus de temps.

"C’est notre seule chance," déclara Léa d'une voix ferme. "Nous n’avons plus rien à perdre."

Moreau hésita un moment, mais voyant les créatures s'approcher, il acquiesça finalement, résigné. "D'accord... mais si cela échoue, cela pourrait non seulement nous détruire, mais étendre la brèche à un niveau que nous ne pouvons même pas imaginer."

Léa savait qu'il avait raison, mais elle refusa de céder à la peur. Elle se précipita vers les panneaux de commande à moitié en ruine, ses doigts parcourant les boutons et les interrupteurs, essayant de tout remettre en marche.

"Tu te souviens comment ça fonctionne ?" demanda-t-elle.

Moreau s'approcha lentement, les mains tremblantes, et se mit à travailler à ses côtés. "Plus ou moins. Nous devons rediriger l'énergie restante dans les circuits stabilisateurs. Si nous réussissons à l'alimenter correctement, nous pourrons peut-être l'utiliser pour neutraliser la brèche."

Léa appuya sur plusieurs boutons, et lentement, la machine se mit à vibrer, émettant un bourdonnement profond. Les écrans autour d’eux commencèrent à s’illuminer de manière sporadique, certains affichant des données incompréhensibles, d’autres des schémas déformés de l'espace et du temps.

"Ça fonctionne..." souffla Léa.

Mais au même moment, la lumière rouge explosa soudainement, remplissant la pièce d’une chaleur suffocante. Les créatures se rapprochaient, se matérialisant de plus en plus, leurs yeux brillant d’une lueur maléfique. Léa et Moreau pouvaient à peine respirer sous cette pression écrasante.

"Hâte-toi, Moreau !" cria Léa, les larmes coulant de ses yeux à cause de la chaleur. "On n’a plus de temps !"

Moreau tapa frénétiquement sur le clavier. "Presque... presque... Voilà !"

Un bruit sourd retentit, et le portail mécanique s'alluma brusquement, émettant une lumière blanche éclatante. La machine entière se mit à trembler violemment, des étincelles jaillissant des câbles. La lumière blanche commença à fusionner avec la lumière rouge de la brèche, comme si les deux énergies entraient en conflit.

Les créatures, prises au milieu de cette bataille énergétique, commencèrent à hurler. Leurs corps se tordaient sous l’effet de la force qui les arrachait de la réalité, se désintégrant progressivement dans un cri strident.

"Cela fonctionne !" cria Léa, son cœur battant à tout rompre.

Mais soudain, une explosion retentit. La machine se mit à fumer, des étincelles volant dans tous les sens. Un des circuits principaux avait brûlé sous la surcharge.

"Non, non, non !" Léa frappa les commandes, désespérée. "Ça ne peut pas s'arrêter maintenant !"

Moreau se précipita vers le circuit endommagé, essayant de reconnecter les câbles à mains nues. "Je peux peut-être le réparer... mais cela va me prendre quelques minutes."

"Nous n’avons pas quelques minutes !" cria Léa, regardant la lumière rouge reprendre de la force, comme si la brèche se refermait sur elle-même pour contre-attaquer.

Les créatures restantes se rapprochaient, plus enragées que jamais. Léa prit une barre métallique au sol et se prépara à défendre Moreau, ses muscles tendus sous l’effort. "Fais vite."

Le temps semblait s'étirer alors que Moreau travaillait en silence, les mains couvertes de sueur et de sang. Chaque seconde qui passait rapprochait les créatures de leur position.

Soudain, la lumière blanche s’intensifia de nouveau. Moreau avait réussi à reconnecter les circuits. "Ça y est !"

Le portail émit un dernier hurlement mécanique avant d'exploser dans une lumière aveuglante. La lumière blanche engloutit tout, fusionnant avec la brèche rouge dans une explosion de couleurs et de sons assourdissants. Léa ferma les yeux, se protégeant le visage tandis que la force de l'explosion la projetait en arrière.

Puis, tout devint silencieux.

Léa ouvrit les yeux, éblouie par la lumière. Autour d’elle, il n’y avait plus rien. Les créatures avaient disparu, et la lumière rouge de la brèche s’était éteinte. La salle était en ruine, fumante, mais intacte. La brèche avait été refermée.

Elle se tourna vers Moreau, qui était allongé sur le sol, immobile.

"Moreau ?" appela-t-elle d’une voix tremblante, s’approchant de lui. Elle secoua doucement son épaule.

Il ne bougea pas. Un filet de sang coulait de son front, mais son visage semblait apaisé.

Léa tomba à genoux à côté de lui, ses yeux remplis de larmes. Ils avaient réussi. Mais le prix à payer avait été bien trop élevé.

Elle se releva lentement, jetant un dernier regard à la salle ravagée. La brèche était refermée, mais elle savait que ce n’était que le début. Ce qu’ils avaient affronté n’était qu’un avant-goût des ténèbres qui rôdaient de l’autre côté.

Léa inspira profondément. Elle était la dernière survivante, mais elle ne se laisserait pas abattre. Ce combat n’était pas terminé.

Et elle était prête à affronter ce qui viendrait ensuite.

Sous la PeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant