Léa avançait dans le couloir, son pas rapide résonnant contre les murs froids de la clinique. Elle venait de quitter le bureau du Dr. Moreau, son esprit alourdi par les révélations qu’elle venait d’entendre. Une forme de vie... Comment une telle chose était-elle possible ? Comment avait-elle pu échapper aux radars de la communauté scientifique ? Et surtout, combien de temps cela pouvait-il continuer sans que tout ne dégénère ?
La vérité, maintenant, semblait bien plus sombre que ce qu’elle aurait pu imaginer. Léa se sentait prise au piège entre sa volonté de comprendre ce phénomène incroyable et son instinct qui lui criait de fuir le plus loin possible.
Arrivée à l’entrée de l’aile où se trouvaient les patients en observation, elle s’arrêta un instant, tentant de rassembler ses pensées. L’atmosphère était encore plus pesante que d’habitude. Le silence était oppressant, comme si la clinique entière retenait son souffle.
Elle passa la porte menant à la chambre de M. Verdier. Ses pas ralentirent à mesure qu’elle approchait, son esprit rempli d’une nouvelle question : était-elle en danger ? Avait-elle été exposée à cette "forme de vie" en s’occupant des patients, en étant si proche de ces transformations ? Mais plus elle réfléchissait, plus elle se rendait compte qu’il était trop tard pour se poser cette question. Elle était déjà plongée dans cet enfer, et il n’y avait plus de retour en arrière.
Elle ouvrit la porte de la chambre de M. Verdier doucement, comme pour ne pas perturber le calme lourd qui régnait. Le patient était là, assis dans son lit, le regard fixé sur la fenêtre. À première vue, il semblait paisible, presque détaché du monde. Mais Léa savait maintenant qu’il se passait bien plus sous la surface.
"Vous êtes revenue," dit-il, sans même tourner la tête. Sa voix était étrangement calme, comme s'il savait qu'elle reviendrait.
Léa referma la porte derrière elle. "Je sais ce qui se passe," répondit-elle doucement. "Je sais pour… ce qui vous habite."
M. Verdier hocha la tête lentement, son visage toujours tourné vers l'extérieur. "Je l’ai senti depuis le début. Mais maintenant, c’est différent. Ça devient plus fort."
Léa s’approcha de lui, essayant de masquer l’angoisse qui commençait à grandir en elle. "Comment ça plus fort ?"
Il se tourna enfin vers elle, et elle remarqua quelque chose de différent dans son regard. Ce n’était pas de la peur, ni de la douleur, mais quelque chose d’autre… quelque chose de plus sombre.
"Cela communique avec moi," dit-il d’une voix basse, presque un murmure. "Au début, c’était juste des sensations. Une pression sous la peau. Mais maintenant, je peux entendre ses pensées, comme des murmures dans ma tête."
Léa sentit son cœur se serrer. C’était pire que tout ce qu’elle aurait pu imaginer. "Est-ce qu’il vous contrôle ?" demanda-t-elle, la gorge nouée.
M. Verdier secoua lentement la tête. "Pas encore. Mais je sens qu’il essaie. Il se renforce, il apprend de moi, et je… je me sens de plus en plus faible."
Léa serra ses poings. Le Dr. Moreau avait parlé d’une forme de vie intelligente, mais il n’avait pas mentionné que cela pouvait en venir à contrôler ses hôtes. Si c’était vrai, alors ils étaient tous en grand danger.
"Il doit y avoir un moyen de stopper ça," dit-elle, désespérée. "Le Dr. Moreau travaille sur une solution. Il ne peut pas laisser cela continuer."
M. Verdier la regarda intensément. "Vous ne comprenez pas, Léa. Ce n’est pas juste une question de trouver un remède. Ce qui est en nous, ce qui me contrôle lentement, est bien plus puissant que nous ne le pensons. Il ne se contente pas de survivre… il évolue. Chaque minute qui passe, il devient plus fort, plus intelligent."
Léa sentit son estomac se nouer. Ce n’était plus une simple affaire médicale. C’était quelque chose de plus… presque surnaturel. "Comment le savez-vous ?" demanda-t-elle, sa voix tremblante.
M. Verdier baissa les yeux, comme s’il réfléchissait à la meilleure façon de répondre. "Je le sens," murmura-t-il. "Je le sens me changer. Ce n’est plus seulement mon corps… c’est mon esprit. Et bientôt, je ne serai plus moi."
Léa recula instinctivement, la peur lui coupant le souffle. Elle réalisa qu’elle n’était peut-être pas en sécurité ici. Non pas seulement à cause de la clinique ou des autres patients, mais à cause de ce qui grandissait en M. Verdier… et peut-être dans d’autres.
"Vous devez partir," dit-il soudain, sa voix brusquement plus ferme. "Avant qu’il ne soit trop tard. Quittez cet endroit, avant que vous ne soyez aussi… contaminée."
Léa voulut protester, dire qu’elle ne pouvait pas simplement abandonner les patients, mais quelque chose dans les yeux de M. Verdier l’en dissuada. Il savait qu’il n’y avait plus rien à faire pour lui. Peut-être pour aucun d’entre eux.
Mais avant qu’elle ne puisse répondre, un bruit sourd résonna dans le couloir. Un bruit lourd, presque métallique, comme si quelque chose frappait contre les murs.
M. Verdier se crispa. "Ils arrivent," murmura-t-il.
Léa se tourna vers la porte, son cœur battant à tout rompre. "Qui ?"
"Les autres," répondit M. Verdier d’une voix tremblante. "Ils sont déjà perdus."
Léa n’eut pas le temps de réagir. La porte s’ouvrit brusquement, et deux infirmiers pénétrèrent dans la pièce, suivis par le Dr. Moreau. Ils semblaient nerveux, presque terrifiés.
"Léa, sortez de cette pièce, immédiatement," ordonna le Dr. Moreau, son visage pâle et tendu.
"Qu’est-ce qui se passe ?" demanda-t-elle, son regard allant de Moreau à M. Verdier, qui restait silencieux.
"Il est temps de procéder à l’isolement," répondit sèchement le docteur. "M. Verdier et les autres ne peuvent plus rester en contact avec le personnel non essentiel."
Léa sentit un frisson glacé lui parcourir la nuque. "Vous allez les enfermer ?"
"C’est nécessaire," répondit le Dr. Moreau, évitant soigneusement son regard. "Pour la sécurité de tous."
M. Verdier poussa un faible rire, un son triste et résigné. "Il est trop tard pour ça, docteur."
Le Dr. Moreau le fixa un instant, puis se tourna à nouveau vers Léa. "Sortez, maintenant."
Léa hésita, mais quelque chose dans le ton du Dr. Moreau lui fit comprendre qu’elle n’avait pas le choix. Elle jeta un dernier coup d'œil à M. Verdier, dont le visage était désormais marqué par une étrange sérénité. Puis elle tourna les talons et sortit de la pièce.
Dans le couloir, elle vit d’autres patients être emmenés dans leurs chambres, les portes se fermant derrière eux avec un claquement sinistre. La clinique Saint-Esprit ressemblait de plus en plus à une prison.
Le Dr. Moreau referma la porte de la chambre de M. Verdier derrière lui et se tourna vers Léa, son regard dur. "Vous devez partir, Léa. Quittez la clinique pour aujourd'hui. Nous reprendrons demain."
Léa ouvrit la bouche pour protester, mais elle vit l’expression du Dr. Moreau, pleine de détermination et de peur dissimulée. Sans un mot de plus, elle se détourna et commença à marcher vers la sortie. Mais au fond d’elle, elle savait que quelque chose d’irréversible venait de se produire.
Alors qu’elle franchissait les portes de la clinique, la brume matinale enveloppant l’entrée semblait l’accueillir dans un monde nouveau, un monde où elle n’était plus certaine de pouvoir revenir.
Mais elle savait qu'elle reviendrait. Elle devait comprendre, peu importe le prix.
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Sous la Peau
HorrorSous la surface parfaite de notre monde, quelque chose de terrifiant se cache... Quand Léa, une jeune étudiante en médecine, accepte un stage dans une clinique isolée en montagne, elle pense avoir trouvé l'opportunité idéale pour booster sa carrière...