Léa plongea ses yeux dans la petite fissure rougeâtre, hypnotisée par la faible lueur qui émanait encore du sol. Le silence dans la pièce était total, mais elle sentait la présence d’une force plus ancienne et plus puissante qu’elle n’avait jamais imaginée. Ce n’était pas seulement une brèche entre les dimensions. C’était une porte vers quelque chose de plus sombre, de plus profond.
Le monde autour d’elle semblait se figer. L’air devenait lourd, presque irrespirable. Léa savait que si elle restait immobile, cette faille grandirait à nouveau et ramènerait avec elle des créatures bien plus terrifiantes que celles qu’elle avait déjà affrontées.
Elle prit une profonde inspiration et ferma les yeux, cherchant à rassembler tout le courage qu’il lui restait. Elle n’avait plus d’alliés, plus de technologie. Tout ce qu’elle avait, c’était elle-même et une détermination implacable à empêcher cette catastrophe de se produire.
Soudain, une voix douce et presque imperceptible murmura dans son esprit.
"Tu ne peux pas fuir... Tu ne peux pas fermer ce qui est déjà ouvert…"
Léa sursauta, regardant autour d’elle. Il n’y avait personne dans la pièce, et pourtant, la voix était claire, résonnant dans sa tête comme un écho venu d’un endroit lointain.
"Qui est là ?" demanda-t-elle, sa voix se brisant sous la tension.
"Nous sommes toujours là... Nous attendons, Léa... Depuis si longtemps..."
Elle recula d’un pas, son cœur battant à tout rompre. Cette présence n’était pas étrangère. C’était comme si la brèche elle-même, ou ce qu’elle contenait, tentait de la manipuler, de l’attirer plus près.
Léa secoua la tête, refusant de se laisser prendre au piège de cette voix. "Je ne suis pas à vous. Je ne vous appartiens pas !"
Un rire faible, presque méprisant, résonna dans son esprit, suivi d’un murmure qui la glaça jusqu’aux os.
"Mais tu l’es déjà, Léa. Depuis le début."
Elle sentit soudain une force l’attirer vers la fissure. Le sol semblait se tordre sous ses pieds, comme si la réalité elle-même était en train de s'effondrer. Le bruit d’un craquement sourd résonna dans la pièce, et avant qu’elle ne puisse réagir, le sol sous elle céda.
Léa tomba.
La chute fut rapide, violente, et son estomac se serra alors que le monde autour d’elle se transformait en un tourbillon d’obscurité. Elle n’avait plus aucune prise, aucune idée d’où elle allait atterrir. Le noir complet l’engloutit, et elle se retrouva suspendue dans un vide infini, incapable de crier, incapable de respirer.
Puis, elle toucha le sol.
L’impact fut brutal, mais étrangement, elle ne ressentit aucune douleur. Léa ouvrit lentement les yeux et découvrit qu’elle se trouvait dans un lieu qu’elle ne pouvait même pas décrire. Autour d’elle, le ciel n’était ni bleu ni noir, mais une teinte mouvante de rouge et de violet. Le sol, quant à lui, semblait composé de matière organique, comme si elle marchait sur une surface vivante.
Des silhouettes indistinctes dansaient dans les ombres, se mouvant comme des spectres, toujours juste au bord de sa vision.
"Qu’est-ce que c’est ?" murmura-t-elle, sa voix étouffée par l’atmosphère oppressante.
"C'est ici que tout commence et que tout finit," répondit la voix, désormais plus forte, plus claire. "Tu es au seuil de l’Abysse, Léa. Là où nous habitons. Là où nous attendons depuis des éons."
Léa sentit ses jambes trembler. Elle ne comprenait pas tout ce que la voix disait, mais elle savait qu’elle était face à quelque chose d’incommensurablement plus grand qu’elle. Un mal ancien, quelque chose qui avait toujours été là, attendant patiemment que quelqu’un ouvre la porte.
"Je vais refermer cette brèche," dit-elle, plus pour se convaincre elle-même que pour répondre à la voix. "Vous ne prendrez pas ce monde."
La voix sembla sourire dans son esprit.
"Tu es bien plus courageuse que ceux qui sont venus avant toi... mais tout courage a une limite."
Léa serra les poings, refusant de céder. Elle devait trouver un moyen. Quelque part, au fond d’elle, elle savait qu’il existait une solution. Une manière d’en finir avec cette menace une fois pour toutes.
Les silhouettes dans l’ombre commencèrent à s’approcher, lentement. Léa pouvait sentir leur présence, comme des vagues d’énergie noire s’écrasant contre elle. Elles murmuraient des mots qu’elle ne pouvait pas comprendre, mais elle savait qu’elles la cherchaient, qu’elles la voulaient.
"Non," souffla-t-elle, reculant instinctivement. "Je ne vous laisserai pas gagner."
Alors qu’elle reculait, son pied heurta quelque chose de dur. Elle se tourna rapidement et vit une étrange pierre, luisante d'une faible lumière blanche. C’était la première fois depuis qu’elle était arrivée ici qu’elle voyait quelque chose d’aussi lumineux. Sans réfléchir, elle s’accroupit et prit la pierre dans ses mains.
Instantanément, une chaleur réconfortante l’envahit. La lumière de la pierre grandit, repoussant les ombres autour d’elle. Les murmures cessèrent, et les silhouettes reculèrent, comme si elles craignaient cette nouvelle force.
"Impossible..." murmura la voix, cette fois avec une pointe de crainte. "Tu ne peux pas..."
Mais Léa sentait le pouvoir de la pierre dans ses mains. C’était une énergie ancienne, aussi vieille que celle de l’Abysse, mais d’une nature différente. Une force de création, de lumière, opposée aux ténèbres qui l’avaient entourée.
"Je vais refermer cette brèche," dit-elle à voix haute, cette fois avec une conviction absolue.
Elle leva la pierre au-dessus de sa tête, et la lumière éclata, remplissant tout autour d’elle. Les silhouettes hurlèrent, leurs corps se dissolvant dans la lumière, et l’espace même de l’Abysse sembla se fissurer.
Le monde autour d’elle commença à trembler. Les murs de cette dimension alternative s’effondraient, et Léa savait que c’était sa chance. Elle concentra toute son énergie sur la brèche, sur cette cicatrice rouge qu’elle avait vue, et avec un ultime effort, elle plongea la pierre dans le sol.
Une explosion de lumière blanche engloutit tout.
Quand elle rouvrit les yeux, Léa se retrouvait à nouveau dans la clinique. Le sol était intact, les débris n’étaient plus qu’un souvenir lointain. La brèche avait disparu. Il n’y avait plus de lumière rouge, plus de murmures, plus de créatures.
Tout était calme.
Elle se laissa tomber à genoux, épuisée, mais soulagée. C’était fini. Pour de bon, cette fois.
Le monde était enfin en sécurité, et Léa, bien que brisée, avait tenu bon jusqu’au bout.
VOUS LISEZ
Sous la Peau
HorrorSous la surface parfaite de notre monde, quelque chose de terrifiant se cache... Quand Léa, une jeune étudiante en médecine, accepte un stage dans une clinique isolée en montagne, elle pense avoir trouvé l'opportunité idéale pour booster sa carrière...