Chapitre 10 : Fuir l'Inéluctable

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Léa et le Dr. Moreau se précipitèrent dans le couloir sombre, leurs pas résonnant comme une alarme dans l’immense clinique désormais silencieuse. Tout semblait figé, comme si le bâtiment entier retenait son souffle. Les lumières vacillantes projetaient des ombres grotesques sur les murs, des ombres qui, à chaque instant, semblaient se tordre et prendre vie.

"Nous devons sortir d’ici avant qu’elles ne se réveillent," murmura le Dr. Moreau, son visage marqué par l'épuisement et la peur.

"Il y en a d’autres ?" demanda Léa, essayant de ne pas céder à la panique qui montait en elle.

Le Dr. Moreau hocha la tête. "Oui. Plusieurs patients sont déjà infectés. Certains montrent des signes de contrôle, mais d’autres… d’autres sont comme celui que nous avons affronté. Ils ne sont plus humains."

"Alors pourquoi n’avez-vous pas tout arrêté plus tôt ?" demanda Léa, ses mots percutant le silence du couloir comme des coups de marteau. "Vous saviez que c’était dangereux. Vous avez vu ce qui se passait, et vous avez laissé faire."

Moreau soupira, son regard se perdant dans le vide. "Nous pensions pouvoir les comprendre, les maîtriser. La science nous rend souvent arrogants, Léa. Nous voulions repousser les limites, explorer l’inconnu. Mais nous avons ouvert une porte que nous ne pouvions plus refermer."

Ils atteignirent enfin l’escalier menant aux sous-sols de la clinique. Selon Moreau, c’était là que se trouvait la sortie la moins surveillée. Ils devaient se dépêcher, car il savait que la tranquillité ne durerait pas. Les créatures sous les peaux des patients ne resteraient pas endormies pour longtemps.

Alors qu’ils descendaient les marches en pierre froide, une sensation oppressante s’intensifiait. Chaque pas résonnait comme un compte à rebours, chaque seconde les rapprochait de quelque chose d’indéfinissable, de monstrueux.

Ils atteignirent enfin les sous-sols, un vaste dédale de couloirs sombres et humides. L’odeur de moisissure et de désinfection brûlait leurs narines, mais ils n’avaient pas le temps de se concentrer sur l’environnement. La sortie était encore loin.

"Par ici," murmura Moreau, guidant Léa à travers un autre couloir étroit.

Soudain, un bruit sourd résonna derrière eux. Un raclement, comme des griffes contre du métal. Léa s’immobilisa, le souffle coupé. Elle tourna lentement la tête, et ses yeux se posèrent sur une silhouette tapie dans l’ombre, au fond du couloir.

C’était une autre créature.

Elle était plus grande, plus monstrueuse que celle qu’ils avaient affrontée plus tôt. Sa peau était déchirée, laissant entrevoir une masse grouillante de tentacules et de muscles distordus sous sa chair. Ses yeux, d’un noir insondable, brillaient d’une faim insatiable.

"Courez !" cria Moreau, prenant Léa par le bras.

Ils se mirent à courir à toute vitesse, leurs pieds glissant parfois sur le sol humide. Derrière eux, la créature grognait, ses pas lourds et bestiaux résonnant comme des coups de tonnerre dans les couloirs. Léa sentait son souffle se raccourcir, la panique nouant ses entrailles. Ils ne pouvaient pas échapper à cette chose. Elle était trop rapide, trop implacable.

Moreau tourna brusquement dans un couloir latéral, et Léa le suivit de justesse. Ils débouchèrent dans une salle de stockage remplie de vieilles machines et d’équipements abandonnés. Moreau attrapa un lourd chariot métallique et le poussa contre la porte, essayant de la bloquer.

"Ça ne tiendra pas longtemps," souffla-t-il, essoufflé. "On doit trouver une autre sortie."

Léa, elle, cherchait frénétiquement dans la pièce. Il devait y avoir un moyen de se défendre, quelque chose qu’ils pouvaient utiliser pour ralentir la créature. Ses yeux se posèrent sur une vieille trousse d’urgence fixée au mur. Elle l’ouvrit rapidement et trouva un scalpel rouillé, une arme dérisoire face à l’horreur qui les poursuivait.

La porte se mit à trembler sous les coups puissants de la créature. Elle grognait, déchirant le métal et poussant des râles monstrueux. Chaque impact rapprochait un peu plus la fin.

Léa recula, sentant l’étau de la terreur se resserrer autour d’elle. Elle ne voulait pas mourir ici, dévorée par cette chose. Ses pensées tourbillonnaient, cherchant désespérément une solution.

"Il doit y avoir une sortie d’air, un conduit…" murmura-t-elle.

Moreau chercha à son tour, ses yeux s’arrêtant sur une grille en hauteur, près du plafond. "Là !"

Ils se précipitèrent vers la grille. Moreau grimpa sur une pile de caisses pour l’atteindre et commença à la dévisser à mains nues. Ses doigts tremblaient, et la grille semblait résister à chaque mouvement.

Derrière eux, la porte céda enfin, et la créature entra dans la pièce, sa silhouette massive se découpant dans l’obscurité.

"Vite !" hurla Léa.

Moreau arracha finalement la grille et s’engouffra dans le conduit, tendant la main à Léa pour l’aider à monter. Elle saisit sa main et se hissa dans le conduit étroit, juste à temps. La créature bondit vers eux, mais ses griffes ne firent que frôler les pieds de Léa avant qu’elle ne disparaisse dans le conduit.

Ils ramperent à toute vitesse, leurs corps pressés dans l’espace exigu. Derrière eux, la créature poussait des grognements furieux, incapable de les suivre dans le conduit trop étroit pour elle. Léa sentait néanmoins son souffle derrière elle, comme une menace constante qui les poursuivait.

Le conduit s’ouvrit finalement sur une petite pièce technique. Ils tombèrent lourdement sur le sol, épuisés mais vivants. Léa se releva en titubant, son cœur battant encore à toute vitesse.

"Nous devons continuer," dit Moreau d’une voix rauque. "La sortie est juste devant."

Ils se relevèrent tous les deux et ouvrirent une autre porte qui menait à l’extérieur. L’air froid de la nuit les enveloppa, et Léa sentit une vague de soulagement la submerger. Ils étaient enfin sortis.

Mais alors qu’ils avançaient prudemment dans la cour déserte, un bruit sinistre s’éleva du bâtiment derrière eux. Les créatures n’avaient pas abandonné. Elles étaient toujours là, et elles viendraient bientôt les chercher.

Léa se tourna vers Moreau, le visage crispé par la détermination. "Nous devons les arrêter. Nous ne pouvons pas simplement fuir."

"Et comment comptes-tu faire ça ?" demanda-t-il, visiblement dépassé par la situation.

Léa fixa le bâtiment de la clinique, sombre et menaçant, avant de répondre : "Nous devons détruire leur source. Ce qu'elles ont laissé derrière elles. Si nous trouvons ce qui les lie à ce monde, nous pourrons peut-être les éradiquer."

Moreau la regarda longuement avant de hocher lentement la tête. "C’est un pari risqué, mais tu as raison. Nous devons essayer. Sinon, elles ne s’arrêteront jamais."

La guerre contre les créatures venait à peine de commencer, et Léa savait que leur seul espoir était de comprendre ce qui les reliait à ce monde avant qu'il ne soit trop tard.

Mais la question demeurait : étaient-ils déjà condamnés à échouer ?

Sous la PeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant