Jardin secret

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Lorsqu'ils arrivèrent au parking du sous-sol, l'imposant SUV noir clignota, signalant aux deux hommes sont emplacement. Ce type de véhicule, souvent choisi par les politiciens pour des déplacements discrets, se distinguait par ses vitres teintées, idéales pour préserver l'intimité.

En s'installant sur le siège passager, Gabriel remarqua la propreté impeccable du véhicule.

- Hum... Ça sent bon, murmura-t-il, fermant les yeux un instant pour apprécier l'atmosphère.

Jordan tourna légèrement la tête vers le plus âgé, son sourire s'illumina en observant la bouille d'ange assise à ses côtés, le visage détendu, comme un moment volé à la frénésie politique.

- En effet, répondit l'autre. On m'a prêté ce véhicule de fonction il y a quelques mois déjà, mais je n'ai pas vraiment eu l'occasion de l'utiliser.

- Je comprends... Avec nos agendas de ministre, on a plus le temps de vivre... confia Gabriel, ses paroles lourdes de sens, trahissant un visage marqué par la fatigue.

- Pourtant, vous êtes ici, Monsieur Attal et si je peux vous offrir ne serait-ce qu'un instant de répit, je le ferai, insista son interlocuteur, son ton empreint de sincérité.

Gabriel ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit, comme si le poids des responsabilités l'empêchait de s'exprimer. Ce moment de silence semblait résumer la lutte constante entre devoir et désir, un dilemme partagé par ceux qui naviguent dans le monde impitoyable de la politique.

*

Après une quinzaine de minutes, le véhicule ralentit, et Jordan se gara devant une imposante clôture végétale. Le trajet, si apaisant, avait presque endormi Gabriel, qui réalisait qu'il était déjà près de 23h. Le murmure du moteur et le doux balancement des rues avaient créé une bulle de tranquillité, loin du tumulte quotidien.

Jordan invita Gabriel à sortir du véhicule et le guida vers l'entrée du parc, dissimulée derrière un épais rideau de feuillage. En passant le seuil, Gabriel resta bouche bée devant cette illusion d'optique. Un simple passant n'aurait jamais pu découvrir ce lieu secret, ce qui le rassura d'autant plus, comme s'ils entraient dans un sanctuaire préservé du monde extérieur. Mais comment Jordan pouvait-il connaître ce type d'endroit.

Silencieux, Jordan d'ordinaire si bavard, paraissait perdu dans ses pensées, l'esprit alourdi par des réflexions invisibles. Ce n'est que lorsque Gabriel se posta soudainement devant lui, l'interrompant dans sa marche, que Jordan émergea de sa torpeur. Un léger frisson traversa l'air, comme si la magie de l'endroit les avait enveloppés d'une nouvelle énergie. L'endroit ressemblait à un jardin surréaliste, où la réalité se dilue et se confond avec le rêve.

- Souhaitez-vous parler de ce qui s'est passé tout à l'heure chez vous monsieur Bardella ? demanda Gabriel d'un ton léger, empreint de sincérité.

- Vous êtes plutôt direct, remarqua le plus jeune en se touchant l'arrière de la tête.

Ce geste ne trompait pas, il était mal à l'aise. Gabriel n'avait pourtant exprimé aucun jugement dans sa voix, bien au contraire, il semblait sincèrement préoccupé. Son visage trahissait une inquiétude subtile. Les ombres des arbres semblaient jouer sur ses traits, soulignant la gravité de la situation.

- Je ne vous force pas à m'expliquer ce qui se passe, mais sachez que je peux être une oreille attentive si vous en sentez le besoin.

Jordan se mordit la lèvre inférieure. Il était touché par l'inquiétude que lui portait le plus âgé. Pourtant, ses pensées revinrent à quelques minutes plus tôt, et il sentit ses muscles se crisper. L'homme en face de lui, attentif à chaque détail, remarqua ce changement et posa délicatement sa main sur son bras, un geste discret mais rempli de présence. Jordan sursauta légèrement.

- Je ne sais pas si je suis prêt à en parler, murmura-t-il, ses yeux évitant ceux de Gabriel.

Leurs regards se croisèrent finalement, et quelque chose d'indicible passa entre eux. Le genre de connexion fragile que seule la nuit, dans un endroit aussi intime, peut permettre. Ils continuèrent à marcher lentement, en silence, l'odeur du feuillage humide flottant dans l'air. On pouvait entendre au loin le chant des grillons, une mélodie naturelle qui accompagnait leur conversation inachevée.

- Parfois, on n'a pas besoin de mots pour comprendre, ajouta Gabriel, presque pour lui-même, comme si cette réflexion venait de traverser son esprit. Il repensa à une toile de Edward Hopper, où la solitude et l'introspection de ses personnages prenaient tout leur sens dans le silence. Ce moment avec Jordan lui rappelait ces scènes énigmatiques.

Ils arrivèrent à une petite clairière, illuminée par une pleine lune qui baignait le parc d'une lueur argentée. C'était comme un autre monde, un refuge où les secrets semblaient moins lourds à porter.

- Peut-être que ce lieu est ce dont j'avais besoin, confia Jordan en levant les yeux vers le ciel étoilé.

Gabriel resta silencieux, respectant le moment. L'atmosphère, à la fois apaisante et chargée d'émotions non dites, les enveloppait tous les deux.

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Note : La suite arrive demain, vous êtes pas prêt ! 🫣

Derrière la façade - Attal & BardellaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant