Chapitre 17 : Quelque chose de fort

Il souleva la bêche au-dessus de sa tête. Porter par le poid de l'embout en métal, elle vint se planter avec force dans le sol humide. La ramenant vers lui, il arracha une motte d'herbe particulièrement résistante. Il était un peu tôt dans la saison pour préparer le terrain pour les semis de l'année prochaine mais il fallait qu'il s'occupe et il recouvrirait le tout avec des tôles, ça évitera que la végétation ne revienne. Faisant saillir les muscles de ses bras, il répéta l'action, mettant toujours plus de cœur à l'ouvrage.

Illétait en colère. Et le travail manuel était la seule manière qu'il connaissait pour se calmer. Oui il était furieux. Et à dire vrai il était furieux d'être furieux. Parce que ça n'aurait pas dû l'atteindre autant. Que Rick n'ait pas donné de nouvelles depuis presque trois jours n'aurait pas dû le mettre dans un tel état de frustration. Il ne devait dépendre de personne et surtout, il ne devait pas laisser quiconque avoir un tel pouvoir sur lui. Le pouvoir de dicter ses émotions par son simple comportement. Pourtant il était sept heures du matin et il était en train de bêcher le sol parce qu'il avait déjà fini toutes ses tâches de la journée. Sa nuit avait été troublée, imaginant les pires scénarios possibles. Tout autant Rick retrouvé mort dans un fossé ou s'étant rendu compte que fréquenter un Dixon n'était pas une bonne chose et s'empressant de couper tout contact avec lui.

Alors il s'était levé tôt et pour ne pas trop penser, il s'était mis au boulot. Sauf qu'il n'arrivait pas à grand-chose. Les corvées habituelles pour lesquelles il n'avait plus besoin de réfléchir depuis longtemps, ça, ça allait, mais en ce qui concernait la chasse ou la mécanique, il n'était plus bon à rien.

En temps normal, même s' il ne se voyait pas, Rick trouvait toujours un prétexte pour le contacter tous les jours. Comme les lignes téléphoniques n'allaient pas jusqu'à chez les Dixon, il lui avait laissé un talkie Walkie réglé sur la bonne fréquence. Et tous les jours il le contactait, un peu après le dîner et trouvait quelque chose à lui dire. Et puis... On était en début de semaine, et normalement, c'était durant cette période que Rick restait chez Daryl, sans vraiment de raison certe, mais aucun d'eux n'avait remis en cause le fait qu'il dorme toujours ici la moitié de la semaine. Le cœur de Daryl battait douloureusement. Il savait qu'il n'aurait pas dû le laisser entrer autant dans sa vie. Il était bien mieux tout seul. Parce que maintenant il avait constamment l'angoisse latente qu'il l'abandonne et c'était en train d'arriver. Finalement il ne s'était pas trompé. Il avait toujours sû que leur amitié improbable se terminerait de façon abrupte un jour ou l'autre. Mais le savoir ne rendait pas la chose moins difficile.

Daryl resta dans ces sombres pensées jusqu'au milieu de matinée. Jusqu'à ce qu'il entende le bruit de moteur provenant de la cour. Il vit Rick descendre de sa voiture de fonction et si sa première envie avait été de l'engueuler, en voyant son visage, il s'était ravisé. Il était évident qu'il s'était passé quelque chose.

Ils se dévisagèrent un moment sans vraiment oser parler.

-T'aurais au moins pû me dire que t'étais pas mort.

-Tu t'inquiètais pour moi ? Le taquina Rick, mais en voyant le regard sérieux qui lui répondait, il n'avait plus vraiment envie de rire. En fait, il était épuisé.

-Je suis désolé. Reprit il. Est ce que tu veux bien me laisser t'expliquer...

Daryl se rendant compte qu'il agissait de manière un peu trop autoritaire, décroisa les bras de sur sa poitrine et c'est dans un souffle qu'il répondit.

-Tu m'dois rien...

-Peut être... Mais j'ai envie... J'ai besoin d'en parler... Et t'es le seul qui m'écoutera. Personne ne voudra me croire.

Fuyards Où les histoires vivent. Découvrez maintenant