XXII. Levi

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Elle ne semble pas avoir compris le mémo.

Je suis enfin autorisé à jouer. La psy du lycée a donné le feu vert au coach et je suis impatient de fouler la glace. D'ailleurs, juste avant le match, Grabel nous fait son éternel speech, nous donnant les derniers conseils. Je termine de lacer mes patins et attrape mon casque tandis que tous mes coéquipiers se rassemblent autour de moi. Jude, le co-capitaine, commence à hurler notre cri de guerre alors que tous nos casques entrent en contact.

— ON EST QUI ? demande-t-il.

— DES LYNX, répondons-nous en chœur.

— ON EST QUI ?

— DES LYNX.

— QU'EST-CE QU'ON VA FAIRE ?

— GAGNER !

— J'AI PAS ENTENDU,QU'EST-CE QU'ON VA FAIRE ?

— GAGNER ! hurlons-nous une dernière fois avant de se reculer.

— Rendez-moi fière les gars, réplique le coach assistant avant d'ouvrir la porte du vestiaire pour que nous puissions sortir.

Il nous donne une tape sur l'épaule à chacun pour nous souhaiter bonne chance tandis que nous rejoignons la glace. La musique commence à résonner tandis que nous pénétrons sur le terrain. Je patine jusqu'à ma zone au centre et je regarde de chaque côté. Jude et Rudy sont derrière moi tandis que je me mets en position pour le coup d'envoi. Ma crosse baissée, j'attends que l'arbitre arrive à notre niveau avec le palet. Je ne lève pas les yeux vers le joueur adverse qui se place face à moi et me concentre uniquement sur ma position et la rondelle. L'arbitre nous observe tour à tour avant de la laisser tomber entre nous. Je tends vivement ma crosse et remporte le face-à-face avant de m'élancer. Jude récupère le puck puis le passe à Jessee qui patine jusqu'à la ligne bleue, où il le renvoie à Jude. Un des joueurs tente de me bloquer, mais je suis plus rapide que lui et je parviens à me démarquer le temps que mon coéquipier m'envoie la rondelle. Je la soulève sur la lame de ma crosse et me dirige vers la droite, avant de le ramener à gauche. Je traverse le milieu de la piste et remarque que le gardien sort légèrement de son but, avant de reculer un peu quand j'arrive sur lui. Aussitôt, mon cerveau analyse tous les mouvements que je peux faire et, je sais exactement où je dois envoyer le palet pour marquer. Il se courbe en avant, pensant que je vais tirer entre ses jambes, me laissant ainsi une marge de manœuvre encore plus grande, ce qui me fait sourire derrière mon casque. J'incline donc mon poignet et lève un peu la rondelle, qui est propulsé par-dessus son épaule et retombe au fond du filet, marquant le premier but de la soirée. Je lève ma crosse dans les airs et reviens vers le banc où je donne une tape dans la main de mes coéquipiers.

Nous gagnons le match de deux points et je sens un poids s'alléger sur mes épaules

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Nous gagnons le match de deux points et je sens un poids s'alléger sur mes épaules. Mes camarades tape mon épaule pour me féliciter des trois buts que j'ai marqués ce soir et j'ai même le droit à hochement fier de la part du coach. Je termine de retirer mon équipement, puis attrape ma serviette ainsi que ma trousse de toilette avant de me diriger vers les douches. Je laisse l'eau chaude apaiser mes muscles tendus avant de me laver et de rejoindre mes potes. Nous sommes censés aller au Joey's, l'un des bars sportif de la ville et en quelque sorte notre QG, mais je ne suis pas très motivé. Toutefois, je me force a y aller afin de reprendre une vie sociale à peu près normale et, après quelques verres de bières, je ne regrette pas d'être là.

Du moins, jusqu'à ce qu'un groupe de filles entre dans le bar. Je reconnais immédiatement la clique d'Astéria, mais je suis surprise de découvrir Minh parmi elles. Jamais je n'aurais cru qu'elle soit du genre à traîner avec les patineuses, or, il semblerait que je me sois trompé. La voir ici me rappelle que celle qui est censée être sa meilleure amie est enfermée chez elle et refuse de voir qui que ce soit, et je sens la colère bouillir dans mes veines. Surtout lorsque l'aînée des Barker apparaît à son tour, vêtue d'une robe qui lui arrive à mi-cuisse. Ses cheveux roux sont lâchés dans son dos et son maquillage est beaucoup plus sobre que d'habitude. Elle est sexy, il n'y a aucun doute là-dessus et mes potes le savent puisqu'ils la regardent comme des foutus poissons, mais pour ma part, sa présence ne m'apporte rien d'autre qu'une fureur sans nom.

Je me demande même comment j'ai fait pour rester avec elle pendant presque un an. Maintenant, elle ne m'inspire que du dégoût et plus elle reste loin de moi, mieux je me porte. Toutefois, elle ne semble pas avoir compris le mémo, puisqu'elle s'approche de notre table, un sourire aguicheur aux lèvres. Son regard ne quitte pas le mien, or je l'ignore en beauté pour me concentrer sur mon portable où je remarque que j'ai reçu un message. Le numéro m'est inconnu, mais quand je lis le contenu du SMS je comprends qu'il s'agit de Paloma.

Nous ne nous sommes pas reparler depuis la fois où elle est venue me demander l'adresse d'Atlas, alors je suis assez surpris de voir qu'elle me félicite pour le match de ce soir. Je la remercie et hésite pendant un instant à lui demander si elle a pu voir la musicienne, mais je me retiens pour le moment. Je meurs d'envie d'aller chez elle et de la serrer dans mes bras, or, c'est impossible.

Du coup, je repose mon téléphone sur la table et discute avec mes potes pendant encore une heure avant de quitter le bar. Évidemment, quitter cet endroit sans que mon ex le remarque aurait été trop beau et, à peine ai-je fait un pas dans la rue, que sa voix résonne dans mon dos. Je soupire et passe une main sur mon visage pour me donner contenance puis me tourne vers elle. Après tout, je ne peux pas l'ignorer indéfiniment puisque nous avons le même cercle d'amis et nous allons dans le même lycée. Cependant, j'aurais apprécié qu'elle se trouve une nouvelle obsession.

— Qu'est-ce que tu veux, Astéria ? demandé-je d'un ton lasse.

— Comment tu vas ? questionne-t-elle en me faisant ses yeux de biche.

— À ton avis ?

— Écoute, je sais que j'ai fait des choses qui ne t'ont pas plu, mais je tenais à m'excuser, dit-elle, ce qui me surprend grandement.

De toute l'année que nous avons passée en couple, je ne l'ai jamais entendu une seule fois s'excuser auprès de n'importe qui, pas même de moi.

— N'ai pas l'air aussi surpris, c'est vexant, reprend-elle en croisant ses bras sur sa poitrine.

— T'es mourante ? répliqué-je en sentant l'entourloupe à plein nez.

— Non, mais je...

Elle souffle et glisse une main dans sa tignasse flamboyante, toutefois pas autant que celle de sa sœur, et plonge son regard dans le mien.

— Je veux que les choses redeviennent comme avant.

— Sauf que c'est impossible, réponds-je. Plus rien ne sera comme avant, ni toi, ni moi, ni nous.

Ce que je viens de dire ne lui vient pas, puisqu'une grimace barre son visage de poupée, et ses yeux transpirent la jalousie. Là, il n'a pas fallu longtemps pour que la docile Astéria redevienne ce qu'elle est vraiment, une vipère sournoise.

— Tu penses toujours à elle, pas vrai ? crache-t-elle.

— Ce ne sont pas tes affaires, Astéria, grogné-je en lui tournant le dos.

— Je me demande comment tu réagirais si tu apprenais que ta précieuse Atlas n'est pas ce qu'elle prétend être. Je me demande même quelle tête tu aurais si tu avais vent de ses sorties nocturnes pour se bourrer la gueule avec les gens de son espèce !

Je m'arrête net en entendant ces mots et je serre les poings tout en me remémorant que frapper une femme, c'est mal. Pourtant, lui faire ravaler son air hautain et méprisant est tentant.

— Oups, ajoute-t-elle, pas le moins du monde désolée. Je crois que j'ai vendu la mèche.

— Qu'est-ce que tu entends par « les gens de son espèce » ? grondé-je en me retournant vers elle.

— Évidemment, tu n'as retenu que cette partie-là, dit-elle avec un rire jaune. À ton avis, de quelle espèce je parle ? Les meurtriers, naturellement.

Let's Play a GameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant