Chapitre 6

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                                     Elira
Aujourd'hui c'est le jour des visites.
Les murs froids de la prison semblaient encore plus sombres ce jour-là. Assise dans la petite salle de visite, j'attendais nerveusement. Ce n'était pas facile de le revoir ici, dans ce contexte, avec tout ce que cela impliquait. La porte s'ouvrit enfin, et Andrick entra. Son visage était grave, ses yeux fatigués, comme si tout le poids de mes erreurs pesait aussi sur lui.

Il prit place en face de moi, et pendant un instant, il ne dit rien. Ses yeux, que j'avais toujours connus empreints de chaleur, étaient maintenant remplis de tristesse et de regrets. J'avalai difficilement ma salive, essayant de contenir les larmes qui menaçaient de couler.

-Elira... murmura-t-il finalement, sa voix presque cassée.

Je sentis mon cœur se serrer. Cet homme, c'était plus qu'un avocat pour moi. Depuis toujours, il avait été là. Il avait été un ami pour maman, et pour moi, il avait été un père, un protecteur, une source d'inspiration. Le voir aussi abattu me faisait plus mal que tout ce que je vivais ici.

-Je suis tellement désolé, Elira, continua-t-il, ses mains serrées l'une contre l'autre, comme pour contrôler son tremblement. Je... je n'ai pas réussi à te défendre comme j'aurais dû. J'aurais dû faire plus, trouver un moyen de te sauver...

J'entendis son souffle se briser, et je ne pus retenir mes larmes plus longtemps. Mais au lieu de lui en vouloir, c'était une tristesse immense qui m'envahissait. Je savais qu'il avait fait tout ce qu'il pouvait. Andrick m'avait toujours protégée, s'était toujours battu pour moi. Si j'étais là aujourd'hui, ce n'était pas sa faute. C'était moi, moi et mes erreurs.

-Andrick... dis-je en étouffant un sanglot. Tu as fait tout ce que tu pouvais, je le sais. Tu n'as pas à t'en vouloir.

Il secoua la tête, comme pour rejeter mes mots, ses yeux s'emplissant de larmes à leur tour.
-Non, Elira. Je suis ton avocat, mais plus encore, je suis... Sa voix se brisa, et il détourna le regard. Je suis celui qui aurait dû te protéger, comme un père, comme je l'ai promis à ta mère. Et j'ai échoué.

Ce qu'il venait de dire me bouleversa. Il n'avait jamais prononcé ces mots avant, mais je les avais toujours sentis, cette affection, ce lien. Pour lui, je n'étais pas seulement une cliente ; j'étais la fille de sa meilleure amie, l'enfant qu'il avait vue grandir, qu'il avait voulu guider.

-Andrick, tu es tout pour moi, tu le sais ? murmurai-je en posant ma main sur la vitre froide qui nous séparait. Je t'ai toujours vu comme... comme mon père, même si je ne te l'ai jamais dit. Ce n'est pas de ta faute si je suis ici. J'ai fait mes propres choix, et tu m'as toujours avertie, tu as toujours été là.

Il ferma les yeux un instant, puis posa sa main contre la vitre, là où la mienne se trouvait, comme pour combler la distance entre nous.

-Je ne voulais pas te décevoir, Elira, murmura-t-il, sa voix tremblante. Tout ce que je voulais, c'était honorer la mémoire de ta mère, veiller sur toi comme elle me l'avait demandé.

Ces mots réveillèrent quelque chose en moi, une douleur ancienne, celle de l'absence de ma mère, mais aussi un immense amour pour Andrick, cet homme qui avait tout sacrifié pour m'aider, pour m'épauler.

-Tu ne m'as jamais déçue, dis-je en essuyant mes larmes. Jamais. Je te suis reconnaissante pour tout ce que tu as fait, pour tout ce que tu es.

Nous restâmes là, nos mains contre la vitre, silencieux, enveloppés dans cette tendresse qui avait toujours existé entre nous. Dans cet instant, malgré les murs froids, malgré le poids des échecs, j'avais retrouvé un peu de lumière. Andrick était là, et tant qu'il serait là, je ne serais jamais vraiment seule.

Elira -Cœur en Cavale Où les histoires vivent. Découvrez maintenant