Chapitre 7

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Ali

Je repris mon calme en quittant le couloir, mais l'image d'Elira continuait de me trotter dans l'esprit. Cette scène fugace, ce regard échangé... Je me sentais encore troublé, mais je savais que je devais remettre les pieds sur terre, retourner à mon rôle.

En rejoignant les autres gardiens dans la salle de repos, ils étaient déjà là, en train de parler et de rire entre eux. Dès que j'entrai, l'un d'eux, Benoît, un gars qui aimait bien faire des commentaires déplacés, leva la tête et me lança un sourire narquois.

Benoît était un homme dans la trentaine, avec des cheveux bruns courts et un teint pâle. Son regard moqueur et son attitude provocatrice faisaient de lui quelqu'un qui aimait tester les limites sans jamais aller trop loin.

— Alors, Ali, t'as croisé Elira, la nouvelle ? Je t'ai vu lui jeter un regard. C'est vrai qu'elle est pas mal, hein ?

Je serrai légèrement la mâchoire, mais gardai mon expression neutre. Je n'avais pas envie de rentrer dans leur jeu, mais Benoît continua, avec ce même sourire lourd de sous-entendus.

— Sérieusement, t'as vu ça ? Elle a aussi un bon p'tit cul, faut le dire, ajouta-t-il en riant, et d'autres éclatèrent de rire avec lui.

Je sentis la colère monter en moi, brûlante. Leurs paroles me dégoutaient. Cette façon de parler d'elle, de la réduire à des détails physiques, comme si elle n'était qu'un objet de convoitise dans leurs esprits étroits... Ces mots résonnaient en moi, et je sentais mon cœur battre plus fort. Mais je savais que je ne pouvais pas me laisser emporter. J'avais appris, au fil du temps, à masquer mes émotions, à garder une façade calme.

— Vous feriez bien de vous rappeler que c'est une détenue, rien de plus, rétorquai-je finalement d'un ton sec, sans leur accorder un regard.

Ils rirent un peu moins fort, surpris par mon ton glacial, et je sentis leurs regards se poser sur moi, curieux, peut-être même un peu gênés. Mais aucun d'eux n'osa dire quoi que ce soit de plus. J'enfonçai les mains dans mes poches et sortis de la salle de repos, sans un mot de plus.

Je marchai dans les couloirs pour me calmer, laissant la colère s'évanouir lentement. Je me rappelai le regard d'Elira, cette profondeur que j'avais perçue en elle. Elle n'était pas juste une silhouette pour moi. Elle était bien plus que ce qu'ils voulaient en faire, et je me promis de rester vigilant, de ne pas la laisser être réduite à leurs jugements vulgaires.
             
                                 Elira
Le lendemain matin

Aujourd'hui, un gardien vient nous chercher, moi et Lynda, ma collègue de cellule. On sait déjà ce qui nous attend, le rituel des douches de la prison, cette parenthèse obligatoire, aussi froide que tout le reste ici.

Quand on arrive dans les douches, je ne peux pas m'empêcher de grimacer. Les murs sont en béton brut, gris et sans âme, recouverts par endroits de traces de calcaire et de moisissures. Le sol est en carrelage, glissant et usé par les années. Il y a des rangées de pommeaux de douche, fixés en hauteur, qui crachent de l'eau tiède à peine supportable, souvent plus froide que chaude. Pas de cabines, pas d'intimité, juste ce grand espace à nu, éclairé par une lumière crue qui ne laisse aucun refuge.

Je ferme les yeux un instant sous l'eau glaciale, sentant chaque goutte me réveiller brutalement. Quand je sors enfin, mes cheveux mouillés collent contre mon uniforme, dessinant des traces sombres là où l'eau s'est infiltrée. Le tissu devient froid contre ma peau, mais je n'ai rien pour me sécher correctement. Tant pis.

Elira -Cœur en Cavale Où les histoires vivent. Découvrez maintenant