Chapitre 4

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Willow et maman partent et je me retrouve seule à nouveau. La solitude! Quel pauvre mot qu'on emploie sans vraiment comprendre son sens. Eh bien, je peux vous dire que je l'appréhende, moi, ce mot. Je me sens exclue, différente. J'en ai assez de devoir rester branchée à des machines toute la journée! Je me lève, arrache tout ce qui me rallie à cet hôpital et sort de ma chambre. Je marche distraitement dans les couloirs jusqu'à apercevoir la sortie. Je m'élance vers la liberté quand une voix m'interpelle.

-Mademoiselle Hinata?

Je me retourne et aperçois un grand jeune elfe. Il m'adresse un sourire radieux.

-Oui?

-Vous n'êtes pas autorisée à sortir de l'établissement!

-Qui ça? Moi? Oh, mais vous devez faire erreur, je suis Willow!

-Willow comment?

-Ben Willow, W-i-deux l-o-w...

-Votre nom de famille!

-Ah! Euh, Willow Miyu...

-D'accord, excusez-moi.

Et le médecin s'en retourna aussitôt. Ouf, j'ai eu chaud! Mais il faut absolument que je parte avant que mon identité ne soit réellement découverte... Je rejoins l'air frais du printemps et me dirige directement vers la fin du village, le domaine des bannis. Je marche silencieusement sur les pontons de bois. L'air qui siffle dans mes oreilles me rappelle avec aigreur le son qui m'avait percé les tympans quand je faisais ma crise. Je sens un bon goût de feuille et de fleurs s'infiltrer dans mes narines. Mes yeux s'extasient devant la beauté de la nature, notre mère commune. Je n'aime pas le domaine des bannis vers lequel je me dirige.

C'est l'un des endroits les plus atteints par l'abandon. C'est le lieu où les bannis résident durant leur peine. Car le roi a quand même le devoir de protéger son peuple, malgré leur bannissement. Dans cet endroit, il y a des gens condamnés à perpétuité qui réussissent à survivre grâce à la chasse et qui se divertissent avec les nouveaux bannis. Willow est là-bas. Il faut que je la sorte de là. Il faut que je subisse ma peine. Il ne faut pas qu'ils la tuent. J'accélère le pas à cause de ma dernière pensée. L'air se fait plus frais, le soleil moins présent, les oiseaux plus calmes. Un frisson me parcoure le dos. Je n'aime vraiment pas cet endroit. Le craquement d'une latte de bois me sort de ma torpeur. Je réalise que je n'ai vraiment pas envie d'y aller, mais je suis obligée. Ma raison me crie de partir loin, de courir et de ne jamais revenir dans cet endroit insalubre, mais mon cœur me chuchote de ne pas laisser Willow subir ma peine. Comme toujours, mon cœur prend le dessus. Il vaut mieux écouter son cœur et faire une bonne action plutôt que d'écouter sa raison et regretter par la suite. Je sens que je vais détester mon choix, car je suis déjà arrivée. J'observe le domaine depuis mon perchoir. Je ne vois qu'un gros point noir qui est le refuge. Je descends le long de l'arbre a une vitesse alarmante. Quand je touche le sol, tout le monde se tourne vers moi, joyeux à l'idée d'avoir une nouvelle distraction. Déjà à leur tête, je n'ai aucune envie de sympathiser. Un homme baraqué, couvert de tatouage distinctif de victoires s'avance vers moi. 

-Bienvenue dans le domaine des bannis! s'exclame-t-il.

-Super, et je suis censée sauter de joie? je réponds sèchement.

Tout le monde est muet. Il n'y a que le chant des oiseaux qui réveille la scène.

-Bon, ben comme personne ne bouge, je vais me familiariser avec les lieux...je continue en me dirigeant vers le refuge.

J'arrive devant la grande porte en fer que je pousse en un grincement sonore. Devant moi se tient une table ainsi que quatre chaises, le tout en bois moisi. J'envoie un coup de pied dans un gobelet qui jonche le sol. Il rebondit et vient se loger dans un coin. J'avance dans la semi-obscurité qui règne, évitant plusieurs obstacles tels que des branches cassées ou des carcasses d'animaux. Le fond de la pièce se résume à une porte. Je l'ouvre et arrive devant un escalier en pierre bordé d'une rambarde en métal rouillé. L'entretien des murs laisse franchement à désirer. Les moisissures emplissent chaque fissure tandis que la peinture qui s'écaille par plaques entières laisse apparaître l'édifice de pierres. Une source de lumière provient d'en haut et je m'engage dans l'escalier délabré. Les marches grincent sous mon poids, celui-ci n'étant pourtant pas si conséquent. 

À l'étage se présente une pièce. J'entre et découvre une chambre tout aussi sale que le reste. Il y a un bureau muni d'une chaise qui n'a que trois pieds ainsi qu'une armoire vide, les portes béantes. Un lit est poussé dans un coin et une fenêtre ouverte fait voler de grands draps blancs qui font office de rideaux. Un énorme trou dans le mur donne une vue imprenable sur la forêt. Je m'approche de l'ouverture et remarque que des fils de fers dépassent du mur, malproprement coupés. La crevasse est si grande qu'on dirait qu'un boulet a défoncé cette partie du mur. Je passe la tête dans l'embouchure de l'interstice et remarque qu'il n'y a pas directement le vide. Il y a plusieurs gravats, sûrement des morceaux du mur, qui, en s'entassant, ont formé une plateforme très instable sur laquelle on peut se déplacer. Je remarque Willow assise sur le bout d'un énorme gravat. Ses pieds se balancent dans le vide et elle fixe l'horizon. J'entreprends de la rejoindre le plus discrètement possible, ce qui apparemment, ne fonctionne pas. Dès mon premier pas sur l'amas de pierres, je glisse et entraîne dans ma chute de petits ou grands rochers. Elle se retourne immédiatement et bondit pour me sauver. Elle saute de pierres en pierres avec une agilité surprenante. Alors que je n'ai plus que le seul espoir d'atterrir sur le sol dans le moins de douleurs possible, Willow m'attrape par l'avant-bras.  Plus que quelques mètres me séparaient encore du sol.

-Merci! je souffle. C'était moins une...

Ma sauveuse me soulève et m'aide à m'allonger sur le bord d'un rocher. Là, elle me donne une claque.

-Qu'est-ce qui t'a pris?! me hurle-t-elle. Tu es complètement inconsciente! Tu devais rester couchée pendant encore au moins deux jours! Tu veux crever? 

-De rien, je suis vraiment enchantée de te priver du luxe de cet endroit! je réplique. 













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