Chapitre I

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Il était une fois, une princesse vivant dans un somptueux château... Comme n'importe quel conte, cette histoire aurait dû commencer ainsi. Mais la mienne était loin d'être un conte de fée. Dans la mienne, il n'y avait aucune princesse, aucun prince, aucun château ni de marraine la bonne fée. Il n'y avait pas la moindre magie dans ma vie, du moins jusqu'à cette soirée où tout bascula.

J'arpentais les rues en cette nuit froide. La pleine lune et les étoiles me montraient le chemin à travers l'obscurité. Au loin, je pouvais entendre le clocher de l'église tinter, brisant ainsi ce silence nocturne. Des larmes perlaient sur mes joues gelées par le froid hivernal. La vue brouillée, je discernais à peine les couleurs qui dansaient autour de moi. Pour le dernier mois de l'année, les maisons étaient garnis de décorations toutes plus lumineuses les unes que les autres. Le sol était recouvert d'une fine couche de neige, qui craquait à chacun de mes pas.

Etant petite, j'adorais cette période. Le mois de Décembre était une période magique. Noël était la fête du bonheur, celle qui rendait beaucoup de personnes heureuses. Noël ce n'était pas simplement une journée, c'était aussi les films, les chants, les chocolats chauds, les décorations, les festivités, et tout ce qui allait avec. Cet émerveillement général, cette magie de Noël nous emportant. C'était un moment de partage, en famille.

La famille. C'était quelque chose que je n'avais jamais vraiment connu. J'avais été élevée par des personnes fabuleuses qui m'avaient tellement apporté, qui m'aimaient comme leur fille. Mais la vérité c'est que je ne l'étais pas. Et je ne le serai jamais. Lorsque j'étais enfant, j'étais insouciante, je ne me posais pas de questions quant à ma place au sein de la famille. Mais aujourd'hui c'était différent. Je ne me sentais pas à ma place. J'avais toujours était différente des autres. Je me sentais incomprise et cette sensation me renvoyait sans cesse à un profond sentiment de solitude.

Cette période de fête pleine de joie contribuait à rouvrir des plaids que je tentais de refermer depuis des années. Elle me rappelait la famille que je n'aurai jamais et celle dont je ne pourrai jamais vraiment faire partie.

Bien sûr, je ne cessai de me répétais que j'avais une chance inouïe d'avoir été accueillie par des personnes aussi généreuses que la famille Davis. J'étais consciente qu'à 17 ans, j'aurai dû m'amuser et profiter de la vie, comme toutes les adolescentes de mon âge. Je ne devais pas me renfermer sur moi-même, en particulier dans ces moments là. Les disputes arrivaient fréquemment, même dans les familles classiques. Pourtant, je ne cessai de me sentir différente, exclue et ça me rendait malheureuse.

J'étais absolument perdue quant à mon avenir. Dans moins d'un an, j'allais devenir majeure. Qu'adviendrait-il de ma place au sein de la famille? Est-ce que je devrai me débrouiller seule dans ce monde si compliqué ? Seule. Cet unique mot parvenait à me terrifier. Il y a un nom scientifique pour ça: l'autophobie. C'est cette crainte morbide d'être seule, c'est la peur de la solitude en elle même mais aussi la peur de soit même. Et cette peur elle même me hantait au quotidien.

Comment pourrais-je me débrouiller seule à l'avenir alors que je ne savais même pas quelle voie choisir ? Pourquoi c'était si compliqué de grandir ? J'aurai donné n'importe quoi pour redevenir la fillette insouciante d'autrefois. Celle qui ne s'inquiétait que d'une chose: pouvoir jouer le plus longtemps possible. C'était la raison pour laquelle, à ce moment précis, j'avais fermé les yeux en souhaitant quitter ce monde si terrifiant et si difficile pour aller dans un monde plus simple. Un monde où tout était possible. Un monde rempli de magie, comme ceux que j'imaginais étant enfant.

Je me suis très vite ravisée en pensant que j'étais vraiment pitoyable, qu'il y avait pire comme situation : j'avais des amis, une famille aussi. Et bien qu'elle n'ait jamais réellement été la mienne, elle était là quand même. J'avais un toit et j'étais en bonne santé. Que pouvais-je demander de plus que tout cela ? Malgré tout, je souffrais. J'en avais assez de me battre, de lutter. Je m'accrochais désespérément alors que je savais pertinemment que ça n'allait plus. Je voulais que ça change.

Je fermai les yeux en soupirant puis les rouvris et me remis à marcher sans aucune destination précise. Soudain, j'eus la sensation d'une présence derrière moi. Je me retournai brusquement et constatai que j'étais seule. Reprenant ma route, je ne parvenais pourtant pas à chasser cette impression d'être suivie. Mon sang ne fit qu'un tour lorsque, du coin de l'œil, je vis une silhouette passer à toute vitesse.

- Isaac, c'est toi? Demandais-je.

J'espérais, au plus profond de moi, voir mon frère aîné sortir de sa cachette, m'annonçant que c'était encore l'une de ses mauvaises blagues. Il passait son temps à essayer de me faire peur. Mais peut-être que cette fois, il tenait à me donner une bonne leçon pour être sortie seule, en pleine nuit.

Me sentant observée, je me tournais et me retournais en regardant dans toutes les directions possibles. Soudain, je sentis une main se poser sur mon épaule. Je sursautais et ressentis une étrange et désagréable sensation au creux de ma poitrine, comme si mon âme toute entière se faisait absorber avant de sombrer dans les profondeurs du néant.

C'est sur un sol froid que je me réveillai, secouée par un inconnu. Il fallut quelques secondes à mes yeux pour s'acclimater à leur nouvel environnement. Quand je pus à nouveau percevoir correctement, un jeune homme se tenait au dessus de moi et s'écriait :

- Eh ! La belle au bois dormant, on se réveille !

Je le considérai quelques secondes. Ses yeux d'un vert boisé m'envoûtaient. Il avait les cheveux en bataille et un air espiègle. Quand il s'aperçut que je le détaillais, il s'immobilisa quelques secondes puis entreprit de m'aider à me remettre sur pieds, me tendant une main qui me semblait amicale. Une fois debout, j'examinai les alentours en posant ma main sur mon crâne. J'étais encore un peu sonnée et j'avais la tête qui tournait. La panique s'empara de moi lorsque je me rendis compte que je n'étais plus dans les rues enneigées de mon petit village mais sur une étendue de sable fin. L'intrus interrompu le cours de mes pensées:

- Désolé, ce n'est pas le moyen de locomotion le plus confort.

- Qui êtes vous et où suis-je ? Demandai-je, alarmée.

Je sentis mes jambes trembler lorsqu'il m'annonça, avec un sourire malsain au coin des lèvres :

- Je suis Peter Pan. J'ai répondu à ta requête, te voilà au pays imaginaire.

Le Véritable Peter Pan (En Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant