[ Chapitre 16 ]

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A partir de cette nuit-là, je vis Élias chaque soir. Il me proposa une promenade dans un quartier que je n'avais jamais visité, où une bande d'adolescents se livraient à un concours de danse nocturne.
Nous étions assis à même le sol, blottis l'un contre l'autre, comme séparés du reste du monde.
Nous avons ensuite pris une boisson chaude dans un charmant café qui restait ouvert toute la nuit sans cesser de bavarder à propos de tout et de rien.
Durant tout ce temps, Élias n'a pas lâché ma main.

Il m'a ramenée chez Lise en déposant un baiser sur mon front, que j'ai accueilli en rougissant.
Les jours et les nuits se succédaient à une vitesse redoutable, et je baignais dans une espèce de transe formidable. Je ne savais pas de quoi serait fait demain, mais j'étais terriblement impatiente.

Mais c'est souvent après les beaux jours que vient la pluie. Ce jour-là, je me suis réveillée à midi, sacrément décalée, la faute à une discussion passionnante qui nous avait gardés la nuit au téléphone, Élias et moi. Lise préparait le petit-déjeuner tandis que la radio du salon diffusait un agréable air de jazz. Je me sentais flotter sur un nuage, légère comme une plume. Lise a souri en me regardant et a haussé les sourcils.

-Tu sens l'amour, a-t-elle commenté en m'aidant à mettre la table.

J'ai senti un sourire me plisser les joues jusqu'aux oreilles. J'ai sauté sur Lise et l'ai prise dans mes bras.

-Ah, mais c'est toi que j'aime, Lise !

La grand-mère éclata de rire et de me serra contre elle.

-Oui, oui, bien sûr, aucun rapport avec un garnement de boxeur mal coiffé, je n'en doute pas.

J'ai hoché la tête sans démentir, et me suis allongée sur le canapé en chantonnant.
On frappa à la porte.
Lise faillit lâcher l'assiette qu'elle posait sur la table de bois et pâlit. Personne ne toquait jamais à cette porte. Encore moins sans s'être annoncé à l'interphone du hall d'entrée.

-C'est peut-être Élias ? Ai-je chuchoté.

Elle secoua la tête et me fit signe d'aller dans la salle de bain en vitesse.
Je m'exécutai et fermai la porte derrière moi tandis que Lise cachait la couverture que j'avais oublié sur le canapé.

-Police, ouvrez ! A-t-on ordonné derrière la porte.

Mon pouls a accéléré. Oh non.
Non, non, pas maintenant.

J'entendis Lise ouvrir la porte.

-Bonjour madame. Nous avons reçu des signalements de position concernant la jeune Wendy Prissera, indiquant qu'elle résiderait à votre domicile, dit une voix sèche et grave.

-Ah oui ? Brailla Lise avec son assurance naturelle. Eh bien figurez-vous, mon grand, que cette jeune femme n'avait nul par où aller et que MOI je n'allais certainement pas la laisser seule dans les rues ! Alors retirez vos sales pattes de ma porte et allez plutôt réprimander ses parents !

L'agent de police s'apprêtait à répliquer quand j'ai ouvert la porte de la salle de bain.
Il était hors de question que Lise ait le moindre ennui à cause de moi, alors j'allais quitter sa vie tout de suite et raconter que je l'avais forcée de m'héberger sans ébruiter ma présence. Oui, c'était la seule solution.

-C'est bon, c'est bon. Je suis là, bravo, bonne pioche, ai-je répliqué en avançant vers eux.

Je me suis penchée devant la porte et ai réalisé que ce n'était pas à un seul agent que je m'adressai, mais à une troupe toute entière.
Maman avait envoyé une armée pour me récupérer, je n'en attendais pas moins d'elle.
Lise s'interposa entre eux et moi, les yeux embués de larmes.

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