[ Chapitre 19 ]

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Je n'ai pas dormi de la nuit.
Mon père avait mon téléphone, donc aucun contact n'était possible avec l'extérieur.
Il avait également refusé que mon Charlie dorme à mes côtés, et malgré ses pleurs, l'avait renvoyé dans sa chambre.
J'étais triste, furieuse et horrifiée de la tournure que prenaient les événements.

Mais par pitié, faites qu'Élias ne m'ait pas oubliée... ni qu'il fasse quelque chose d'irréfléchi.

Lorsque le soleil se leva, j'étais épuisée moralement plus que je ne l'avais jamais été.
Tout allait trop vite pour moi, mais je refusais de me laisser distancer par les événements.
Mon réveil indiquait huit heures quand on ouvrit brusquement ma porte.
Mon père, bien entendu.

La nuit blanche que je venais de passer ne m'aida pas à voir son visage avec plus de calme, j'étais toujours aussi pétrifiée devant cet homme que je ne connaissais pas.

-Bonjour, Wendy, déclara-t-il avec sa voix présidentielle, forte et déterminée.

Il n'attendit pas de réponse et tant mieux, car je n'avais pas l'intention de lui en donner une.

-Je veux que tu sois prête dans trois minutes exactes. Mets ta robe noire en soie, et hâtes-toi, enchaîna-t-il.

Il se retira sans un mot de plus et laissa deux femmes entrer derrière lui.
J'étais estomaquée.
C'était une plaisanterie ? J'étais sa prisonnière maintenant ?
Pourquoi diable rien ne pouvait se dérouler normalement ?!

Les femmes qui pénétrèrent dans ma chambre étaient nos maquilleuses et pour une raison que j'ignorais, elles me tartinèrent le visage de fond de teint, m'enduirent les cils de mascara et recouvrirent mes lèvres d'un rouge à lèvres clair.
Je fixai mon reflet dans la glace de ma coiffeuse, l'esprit vide.

-Mesdames... Pourriez-vous m'informer davantage ? Tentai-je.

Les maquilleuses, qui étaient de belles femmes avoisinant la quarantaine, pincèrent les lèvres dans un même mouvement et s'attaquèrent silencieusement à ma coiffure.
Super.
Les suggestions défilaient dans mon esprit, sans qu'aucune ne me paraisse intéressante.
J'allais devoir attendre.
Les femmes me tendirent la robe de soie noire que j'enfilai sans broncher.

Au bout de quelques minutes, la montre d'une des maquilleuses bipa et les deux femmes me relevèrent.
Cela faisait exactement trois minutes, j'imaginai.
Les femmes enfilèrent à mes pieds, de jolies chaussures noires et vernies sans talons, toujours sans prononcer un mot.
Elles me conduisirent dans le couloir éclairé qui menait directement jusqu'à... la salle de réception.

Accrochée dans le couloir, une large vitre me permis d'avoir un rapide aperçu de mon apparence.
Je suis restée éberluée quelques instants.
J'aurai voulu m'approcher de mon reflet, mais les maquilleuses m'entraînerent vers la salle de réception.

Je ressemblai à une enfant de quatorze ans, tout au plus.
Mes joues avaient été lissées, mes cheveux peignés et placés de part et d'autre de mon visage.
Le maquillage rendait mes yeux bruns immenses et ma bouche, rose comme celle d'une fillette.
Pour finir, la robe de soie noire éclipsait le peu de formes que j'avais et rendait mes bras frêles et légers.

Je n'eus pas le temps d'observer plus longtemps cette vision insensée car la salle de réception se dressa devant moi.
Une dizaine d'hommes et de femmes avaient pris place et discutaient avec une moue réprobatrice, leurs traits tendus.
D'autres convives arrivaient et mes mains devinrent moites.
Je reconnus les invités, ministres et autres clowns qui étaient présents à mon désastreux anniversaire.
Qu'allait-on encore m'obliger à faire ?

Mon père arriva à grandes enjambées depuis le fond de de la salle, toujours vêtu de son luxueux costume sombre.
Il s'empara de mon bras nu et congédia les deux maquilleuses d'un geste du menton.

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