[ Chapitre 18 ]

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J'ai rejoins maman qui était restée dans le salon.
Mon père, lui, avait déguerpi et je commençais à comprendre qu'il n'allait pas signer des papiers comme il tentait de nous le faire croire.
De mon côté, il était impossible de passer une seconde sans penser à Élias et à ce qu'il penserait de mon absence.
Je me suis assise silencieusement auprès de maman qui lisait un vieux roman et ai posé ma main sur la sienne.

-J'ai besoin d'explications, ai-je murmuré.

Maman releva sa tête et me fixa avec un air tendre que je ne lui connaissais pas.

-Je suis si heureuse que tu sois rentrée. Je n'en reviens toujours pas.

Mais je restais impassible.
Elle devait m'expliquer.

-Maman, que se passe-t-il avec papa ? J'ai besoin que tu me le dises, ça m'effraie, ai-je avoué.

Elle a relevé ses yeux vers les miens, épuisée mais souriante.

-Tu sais... Wendy nous en parlerons plus tard. Ce sont des affaires d'adultes qui nous regardent personnellement, ton père et moi. Je m'en occupe.

J'ai attrapé ses épaules.

-Ah non maman ! Si papa t'infliges le moindre tort, je veux que tu te battes, que tu lui montres que tu ne te laisseras pas faire ! Me suis-je écriée.

Maman eut un triste sourire et caressa mes mèches de cheveux.

-Je veux que tu t'occupes uniquement de toi, de ton retour ici, et que nous changeons tout ce qui n'allait pas toutes les deux.

Je me suis tue, comprenant que j'allais avoir du mal à la faire parler.
Mais je n'allais certainement pas en rester là.
Maman m'a alors interrogée sur mes goûts, me proposant jusqu'au déménagement si cela pouvait m'amener à me sentir mieux.

Ce caractère m'étonnait de plus en plus.
J'avais l'impression que la femme que j'avais côtoyé durant les trois dernières années n'avait tout simplement jamais existé.
Et je n'avais pas à me plaindre.

Nous avons donc convenu que les sols de marbre seraient remplacés par du parquet simple et que les lourds et luxueux rideaux seraient retirés des fenêtres.
Le soir venu, maman m'a enlacé et a posé un baiser sur mon nez, ce qui m'a fait sourire.
Je me sentais bien.

Presque.
Car en plus du problème qu'était devenu mon père, Élias m'obsédait.

Le soir venu, j'ai accepté que Charlie dorme à mes côtés.
Ce bambin m'avait tant manqué qu'il me faudrait du temps pour m'en remettre !
La nuit venue, j'ai ouvert la porte de ma chambre, toujours vêtue de mon pyjama.

Cette pièce a ranimé une foule de sentiments en moi, à commencer par les fameuses gifles de maman.
Mais ça appartenait au passé. Nous avions radicalement changé.
J'étais de retour chez moi, ai-je réalisé en avançant pas à pas.
Quelques heures plus tôt, ce constat m'aurait horrifiée, mais je devais avouer que j'étais surprise de mon retour.
Maman avait miraculeusement retrouvé son coeur mais mon père était devenu...

N'y penses pas tout de suite, me suis-je ordonné.

En approchant de mon lit, j'ai repéré quelque chose qui m'a ravi au plus haut point.
Mon téléphone portable, qui n'avait pas bougé.
J'ai sauté dessus, joyeuse comme jamais.
Après l'avoir branché, j'ai ignoré les centaines de notifications provenant de tous les réseaux sociaux que je côtoyais et ai fait la seule chose qui m'importait : j'ai tapé "Élias Arone" sur le net.

Durant toute cette journée, le jeune homme n'était pas sorti de mon esprit une seule seconde, c'était à en pleurer.
Sa voix, ses yeux et la douceur de son sourire me revenaient en tête avec plus de force à chaque reprise.
J'étais folle amoureuse, mes aïeux.

Élias Arone ne me mena pas à grand chose. Quelques photographies de ses combats, le lien d'inscription pour les cours...
Ah !
"Élias Arone" s'afficha dans les notifications de mon téléphone qui ne cessaient d'affluer.
Il m'avait ajoutée à ses amis à travers un des réseaux sociaux.
Aussitôt, je me dirigeai vers son profil et tapai un message avec une rapidité surhumaine.

"Élias ! Élias ils m'ont récupérée, et je ne sais pas du tout quoi en penser. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a du changement. Pardonne moi de ne plus être là."

-Qu'est-ce que tu fabriques ?

J'ai relevé la tête tout d'un coup.
Mon père se tenait sur l'encadrement de la porte, encore et toujours vêtu de son costume sombre.

-Rien du tout, ai-je menti.

Un sourire éclaira à nouveau son visage, me fichant la chair de poule.
Il avança brusquement et saisit mon bras.

-Eh ! Lâche-moi tout de suite ! Ai-je hurlé en frissonnant au contact de sa main froide.

Il me releva et écrasa mon dos contre mon armoire de bois noir, mon bras toujours broyé entre ses puissants doigts.
Mais rien ne m'effrayait plus que ses iris sans couleur, translucides.

-Tu n'aurais jamais du t'échapper, a-t-il susurré à mon oreille.

Il s'empara de mon téléphone qui chargeait toujours et le fourra dans la veste de son costume avant de resserrer sa prise sur moi.
J'avais l'impression de revivre l'agression de laquelle Élias m'avait tirée.
Bordel, j'aurais tout donné pour qu'il soit là.

-Je ne comprends pas pourquoi ta mère et toi ne vous contentez pas de la vie merveilleuse que je vous offre et je ne veux pas le savoir, cracha-t-il. Mais il est hors de question que tu me remettes un jour dans un embarras pareil.

Mon père attrapa mes boucles et les tira contre le mur, collant ma tête contre la surface dure et m'arranchant une grimace de douleur.
Il me dévisageait avec une colère monstrueuse et rien dans cet effroyable visage ne me rappelait l'homme qui m'avait souhaité un bon anniversaire seulement un mois plus tôt.

-Dorénavant je te tiendrais à l'oeil jour et nuit, Wendy. J'espère que tu as bien profité de ta liberté.

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-Non ! Ne fais rien d'irréflechi, s'il te plaît ! S'est écriée Lise.

Je faisais les cent pas dans mon salon, ne supportant pas de rester là sans rien faire.

-Mais merde ! Ils l'ont prise, ils l'ont prise...

-Crois moi, ça m'énerve autant que toi. Mais il serait idiot d'agir sans réfléchir, Élias, me raisonna la vieille femme.

Elle était assise sur une des chaises du salon, les joues encore mouillées.
Elle avait frappé à ma porte il y a dix minutes, dévastée, et avait bégayé en tentant de m'expliquer ce qui était arrivé.
Le président avait retrouvé sa fille.

-Alors que proposes-tu ? Me suis-je enquis.

Après quelques instants de réflexion, Lise s'est relevée et a posé ses mains fragiles sur ses hanches.

-On va agir subtilement. Tu vas récupérer ta princesse, gamin.

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