[ Chapitre 23 ]

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Ma voix se déchirait, s'envolait avant de redescendre dans une chute enflammée.

Élias me regardait, il me regardait.
J'avais encore le goût de ses lèvres froides sur les miennes et voilà qu'il tombait.
Il tombait.
J'ai posé sa tête sur mes genoux, le corps tremblant violemment.
Je voulais m'enfuir. Maintenant et tout de suite, avec lui.
Mais ses lèvres perdirent soudain leur couleur rosée, devenant aussi pâles que sa peau.
Je refusai catégoriquement ce qui était en train d'arriver.

-Regarde-moi, regarde-moi ! Élias, je t'aime, je t'aime ! Regarde-moi ! Ai-je bégayé.

Un merveilleux sourire éclaira le visage du jeune homme, qui se transforma en grimace et il s'évanouit, terrassé par la douleur.

Mon père éclata d'un rire qui n'avait rien d'humain, un rire qui sortait du plus profond de son âme souillée par la folie.
Et il pleurait.
Des torrents de larmes dévalaient son visage démoniaque.
J'ai hurlé et ai sauté sur mes pieds, rendue folle par le corps d'Élias qui gisait à terre.
Mon poing s'est écrasé sur le torse de mon père aussi fort que criait ma voix.
Son souffle fut coupé, mais je ne pus m'acharner davantage car Belval choisit cet instant pour me soulever de terre.

-LÂCHE-MOI ! AAH, LÂCHE-MOI ! JE VAIS L'ÉGORGER ! JE VAIS LE TUER ! POURQUOI ?! OH PUTAIN, POURQUOI ?! JE VAIS....

Mon regard se porta sur Élias, toujours inconscient, et je glissai dans les bras de Belval, brutalement coupée de toute énergie.
Mon père avait déguerpi hors de la salle à manger d'un pas rageur.
Et je tombai à mon tour, la bouche ouverte en un cri silencieux, les yeux rivés sur l'homme que j'aimais et qui se mourait.

J'entendis, comme dans un brouillard, la porte d'entrée s'ouvrir, puis les voix enjouées de Marilou et de Charlie. Puis celle de Belval, qui cria quelque chose sans cesser de me tenir.

-MARILOU ! LES SECOURS, APPELLE LES SECOURS !

L'information se glissa doucement jusque dans le cyclone de mon esprit.
Les secours.
Oui, les secours.
Belval m'a enfin lâché et a couru vers Marilou.

Élias.
J'ai pris délicatement son visage dans mes mains, laissant mes larmes couler sans interruption.
Il n'était pas mort, car c'était impossible. Je ne voulais même pas l'envisager.
Et pourtant...
J'ai posé un baiser sur sa joue glaciale et me suis allongée, enroulée autour de lui, pour échapper au cyclone de mon esprit.
Et même ainsi, en pleine hémorragie, il parvenait à me réchauffer.

Quand des hommes sont venus me l'arracher, j'ai tenté de protester, de crier mon refus, jamais plus on ne me le prendrait.
Mais je n'avais plus le moindre soupçon de voix.
Mon monde si solidement bâti autour de lui volait en éclats. Je ne voyais plus que son visage blanc.

Belval me porta jusqu'à ma chambre après le départ d'Élias pour les urgences.
Je voulais que mon père soit incarcéré immédiatement.
Mais j'allais en baver si je voulais envoyer mon président de père en taule.
Peu importe. Élias ne mourrait pas tant que je serais là, c'était impossible. Impossible.

Belval me posa sur mon lit et s'assit en face de moi.
Je voulais lui demander de retrouver mon père et de lui faire payer tout ça.
Mais pourquoi ? Pourquoi avait-il tiré sur Élias ?!
Je savais que mon père se baladait parfois avec un pistolet caché à la ceinture, mais ce n'était jamais au sein de la villa !

J'ai tenté de me redresser, ma tête me lançait.
J'ai ouvert la bouche pour annoncer à Belval que je n'avais pas l'intention de pourrir dans cette chambre tandis que je n'aurais pas de nouvelles d'Élias mais il m'a devancé.

- Je ne sais pas si il a survécu. Mais mademoiselle... Soyez prête à minuit. Je n'ai pas accepté ce poste pour voir une adolescente mourir de chagrin.

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