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Meyssa m'aide à aller jusqu'au toit. Ce n'est pas vraiment évident de me transporter jusque là, mais heureusement que l'ascenseur peut aller jusqu'au dernier étage. Elle ne comprend pas vraiment pourquoi je souhaite tant venir à cet endroit. Je ne lui explique pas, je lui demande seulement de me laisser tout seul, ce qu'elle fait.

À l'ancienne, on aimait trop venir sur ce toit avec Nadhem et Younes. C'était en quelque sorte notre QG, notre petit repère. D'ici, on avait l'impression de pouvoir toucher les étoiles. On avait l'impression de dominer la cité. On était en hauteur, et on pouvait observer tout le quartier, on voyait tout, rien n'avait de secret pour nous.

C'était sur ce toi que Nadhem venait écrire ses petites inspi d'un soir. Il lui suffisait de lever la tête au ciel, pour que les idées se mettent à fuser dans son cerveau. C'était sur ce toit que Younes venait rapper ses envies, ses peines. Et enfin, c'était sur ce toit, que je venais crier toute ma haine, que je venais recracher mon cœur, intoxiqué par les épreuves de cette vie.

Nadhem me répétait toujours " l'importance ce n'est pas la chute, mais l'atterrissage ". Ouais c'est vrai. Enfin de compte, peut importe comment tu tombes, ou d'où tu tombes, le principal c'est de surveiller ton atterrissage. Plus tu atterris mal, plus ça fait mal.

Moi je suis tombé de trop haut, de beaucoup trop haut même, et à vrai dire je n'ai pas encore atterris. Je suis toujours entrain de tomber, entrain de dévaler les collines, c'est pour ça qu'il faut que je me prépare pour le moment où je toucherais le sol.

Assis sur ce toit délabré, je ressort mon journal de taulard comme je l'appel. C'est un journal que je tenais à l'époque où j'étais enfermé. H-24 j'étais entre ces quatre murs, alors la seule chose que j'avais a faire c'était de prendre mon petit carnet et de commencer à gratter.

Le bruit de la porte qui claque et du verrou qui se referme derrière toi, ça te glace le sang. Même si tu n'es pas claustrophobe, et bah en taule tu le deviens. Tu remets tout en question, tu doute de tout, tu en viens même à douter de ton existence. Cette épreuve là m'a marquée et elle restera à jamais gravée en moi. Je crois que le pire, c'était qu'à ce moment-là je venais de me faire jeter comme un mal propre par la seule femme que j'estimais et en qui j'avais confiance, après ma sœur et ma mère.

Cette fille là était une fascinée de la vie, peut-être qu'elle l'est toujours d'ailleurs.  Mais en même temps, elle avait peur de la vie, des coups qu'il fallait prendre. Elle aimait la vie, mais elle avait peur d'elle en quelque sorte. Lisa, c'est la fille hypersensible, qui n'a pas trop confiance en elle, qui se trouve inintéressante et qui croit que personne ne l'aime ou que personne ne s'intéressera à elle. Mais je pense que là est son charme. Parce qu'elle à des putain de qualités, mais elle n'en est pas consciente. Elle à tout d'une belle fleur, mais elle ne s'en rend pas compte.

Cette fille avait, a,  le cœur sur la main, cette fille était, est, prête à aider l'humanité toute entière. Elle a toujours été là pour moi, m'a toujours tendue son oreille attentive et m'a toujours conseillé. Je me rappelle de la première fois où je l'ai croisé, encore aujourd'hui j'en rigole : 

" - Putain Tonio je vais l'étranger ce fils de chien. Donc je lui confie ma marchandise et ce bâtard, soit disant il l'a perd  ? Dix milles balles qui partent en fumée.

Capuche sur la tête, je sors de ce hangar ou je viens de perdre dix milles balles. J'ai la haine contre Tonio. J'attends de le croiser et je le propulse six pieds sous terre. On ne douille pas Raïs El Gawazi. J'ai tellement les nerfs que je parle tout seul. Je marche en direction de mon ter-ter lorsque je sens qu'on me rentre dedans. Je lève ma tête, et j'aperçois une petite meuf. Elle me regarde apeurée, limite en tremblant.

Le récit d'El GawaziOù les histoires vivent. Découvrez maintenant