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Perdue, elle était complètement perdue. Il faisait déjà nuit et elle ne savait pas où trouver un hôtel. Loin de se décourager, Narcisse décida de se balader dans les rues endormies jusqu'à trouver un endroit où elle pourrait se poser. En avançant dans le noir, elle finit par se trouver face à un petit parc. Elle poussa le portail gris et rentra à l'intérieur. Tranquillement, elle posa sa guitare par terre en s'allongea dans l'herbe humide. Elle admira le ciel noir où scintillait des milliers d'étoiles. « C'est ça ma vie, un trou noir éclairée par des milliers de lumières » songea-t-elle. Paisiblement, alors que son regard était posé sur la lune, ses paupières se fermèrent petit à petit. Elles étaient complètement closes quand une ombre vint découper la lune.

- Ce n'est pas une heure où les belles filles restent dehors. Fit une voix masculine.

Elle ouvrit subitement les yeux et se redressa. Un garçon se tenait debout, au niveau de ses pieds, et la fixait avec un sourire aux lèvres. Elle haussa les épaules.

- C'est une belle nuit je trouve.

Sur-ce elle ferma les yeux et se rallongea. Le garçon fronça les sourcils, l'air perplexe et quelque peu surpris.

- Ne me dis pas que tu dors ici tout de même ?

- Et bien si. Répondit-elle sans prendre la peine d'ouvrir une nouvelle fois les yeux.

Il éclata d'un rire gênée.

- C'est insensé.

Elle ne répondit rien, se disant que si elle arrêtait de parler il finirait par partir.

- Tu t'appelles comment ? reprit-il.

- Ana.

Court, simple, efficace, le premier prénom qui lui était sorti par la tête. Après tout, nouvelle vie rimait avec nouveau prénom. Elle effaçait tout et recommençait à zéro.

- Ana, ma mère m'a dit de ne jamais laisser une fille toute seule dehors. J'ai une chambre de libre chez moi, voudrais-tu y passer la nuit ?

Elle ouvrit un œil, soudainement intéressée.

- Ta mère t'a vraiment dit ça ?

Il rit.

- Non, mais je me suis dit que ça allait te convaincre.

Elle sourit, et ouvrit le deuxième œil.

- Marché conclu.

Certes, il ne fallait pas dormir chez des inconnus, mais c'était toujours mieux que de dormir dans un parc. De plus, elle mourrait d'envie de tenter de nouvelles choses et de rencontrer des visages nouveaux. Elle se releva et passa la sangle de sa guitare sur son épaule.

- Comment tu t'appelles ?

- Shawn.

- Enchantée Shawn.

Elle lui serra vigoureusement la main puis se dirigea vers la sortie du parc. Elle se retourna pour voir s'il suivait. Le garçon affichait un sourire béat.

- Je te préviens, il ne se passera rien entre nous. Déclara-t-elle en lui tenant la porte.

- Qu'est-ce qui te fait croire que tu m'intéresses ?

- Je te rappelle que tu viens de proposer à une parfaite inconnue de l'héberger.

- C'est de la simple gentillesse.

Elle haussa les épaules en marmonnant un « si tu le dis ». Disons qu'avec son physique avantageux, Narcisse avait pris l'habitude que des garçons tentent des choses absurdes pour elle en échange d'un baiser. C'était devenue en elle comme un automatisme. Sous la lumière des réverbères, elle put enfin voir clairement les traits de Shawn. Il avait une mâchoire carrée, de grands yeux marrons et des cheveux bruns. Plutôt beau garçon, il fallait l'admettre. Elle le laissa passer devant afin qu'il la guide.

- Que fais-tu ici en pleine nuit, Ana ?

Il prononça son prénom comme si c'était une blague.

- Je te retourne la question. Répondit-elle.

Son sourire s'agrandit.

- Et bien figure-toi que je rentrais d'une petite fête que je suis tombée sur une vagabonde.

- C'est moi la vagabonde ?

Il hocha la tête, tandis qu'elle lui lançait son meilleur regard de braise.

- Figure-toi que tu te trouves à côté d'une future star ! clama-t-elle.

Il haussa les sourcils, étonné, et l'incita du regard à développer.

- Je vais devenir chanteuse. C'est pour ça que je suis venue ici.

- Pourquoi ici ?

- Il parait que les producteurs grouillent les rues.

Il s'arrêta soudainement.

- C'est chez moi. Déclara-t-il.

Elle s'arrêta et se trouva face à un petit appartement à la façade défraîchie. Elle réprima une grimace. Dire qu'elle venait de quitter sa somptueuse villa... Shawn sortit une clef de sa poche et ouvrit la porte à la peinture rouge écaillée. Ils s'engouffrèrent dans le hall et il lui indiqua les escaliers.

- L'ascenseur est en panne. Expliqua-t-il.

Ils montèrent les escaliers en silence. 2 étages plus tard, ils étaient devant le perron de Shawn. Il ouvrit la porte et elle entra dans un petit appartement à la décoration chaleureuse. Il y avait quelques photos accrochées au mur et un grand canapé de cuir. Il posa ses clefs sur un plan de travail et la laissa passer pour qu'elle regarde le reste de la pièce. Elle hocha poliment la tête, pensant que c'était l'attitude à adopter. On était loin des pièces immenses de son ancienne maison et des meubles design. Mais bon, elle s'en contenterait.

- Je te sers peut-être quelque chose à boire ? proposa-t-il timidement tandis qu'elle déambulait dans les pièces.

- Volontiers ! Je meurs de soif.

Il lui servit un verre d'eau puis ils s'installèrent face à face sur la petite table de la cuisine. Elle but goulument tandis qu'il ne cessait de la fixer.

- On ne t'a jamais dit que c'était très gênant de regarder les gens avec insistance ? se plaignit-elle.

Il fit un sourie gêné.

- Désolé c'est que... je n'ai pas l'habitude.

Elle posa sa tasse contre la table dans un bruit retentissant et fit un sourire un peu trop forcé. Sa trop grande gentillesse la mettait mal à l'aise.

- Je peux voir ma chambre ?

Il fit un petit geste avec la tête, comme s'il venait de se réveiller.

- Oh oui, bien sûr.

Il se leva maladroitement et se hâta devant elle pour l'amener à une petite chambre.

- Merci. Bonne nuit Shawn.

Elle avait beaucoup marché et était éreintée. Il n'eut pas le temps de lui répondre qu'elle lui fermait déjà la porte au nez. Réaction surprenante, et surtout impolie. Il soupira et se rendit à son tour à sa chambre, ne cherchant pas à comprendre la jeune fille. Narcisse posa son sac à dos sur son lit, posa sa guitare dans un coin, se vêtit de son pyjama et sauta dans son lit. Elle sombra rapidement dans les bras de Morphée (sans se laver les dents, certes, mais il était tard et elle était fatiguée.)

Demain serait l'aube d'un nouveau jour. Un tournant dans sa vie.


Là où se perdent les rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant