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Son épaule fut secouée par une main, mais elle gardait les yeux complètements clos. Petit à petit, elle émergea de son sommeil et entendit une voix qui lui disait :

- Ana, réveille-toi Ana, tu vas être en retard pour ton travail.

Mais qui était Ana ? Etait-ce un rêve ? Cette voix semblait si réelle. Son épaule fut secouée plus violemment. Elle ouvrit les yeux et découvrit que la main appartenait à Shawn qui était penché au-dessus d'elle, l'air soucieux.

- Enfin tu te réveilles ! s'écria-t-il.

Elle se redressa lentement, sourcils froncés, pas totalement réveillée.

- Tu dois aller au travail ! la gronda Shawn. Ne me dis pas que tu as déjà oublié ?

A ce moment-là, elle se demanda pourquoi elle avait fui ses parents pour se retrouver dans un appartement avec un garçon comme Shawn.

- C'est bon, je profitais de mes dernières secondes de sommeil. Maugréa-t-elle en sortant de son lit.

- Mouais. Fit-il peu convaincu. Il faut que j'ailles en cours, sur ce, salut !

Il paraissait un brin agacé. Il est vrai que ce n'était pas toujours facile de s'occuper de Narcisse. Elle entendit la porte claquer, il était parti. Elle regrettait amèrement le temps où elle pouvait rester au lit autant qu'elle le voulait. C'était ça l'avantage de n'avoir personne qui s'occupait de vous. Ses parents se moquaient complètement que la vie de leur fille parte à la dérive. Mais maintenant il y avait Shawn, et le garçon avait entrepris de veiller sur elle. Elle s'habilla et déjeuna rapidement, puis quitta la maison à son tour. Elle allait devoir marcher à une bonne allure si elle ne voulait pas être en retard. En dévalant les escaliers à toute vitesse, elle croisa Alicia, qui sortait de sa maison au bras d'un séduisant jeune homme.

- Hey ! Ana ! cria-t-elle en faisant de grands gestes avec ses bras.

Elle lui répondit avec un petit coucou et un sourire et continua sa route. Elle oublia la dernière marche de l'escalier et tomba donc par terre. Un nouveau bleu apparut sur ses jambes dénudées tandis qu'elle se relevait précipitamment, croisant les doigts pour que personne ne l'ait vu. Elle se sentait fatiguée et lassée. Un travail qui ne l'intéressait pas le moins du monde l'attendait à un coin de rue, mais bien que celui-ci lui permette de vivre, elle n'était pas motivée. C'était une si belle journée ! Si elle était restée chez elle, elle aurait sûrement passé la journée à la plage, à bronzer au soleil. Ah, que la vie était devenue difficile depuis qu'elle était partie ! En se dirigeant vers son travail, elle passa dans une rue remplie de graffitis. Un en particulier attira son attention. En lettres blanches, il était écrit « Go as far as you can ». Ce simple tag agit comme un déclic en elle. Oui, elle était paumée dans sa vie, relativement pauvre et sans succès, mais tant qu'elle tenait debout, elle se battrait jusqu'à la fin pour réaliser son rêve. Alors oui, elle irait aussi loin qu'elle le pouvait, quitte à avoir des ampoules plein les pieds et des écorchures aux genoux.

Elle arriva au bar et salua le propriétaire, Joe.



Elle servait les clients et prenait les commandes. Elle avait chaud et elle ne pouvait pas s'empêcher de penser à sa guitare qui attendait dans un coin de sa chambre. Comment elle, si belle et si riche, avait-elle pu atterrir dans ce bar miteux ? Toute sa motivation était redescendue d'un coup. Elle comptait les minutes qui la séparaient de sa pause. Elle avait besoin d'air frais et elle avait besoin de faire le point. Au bout d'un moment, Joe lui fit signe que c'était l'heure de sa pause déjeuner. Soulagée, elle quitta le bar d'un pas léger. Elle pouvait s'estimer heureuse d'avoir pu trouver un travail, mais tout ça était si éloignée de son ancienne vie. Depuis quand fallait-il se battre pour avoir de l'argent ? Avant il atterrissait tout seul dans ses poches. Elle alla manger dans un petit café et paya avec l'argent qu'elle avait gagné avec la vente de roses. Elle déjeuna rapidement, écrasée sous le poids de sa solitude. Avant, elle était tout le temps entourée d'une bande d'adolescents qui tournaient autour d'elle comme une bande de moustique attirée par la nourriture. Elle soupira. Il fallait qu'elle arrête de ressasser le passé et tout remettre en question. Elle était partie et elle avait quitté son ancienne vie. C'était son propre choix et il fallait qu'elle l'assume. Un jour ou l'autre, elle ne regrettera pas d'avoir laissé derrière elle ce monde ce monde de beauté factice et d'hypocrisie.

Là où se perdent les rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant