C'était un bâtiment froid, une ruine des anciennes cathédrales dédiées au Tout-puissant avant que la guerre ne transforme les croyances et le culte unique en un panthéon de Dieux multiples. Les vainqueurs avaient détruits ou réutilisé les anciens bâtiments religieux des perdants au nom de leur religion, et cette cathédrale ne tenait debout que par miracle. Un miracle du tout-puissant ne cessait de répéter le prêtre. L'enfant, de ses grands yeux bleus, voyaient cela comme sa maison et ne comprenait pas qui était ce tout-puissant qui voulaient la lui prendre. Car cette cathédrale dont le couvrement et la voûte s'effondrait, cette petite sacristie, ces chapelles tantôt intactes ou tantôt couvertes de mousse, étaient sa maison. Et malgré les problèmes d'humidité, de froid, et l'inconfort, la fillette adorait sa grande maison qu'elle connaissait par cœur.
De mémoire d'enfant de 6 ans, elle n'avait connu que ça, et s'en accommodait parfaitement bien. Mais aujourd'hui était un jour particulier pour la cathédrale et pour la petite fille, le prêtre, qui l'avait recueillie quand elle était un nourrisson déposé sur le parvis, lui avait fait part de la venue d'un homme important. Elle était jeune, elle était innocente, et elle aimait beaucoup le vieux prêtre qui lui apprenait à lire, donc elle avait fait sa toilette et s'était faite belle pour le visiteur comme on le lui avait demandé.
Le reste de ses souvenirs était flou mais elle se rappelait toujours de la même chose. Ses petites jambes frêles avaient suivi le prêtre entre les gravats de la nef principale en trébuchant quand le pas était trop pressant pour elle. A la croisée du transept, sous un rai de lumière et devant l'autel, un homme encapuchonné attendait patiemment, le nez levé vers la lumière qui soulignait son drapé noir. C'était comme un tableau de maitre, chaque élément avait sa place, et les grands yeux innocents de la fillette avaient regardé l'homme comme s'il était le Tout-Puissant dont le prêtre lui parlait tant.
« - Monsieur ? »
Il s'était légèrement tourné vers elle, son visage restant dans l'ombre de la capuche, et lui fait avait un geste calme et gracieux pour lui faire comprendre qu'elle avait son attention.
« - Monsieur, c'est vous le Tout-Puissant ? Vous revenez dans votre maison ? »
De sa petite main, elle avait saisis le long tissus de sa cape et tiré dessus, comme pour se rapprocher de cette figure quasi-mystique pour la fillette naïve qu'elle était. Elle se souvenait avoir vu un sourire, un sourire attendri, sur ses lèvres alors qu'il s'accroupissait pour se mettre à sa hauteur et observer le visage de la fillette. Cette fillette pour laquelle il s'était déplacé de la capitale. Elle avait un joli visage d'enfant, en cœur, avec de petites lèvres roses et de grands yeux bleus curieux qui ne regardaient que lui, comme s'il était son nouvel univers. Sa voix était chaude, rassurante.
« - Je suis un ami du Tout-Puissant, petite Drina, je suis venu pour toi. Tu sais, mon ami est fier de toi. Alors il m'a envoyé te chercher pour te récompenser. Tu veux bien venir avec moi ?
- Je m'appelle pas Drina, Monsieur, le prêtre dit que j'ai pas de prénom parce que le Tout-Puissant m'en a pas donné, elle avait dit cela d'une voix contrite d'enfant boudeur.
- C'est le prénom que je te donne. C'est le prénom que le Tout-Puissant te donne. Maintenant, je vais m'occuper de toi, ma petite Drina. »
D'une simple pression sur son épaule, le prêtre l'avait poussé dans les bras de l'homme et de son destin. Ce n'est que bien après qu'elle avait pu se rappeler avoir vu l'inconnu donner une bourse conséquente au prêtre. Elle avait été vendue pour que la cathédrale soit reconstruite et, depuis ce jour-là, elle n'avait plus jamais cru au Tout-Puissant. La suite de l'histoire de cette gamine aux cheveux blancs était banale pour une enfant sans parents dans un pays qui tentait de se relever après la guerre. L'homme encapuchonné l'avait déposée chez une vielle mégère qui l'avait fait travailler dur tous les jours dans des tâches plus ou moins harassantes.
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Le Rossignol Blanc
FantasyDrina, la lumineuse et célèbre prostituée, cache un lourd passé que tient d'une main de fer le propriétaire du Rossignol et geôlier aussi sombre qu'impitoyable. Entre haine et passion, le Rossignol se fait le cadre de l'histoire d'incubes et succube...